Dans le quartier Bois-Blancs à Lille, au sein du siège des Cafés Méo, les effluves de café fraîchement torréfié parfument l’atmosphère. Ce parfum suave et réconfortant plonge immédiatement dans l’univers de la famille Meauxsoone. À la tête des Cafés Méo, un diminutif issu du nom de leurs aïeux immigrés belges, Gérard Meauxsoone, 69 ans, et son fils Edgar, 29 ans, président aux destinées de cette "ETI française à capitaux familial et indépendant". Une performance dans un milieu trusté par les multinationales américaines et autres poids lourds italiens.
Le succès du bio
En 2024, Cafés Méo s’illustre particulièrement sur le marché du café bio. Avec un quart de part de marché français, il est la première marque bio en France et tire toute la filière avec 48,5 % de croissance. "Nous nous sommes positionnés dès les années quatre-vingt-dix sur ce segment. Un choix fort, profondément ancré dans nos valeurs", revendique Gérard Meauxsoone, l’un des premiers français à décrocher la certification Max Havelaar. Son deuxième relais de croissance repose sur le café en grains, qui connaît un retour en grâce avec l’avènement de nouvelles machines broyeuses, alliant expresso de qualité et zéro déchet. Sur ce terrain de jeu, Méo revendique la troisième place française.
“Haute qualité à prix compétitif”
La marque puise ses racines sur les marchés du Nord, fondée par les frères Jules et Émile Meauxsoone. Au fil du temps, elle s’est hissée dans le top 10 des petits noirs français, grâce à une stratégie fondée sur la patience et les valeurs. Les aïeux fondateurs étaient sans doute loin d’imaginer qu’un siècle plus tard, leur étal de café, crémerie et volailles aurait passé le cap des 250 salariés, générant 209 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023 pour le groupe Méo-Fichaux (contre 160 M€ en 2022), dont 92,1 millions d'euros pour Cafés Méo (58 M€ en 2022). "L’ADN de Méo repose sur des produits de haute qualité à prix compétitif", assure Gérard Meauxsoone.
Durant la Seconde Guerre mondiale, l’entreprise familiale change d’envergure. Les frères Meauxsoone, qui disposent désormais d’une licence d’importation, délaissent les marchés pour s’établir dans une dizaine de magasins dans la région. La marque Méo connaît alors un succès local. On torréfie directement dans les échoppes, devant les clients, ravis de déguster des pépites en provenance des colonies françaises. Ce café trouve aussi preneurs, en vrac, dans les épiceries régionales. Mais l’émergence de la grande distribution sonne le glas du modèle des boutiques de proximité, et change la donne.
L’expansion nationale grâce à la grande distribution
Entré dans l’entreprise en 1975, en tant que représentant de la deuxième génération, Gérard Meauxsoone est alors un jeune ingénieur. Il va s’atteler à développer la marque familiale sur le marché français. Les cafés Méo sont alors essentiellement distribués en GMS et il profite de l’expansion de ce modèle pour asseoir l’entreprise. "Cette entrée dans la grande distribution a fait perdurer notre marque quand d’autres, similaires dans le Nord, disparaissaient", se souvient-il. Une anecdote perdure même dans la famille, racontant qu’au début de cette ère, son oncle a réussi à imposer un prix d’achat à Auchan !
L’alliance gagnante avec Fichaux
Après ce virage des années soixante-dix, 2012 marque une autre des grandes étapes du torréfacteur, lorsqu’il s’allie avec Fichaux Industries. L’importateur et torréfacteur basé à La Madeleine, à côté de Lille, conçoit à façon des cafés en marques blanches, mais ne dispose pas de marques propres. La complémentarité évidente avec l’activité de Méo et le partage de valeurs communes scellent leur alliance via le groupe méo-Fichaux. Dirigé via une gouvernance partagée entre Gérard Meauxsoone et Dominique Ruyant, président de Fichaux Industries, Méo-Fichaux produit 34 000 tonnes de café par an et revendique 14 % de parts de marché en GMS.
Forts de cette association, ils se lancent dès l’année suivante dans une nouvelle activité de capsules compatibles avec les machines Nespresso. "Nous en sommes à la sixième génération de capsules, se réjouit Gérard Meauxsoone qui s’enorgueillit d’avoir mis sur le marché la première gamme de capsules 100 % végétales et compostables à domicile". Ainsi, les capsules de cafés Méo sont uniquement vendues sous l’étendard "home compost". Manière, encore une fois, de s’impliquer dans une politique RSE chevillée au corps. Au total, Méo-Fichaux a investi 12 millions d’euros pour agrandir l’usine de La Madeleine, une extension inaugurée en 2022, avec des lignes de conditionnement capables de produire un milliard de capsules par an.
La tentation de l’étranger
Rejoint en 2020 par son fils Edgar, bras droit et responsable de la digitalisation et du développement de projets après un passage chez BackMarket, Gérard Meauxsoone poursuit inlassablement le travail entamé par ses prédécesseurs. Si l’heure de la transmission n’a pas encore sonné, le représentant de la troisième génération n’hésite pas à évoquer de futurs projets. Il s’agit évidemment de "pérenniser l’entreprise familiale", ce qui pourrait passer par "une croissance à l’international, notamment externe". Les marques de cafés étant très dépendantes de leur pays d’origine, l’acquisition d’une signature locale se révélerait plus opportune pour intégrer un nouveau marché. Et écrire un nouveau chapitre à la longue histoire de Méo.
