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Michel Salaün, président de Salaün Holidays : "Nous devrions retrouver le niveau d’activité de 2019 en 2026"
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Michel Salaün président de Salaün Holidays "Nous devrions retrouver le niveau d’activité de 2019 en 2026"

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Alors que Thibaud Scouarnec devient directeur général du voyagiste finistérien Salaün Holidays basé à Pont-de-Buis lès-Quimerch et à Châteaulin (595 salariés), Michel Salaün, petit-fils du fondateur et président du groupe, partage les derniers résultats de l’entreprise qui renoue avec la rentabilité et la croissance.

Michel Salaün et Thibaud Scouarnec, président et DG de Salaün Holidays — Photo : DR

Comment Salaün Holidays a passé la crise sanitaire ?

Comme tous les tour-opérateurs et agences de voyages, nous avons pris de plein fouet la crise du Covid avec le variant Omicron qui a pris le relais jusqu’en mars-avril 2022. Nous avons vécu deux années blanches de mars 2020 à mars 2022. Pendant presqu’un an, nous n’avons presque pas fait de chiffre d’affaires. En 2021, notre chiffre d’affaires était de 20 millions d’euros. Alors que nous commencions à retrouver des couleurs, le conflit russo-ukrainien a engendré des dommages importants pour notre activité puisque que nous sommes le premier tour-opérateur en Russie où nous faisons voyager, par an, plus de 10 000 clients ainsi que dans les Républiques de l’ex-URSS et les pays de l’ancien Pacte de Varsovie – Pologne, Bulgarie, Roumanie, République tchèque notamment. Notre chiffre d’affaires a été impacté par tous ces désordres géopolitiques. Au 30 septembre 2019, il était de 220 millions d’euros en production directe de voyage par Salaün, quatre ans après, au 30 septembre 2023, il ressort à 130 millions d’euros.

Le groupe a néanmoins retrouvé le chemin de la croissance et renoué avec les bénéfices…

Aujourd’hui, nous avons retrouvé nos fondamentaux : les gens voyagent de nouveau. Nous avons beaucoup travaillé sur la rationalisation de nos coûts, et même avec un chiffre d’affaires moindre, nous devions retrouver dès 2024 notre rentabilité historique. Notre exercice 2023 s’est clôturé au 30 septembre dernier avec des résultats au-dessus de nos prévisions : un chiffre d’affaires consolidé de 149 millions d’euros, un Ebitda consolidé de 2,7 millions d’euros et un résultat net positif de 1,4 million d’euros. Cette rentabilité positive et notre excellente trésorerie nous permettent d’appréhender l’avenir avec sérénité. Comme toute entreprise touchée par la crise, nous avons sollicité un PGE pendant la crise Covid que nous commençons à rembourser. L’activité globale du groupe s’est particulièrement redressée sur tous les secteurs d’activité (tour-opérating, distribution de voyages et activité autocars) ; elle est bien repartie cet hiver 2023/2024, avec notamment des ventes long-courriers sur les circuits accompagnés qui s’inscrivent en forte progression.

L’arrivée de Thibaud Scouarnec à la direction générale du groupe présage-t-elle certains changements ?

La venue d’un nouveau directeur apporte forcément des changements dans le sens où il voudra lui aussi apporter sa pierre à l’édifice. À 36 ans, Thibaud incarne une nouvelle génération de managers. Présent dans le groupe depuis 8 ans en tant que directeur du service de contrôle de gestion, il collaborait étroitement avec son prédécesseur Nicolas Delord qui occupait le poste de directeur général depuis trois ans et qui nous a quittés en très bons termes fin décembre 2023. En plus de ses qualités de gestionnaire, Thibaud a participé aux actions de transformation du groupe. Il s’est naturellement imposé comme son successeur. Avec notre comité de direction, nous sommes très attentifs à trouver de nouvelles ressources et des axes de progrès.

En quoi consiste le plan de transformation que vous avez entrepris depuis trois ans ?

