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Enquête exclusive : les entreprises s’emparent de la RSE
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Enquête exclusive : les entreprises s’emparent de la RSE

PME et ETI sont aujourd’hui convaincues, dans leur très grande majorité, de la nécessité d’engager une stratégie RSE. Une proportion importante a déjà sauté le pas et décline cet engagement en matière environnemental, social et sociétal. C’est ce qui ressort d’une enquête exclusive menée auprès de 470 entreprises en France par Le Journal des Entreprises et ses partenaires, Gulfstream Group, Praxis et Qualinove.

Les entreprises sont particulièrement actives sur le front environnemental de la RSE — Photo : D.Gz/Midjourney

Apparue dans les années soixante aux États-Unis dans le domaine académique, la responsabilité sociétale et environnementale (RSE) des entreprises a mis de nombreuses années à s’inscrire de plain-pied dans la réalité économique.

Aujourd’hui, c’est un des piliers de la stratégie de croissance de n’importe quelle entreprise, petite ou grande, quel que soit son secteur d’activité. Il faut dire qu’après avoir été un "must have" à vocation marketing, la RSE s’impose à présent comme une contrainte réglementaire en passe de révolutionner la compliance.

Contraintes législatives

Les grandes entreprises doivent désormais identifier et prévenir les risques sociaux et environnementaux liés à leurs activités (loi sur le devoir de vigilance de 2017) ou publier un rapport annuel sur leur performance environnementale et sociale (loi Grenelle II de 2010). Toutes les entreprises sont tenues par ailleurs d’afficher un indice de réparabilité de leurs produits électroniques et électriques (loi antigaspillage pour une économie circulaire de 2020), indiquer la provenance et la qualité des ingrédients utilisés dans les plats cuisinés (loi sur l’information des consommateurs sur les produits agricoles et alimentaires de 2021), réaliser un audit énergétique pour réduire leur consommation d’énergie (loi sur la transition énergétique pour la croissance verte de 2015), élaborer un plan de mobilité pour réduire les déplacements en voiture individuelle et encourager l’utilisation de moyens de transport plus durables (loi climat de 2021).

Plus encore de nouvelles contraintes, cette fois européennes, arrivent qui fixent par exemple depuis le 1er janvier 2024, de nouvelles normes et obligations de reporting extra-financier aux grandes entreprises et aux PME cotées en Bourse (directive européenne CSRD) ou obligent les entreprises à gérer les impacts sociaux et environnementaux tout au long de leur chaîne d’approvisionnement (projet de directive européenne sur le devoir de vigilance).

On le voit, loin d’être un simple concept plus ou moins théorique et peu opérationnel, la RSE est au contraire aujourd’hui un élément clef de la gestion d’une entreprise et de sa stratégie de développement. Reste à savoir où en sont vraiment les entreprises, petites, moyennes et grandes, dans cette prise de conscience.

Pour le savoir, Le Journal des Entreprises, associé à Gulfstream Group (agence de communication), Praxis (institut d’études et de conseil sur la relation client) et Qualinove (conseil en Management Qualité Sécurité Environnement) ont mené une enquête auprès de 470 entreprises en France de toutes tailles et de tous secteurs d’activité.

Toutes les entreprises sont concernées

Premier constat, la quasi-totalité (95 %) des entreprises interrogées (toutes tailles et tous secteurs d’activité confondus) se dit concernée par la RSE, 39 % possédant une "bonne maturité RSE" (après avoir lancé un programme RSE depuis plusieurs années) et 47 % s’inscrivant résolument dans une phase de "découverte" de la RSE (26 % en phase de démarrage, 21 % avec, déjà, quelques initiatives à leur actif). Au total, seules 9 % des entreprises n’en sont encore qu’au stade du projet de lancement d’un programme RSE et une toute petite minorité (6 %) affirme ne pas être concernée par la RSE.

À noter que la moitié des entreprises interrogées pense que la RSE va prendre de l’importance à l’avenir et 41 % estiment même qu’elle va devenir un enjeu essentiel.

