Geneseas, c’est son nom, mesure 1,5 m x 1,2 m. La version actuelle est la taille S. Alimenté par des panneaux solaires et des turbines, il est capable d’engloutir 140 litres de déchets flottants (mégots, plastiques, canettes…) ou d’hydrocarbures avant de rentrer en autonomie à sa base pour être vidé. Il est aussi programmé pour analyser l’eau (PH, température, conductivité, etc.) et cartographier les sources de pollution issues par exemple d’un cours d’eau qui se déverse dans un lac ou d’un bateau qui largue des eaux sales dans une marina. Six ans après sa création, Geneseas prend son envol.
40 exemplaires livrés en 2024
Cinq modèles fonctionnent déjà à La Rochelle, Brest, Ibiza, Palma de Majorque et Valence. En 2024, ce sont 40 exemplaires qui seront livrés en France, en Espagne, en Équateur, à Monaco. Geneseas y œuvrera dans des ports, des lacs, des bassins aquacoles, pour toujours "dépolluer sans polluer" comme aime à le répéter son créateur à l’enthousiasme contagieux, Alan d’Alfonso Peral.
Ce rugbyman argentin n’était venu en France que pour assister à la coupe du monde de rugby en 2007. Conquis, il s’établit en Creuse. Amateur de plongée, il fonde l’association Recyclamer en 2016, toujours active pour sensibiliser le public à la préservation des milieux aquatiques. Entrepreneur dans l’âme et faute de pouvoir exercer son métier de radiologue, il crée Recyclamer Innovation, son entreprise, en 2018 à Guéret. Il teste la même année la première version de son robot sur le lac voisin de Courtille et le présente au Grand Pavois de La Rochelle, port pilote.
Fabriqué en circuit court
"Le robot a tout de suite intéressé, mais je n’allais pas le commercialiser ainsi, c’était comme une poubelle flottante", s’amuse le dirigeant. Il se rapproche de l’université de Limoges, déménage à Saint-Junien (Haute-Vienne) en 2019, lève 450 000 euros et consacre deux ans à mettre au point sa sonde multiparamètre avec le laboratoire de l’université, en pointe sur le traitement de l’eau. Le robot est aujourd’hui protégé par deux brevets européens. "Ce n’est pas qu’un aspirateur", répète le fondateur.
Suivant sa logique vertueuse, Alan d’Alfonso Peral opte pour des fournisseurs voisins. Le design est signé du rochelais Yacht Concept (L’Hermione), les coques sont fabriquées par Masters Composites à Aytré (Charente-Maritime), les fibres du filtre sont naturelles et produites en France ; l’électronique est assurée par FBO (14,2 M€ de CA en 2022), basé aussi à Saint-Junien, devenu son principal actionnaire en février 2023.
La taille M dans les tuyaux, la taille L en réflexion
En vendant 42 % des parts à son fournisseur, Recyclamer a assuré son avenir, à commencer par le développement de la taille M. Le prototype sera bientôt testé à Majorque (Baléares). Il mesure 6 m x 2,4 m et se destine aux grands lacs ou entrées de port. "Mon but est d’améliorer la planète. Rien que de voir un robot fonctionner dans une marina encourage à plus de vigilance, de la même manière qu’on jette moins par terre quand quelqu’un passe le balai à côté", plaide le dirigeant, pas peu fier de la réussite de son équipe, qui compte déjà sept collaborateurs.
Labellisé par la fondation Solar Impulse, lauréat du prix Innovation 2022 Vivatech, "Geneseas a été piloté deux fois par Élisabeth Borne et par Emmanuel Macron aussi. C’est la Rolls Royce du système de collecte. Nous visons les ports les plus grands de la planète", ambitionne l’entrepreneur. Alan d’Alfonso Peral planche déjà sur la taille L destinée au septième continent, cet amas de déchets plastiques flottant sur les océans, "dans cinq ou six ans", et sur une collecte au fond des plans d’eau.