Dans les périodes plus tendues, il faut passer tous les postes de charge à la paille de fer et regarder les améliorations à apporter. Nous avons profité de la période de la crise du Covid pour mener des actions de transformation au sein de l’entreprise et introspecter nos process internes afin d’être à la fois plus productifs et plus rationnels et aussi bien sûr dans le but de sauvegarder les emplois. Nous avons mené beaucoup de réorganisations et de rationalisations de nos organisations.

"Beaucoup d'agences de voyages ont fermé dans l'Hexagone suite au Covid"

Le Covid a ainsi été l’occasion de s’interroger sur la performance de chacune de nos destinations. Avec la fermeture de la Russie, nous avons redéployé sur d’autres destinations les 15 personnes qui travaillaient sur la filiale Pouchkine Tours dédiée à la Russie. Enfin, si les organisations étaient jusque-là faites en silos, avec trop peu de communication entre les différents services et donc pas assez d’optimisation des synergies, aujourd’hui elles sont beaucoup plus transversales.

Vous avez également travaillé sur la digitalisation de votre offre ?

Même si nous ne sommes pas un pure player, nous avons un parc retail (agences de voyages physiques) très important - le groupe compte 145 agences en France et 12 en Belgique. À la fois tour-opérateur et distributeur, nous commercialisons nos voyages pour 65 % via des réseaux tiers type Leclerc Voyages, Havas Voyages, Selectour, Carrefour, etc., et pour 35 % dans nos propres agences. Cela est lié notamment aux produits que nous vendons, les circuits accompagnés sur les 5 continents : les gens viennent dans nos agences chercher des conseils. Alors que beaucoup d’agences de voyages ont fermé dans l’Hexagone suite au Covid, Salaün Holidays en a seulement fermé quelques-unes à la marge.

"Le seul sujet qui nous préoccupe concerne la géopolitique mondiale qui impacte fortement notre activité avec une carte du monde qui se rétrécit"

Ayant repris, en décembre 2019, 59 agences Thomas Cook suite au dépôt de bilan de la maison mère, nous avons logiquement dû fermer une quarantaine d’agences entre 2020 et 2024 car certaines villes, comme Nantes, Quimper, Rennes, Paris… comptaient plusieurs agences Salaün Holidays et Thomas Cook presque côte à côte. Si nous avons également été amenés à en fermer sur certaines régions où les affaires avaient repris plus timidement, nous avons aujourd’hui trouvé un équilibre avec un réseau stable à quatre ou cinq agences près. La vente sur internet est en développement. Nous faisons néanmoins beaucoup de web to store. La concrétisation d’achat n’est pas la seule finalité du web : Internet se révèle être un formidable outil pour faire venir les gens dans nos agences. Pour assurer la continuité et l’optimisation de notre plan de transformation digitale, nous venons de recruter une nouvelle directrice e-commerce et digital, Carole Fournot, ancienne directrice e-commerce de Belambra.

Comment se profile l’avenir ?

Nous avons retrouvé le chemin de la rentabilité avec une activité tourisme qui rattrape ses niveaux de pré-pandémie. Les choses sont reparties dans le bon sens, je ne suis pas inquiet pour notre activité. Le seul sujet qui nous préoccupe concerne la géopolitique mondiale qui impacte fortement notre activité avec une carte du monde qui se rétrécit. Mais dans nos métiers nous avons appris à être agiles. Même si nous avons dû fermer la Russie et observé une baisse des ventes des pays de l’Europe de l’Est, nous sommes repassés dans le vert au niveau financier. Nous devrions retrouver le niveau d’activité de 2019 en 2026, même si les gens s’inquiètent d’une possible extension du conflit russo-ukrainien fortement relayé par les médias qui parlent même de velléités extraterritoriales de la Russie ou encore de l’issue du conflit israélo-palestinien qui impacte toute la région du Moyen-Orient. Heureusement, le continent européen performe bien ou sur les longs courriers avec notamment le Japon et le Vietnam, destinations de l’année par excellence.

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