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"J’ai décroché un brevet pour valoriser ma start-up et rassurer les investisseurs"
Strasbourg # Santé # Innovation

"J’ai décroché un brevet pour valoriser ma start-up et rassurer les investisseurs"

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Spécialisée dans l’hypnose en réalité virtuelle appliquée au traitement de la douleur et de l’anxiété, la start-up strasbourgeoise Hypno VR équipe aujourd’hui 500 établissements de santé en Europe. Elle a décroché récemment un brevet européen. Son PDG, Nicolas Schaettel, nous explique pourquoi et comment Hypno VR s’est lancée dans ce parcours du combattant qui a duré près de cinq ans.

Nicolas Schaettel — Photo : DR

Que protège le brevet européen obtenu par Hypno VR ?

Il protège notre invention, c’est-à-dire tout le mécanisme qui permet de créer des séances d’hypnose médicale via un casque de réalité virtuelle et la capacité à "monitorer" l’état du patient en temps réel. Pour rappel, notre outil cible le traitement de la douleur et de l’anxiété. Il a fallu démontrer le caractère innovant de l’invention. Ce qui implique un gros travail de rédaction extrêmement technique.

Quelles ont été les principales difficultés dans l’obtention du brevet ?

Le brevet devient vite très technique. Le premier challenge, c’est d’arriver à démontrer que le brevet qu’on dépose concerne vraiment une invention nouvelle par rapport à un état de l’art. Les demandes sont examinées, et les examinateurs peuvent trouver des documents dont vous n’aviez pas forcément connaissance. À partir de là s’instaure un dialogue. Dans le cas d’Hypno VR, il a notamment fallu prouver le côté inventif d’utiliser une tablette comme outil de commande d’un casque de réalité virtuelle. Dans l’utilisation que nous souhaitions en faire, nous avons démontré que c’était réellement nouveau.

Quels conseils donneriez-vous à une start-up qui souhaite décrocher un brevet européen ?

En matière de propriété intellectuelle et de brevets, je dirais qu’il n’est jamais trop tôt pour commencer. Chez Hypno VR, on a initié très tôt les démarches de protection, dès 2018 alors que nous n’avions pas encore commercialisé notre innovation. On s’est dit qu’à court terme, ce ne serait pas forcément décisif mais que ça le deviendrait à moyen ou long terme face à l’émergence de concurrents, face à des sociétés qui allaient avoir plus de moyens que nous. Dans une démarche de valorisation des actifs de l’entreprise, au regard de financements que nous allions solliciter, nous en sommes arrivés à la conclusion que ce serait un argument majeur.

"Nous avons travaillé avec des conseillers en propriété industrielle. Dans la constitution du dossier, le fond est aussi important que la forme, il faut être accompagné"

Si j’avais un deuxième conseil à donner, j’ajouterais qu’il est vraiment primordial de se faire accompagner par des experts. Nous avons travaillé avec des conseillers en propriété industrielle, le cabinet Laurent et Charras à Strasbourg et ICOSA à Paris. Dans la constitution du dossier, le fond est aussi important que la forme, il faut être escorté par des gens qui savent de quoi on parle. Et enfin il faut être patient. Pour nous, entre le début de la démarche et l’obtention du brevet européen, il s’est écoulé pas loin de cinq ans. Nous avons aussi, il faut s’en souvenir, subi le Covid…

Autre élément, il faut être très clair sur les raisons pour lesquelles on le fait et ce qu’on en attend. Quand on est dans des domaines où il n’y a pas forcément beaucoup de barrières à l’entrée et où finalement les cycles de mise sur le marché sont courts, le brevet est intéressant mais pas essentiel puisque ce qui compte avant tout, c’est la capacité à conquérir un marché le plus rapidement possible et le plus fortement possible. Protéger l’invention est dans ce cas secondaire.

L’obtention d’un brevet s’est inscrite, chez Hypno VR, dans une démarche plus large de protection de la propriété intellectuelle…

Oui, l’obtention du brevet fait partie d’une stratégie de valorisation de nos actifs immatériels, par le brevet, la protection des marques, la protection du code informatique, de dessins et de modèles… Il y a tout un arsenal de dispositifs de protection de l’innovation et il est important de considérer l’ensemble des mécanismes de protection en fonction des innovations qu’on développe mais aussi en fonction de leur valeur. Le brevet, c’est beaucoup d’argent, ça se compte en dizaines de milliers d’euros d’investissement. On peut l’estimer à 50 000 euros pour un brevet européen et la moitié pour une demande à l’INPI. Il existe parfois des mécanismes moins onéreux. Mais effectivement, il s’agit chez nous d’une démarche globale. Par exemple, le fait d’avoir été proactif sur le dépôt de la marque Hypno VR nous a permis de mener des actions juridiques face à des concurrents potentiels. Plus généralement, l’idée rassurante pour les financeurs, c’est que la protection de la propriété intellectuelle rend l’investissement moins risqué. Dans cette idée, le brevet européen évite les mauvaises surprises à long terme, de se voir intenter un procès… Il y a eu récemment à ce titre un exemple assez parlant avec le procès intenté par Masimo à Apple autour des brevets relatifs aux capteurs de l’Apple Watch.

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