Gilles Henrio, président du tribunal de commerce de Saint-Brieuc, qui regroupe tout le département excepté Dinan, a présenté l’activité de la juridiction en 2023. Au total, 264 entreprises ont fait l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire), l’année dernière. Un chiffre en hausse de 25 % sur un an, mais de 8,6 % par rapport à 2019, période pré-Covid. 55 ont fait l’objet d’une liquidation immédiate, soit + 77 % sur un an et + 223 % comparé à 2019.
"Les liquidations judiciaires de l’exercice 2023 s’inscrivent dans un contexte de réajustement des procédures collectives, limitées pendant la crise sanitaire, et avec un nombre important de fermetures de petites structures créées pendant cette crise", commente Gilles Henrio. "Ces petites entreprises, souvent créées sous forme individuelle, l’ont été de manière faiblement capitalisée et donc fragilisée dès le départ par une incapacité à financer leur fonds de roulement, à une période où les donneurs d’ordre tirent les marchés vers le bas et où les consommateurs font des arbitrages." Les sociétés les plus concernées par ces liquidations se retrouvent dans le commerce, le bâtiment et les bars restaurants.
Davantage d’entretiens de prévention avec les dirigeants
Le passif fiscal (dettes non recouvrées) déclaré à la suite des procédures collectives s’est élevé à 71 millions d’euros en forte hausse (historiquement, il ne dépasse pas 50 millions d’euros, NDLR). Mais la liquidation de Pincemin (maisons E-Loft) pèse à elle seule 32 millions d‘euros. Le nombre de personnes concernées par les procédures collectives se monte quant à lui à 953 collaborateurs (+ 41 % sur un an).
Au chapitre de la prévention, les entretiens confidentiels avec les chefs d’entreprise en difficulté ont progressé de 29 % sur un an (254 entretiens au total) et de 60 % par rapport à 2019. Grâce parfois à l’initiative de maires et d’organisations professionnelles. "Nous leur rappelons les clés du succès d’une entreprise : bien calculer le besoin de fonds de roulement et son financement, travailler avec un juriste les contrats tels que les conditions générales de vente, les baux, les contrats de travail, afin de délimiter le champ des responsabilités. Ou encore mettre en place un tableau de bord", énumère le président du tribunal de commerce.
Dérives sur les délais de paiements
Autre fait marquant, les injonctions de payer ont augmenté de 6 %. "Il est souvent évoqué que les donneurs d’ordre publics et privés tentent de financer leur besoin en fonds de roulement en augmentant les délais de paiement sans respecter les règles fixées par la LME (loi de modernisation de l’économie, NDLR). À titre d’exemple, dans les travaux publics il est constaté une dérive des délais de paiements qui, poussés jusqu’à 55 jours, ne respectent pas le délai légal de 39 jours", note encore le magistrat.
3 700 créations d’entreprises
Enfin, bonne nouvelle du côté du registre du commerce, contrairement à la tendance nationale qui voit le nombre de créations baisser de 5,4 %, le nombre d’immatriculations dans les Côtes-d’Armor progresse très légèrement. Précisément de +0,87 % par rapport à 2022 et de +17 % par rapport à 2019, avec près de 3 700 nouvelles entreprises.