Un programme de pilotage et d’action

Autre grand enseignement de l’enquête, la RSE est inscrite au cœur des stratégies de croissance des entreprises qui se mettent en ordre de bataille en procédant de façon méthodique. Une très grande majorité des PME et ETI interrogées (90 %) a ainsi désigné, ou est en passe de le faire, un responsable ou un référent RSE en interne (une démarche effective pour 75 % des entreprises, en cours pour 9 % et envisagée dans les 12 mois pour 6 %). Par ailleurs, 77 % des entreprises ont mis en place un comité de pilotage RSE et plus de la moitié d’entre elles (57 %) ont formalisé leurs enjeux prioritaires en matière de RSE, défini un programme RSE et un plan d’actions, mis en place des indicateurs de suivi de la démarche.

Signe que la RSE est perçue comme stratégique, sa responsabilité est confiée dans 28 % des cas à une direction spécifique et à défaut, dans 21 % des cas, assumée par la direction générale.

Un engagement environnemental centré sur les déchets et l’empreinte carbone

Les entreprises engagées sur la voie de la RSE déclinent leur stratégie environnementale principalement avec le tri et la gestion des déchets (98 % des réponses) puis avec la réalisation d’un bilan carbone (87 % des cas). Celles qui sont plus anciennes dans la démarche sont aussi plus nombreuses à privilégier cet item.

Viennent ensuite, par ordre d’importance, la réduction de la consommation d’eau, d’énergie et de matières premières ; la réduction des gaz à effet de serre ; la promotion de la mobilité durable pour les salariés.

Un ancrage territorial responsable

L’engagement sociétal des entreprises sur le front de la RSE s’illustre principalement par leur volonté de renforcer leur lien avec les autres entreprises locales (pour plus de 90 % d’entre elles) et de mettre en place une démarche d’achats responsables couplée à la réalisation d’enquêtes menées auprès des fournisseurs. Autres engagements plus minoritaires, les actions de mécénat (dons à des associations d’intérêt général), et diverses actions comme les partenariats avec des établissements d’enseignements, la mise en place d’enquêtes auprès des clients, l’existence d’un code d’éthique et d’indicateurs pour mesurer l’impact sociétal de l’entreprise.

Quand le "S" de RSE renvoie à la seule dimension sociale de l’entreprise, c’est en très grande majorité sur la formation des salariés que se focalisent les actions à mener (à 94 %) devant le déploiement d’un programme de santé et sécurité au travail et la mesure du bien-être des collaborateurs. Des items comme l’existence de programmes pour lutter contre les discriminations, pour mesurer l’impact social de l’entreprise ou pour concilier vie professionnelle et personnelle sont bien moins cités.

Embarquer ses collaborateurs est indispensable

Tant il est vrai que la réussite d’une stratégie RSE repose d’abord et avant tout sur la capacité de l’entreprise à embarquer ses collaborateurs, les entreprises qui ont répondu à l’enquête ont conscience qu’il faut en priorité valoriser ses engagements RSE auprès des salariés. Les clients, partenaires institutionnels et fournisseurs ne venant qu’ensuite.

Cette communication doit servir à donner du sens à l’entreprise, mais aussi à recruter plus facilement en travaillant sa marque employeur. Les arrière-pensées commerciales ne sont pas pour autant totalement absentes de la démarche, notamment par la volonté citée par les entreprises interrogées de se différencier des concurrents. En revanche, elles sont peu nombreuses (10 %) à considérer la démarche RSE comme un levier pour attirer les investisseurs alors même que le renforcement de la régulation européenne devrait à terme servir cette ambition.

Faire reconnaître son engagement

Enfin, il est notable que les entreprises qui ont répondu à l’enquête accordent une très grande importance à la labellisation de leur démarche RSE, revendiquée par 70 % d’entre elles (27 % sont déjà labellisés, 9 % sont en cours de labellisation et 34 % ont le projet de s’engager dans cette démarche).

Dès lors, les entreprises choisissent entre des labels généralistes (applicables à tous types d’organisation), des labels thématiques (traitant une composante RSE) ou des labels sectoriels (spécifiques à un secteur d’activité), voire géographiques (liés à un territoire).

On le voit, la prévalence de la RSE dans le discours dominant trouve désormais écho dans les actes des entreprises qui s’affirment comme des rouages indispensables de ce changement. C’est grâce à elles que cette révolution est désormais en marche sur le plan environnemental aussi bien que sociétal avec l’ambition de construire un nouveau monde.

>> Retrouvez les résultats du baromètre RSE 2023, réalisé par Le Journal des Entreprises, associé à Gulfstream Group, Praxis et Qualinove.

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