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Dourdin accélère sur les "Smart Surfaces"
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Dourdin accélère sur les "Smart Surfaces"

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Malgré le contexte de crise, l’équipementier automobile Dourdin lance un plan d’investissement pour diversifier ses activités et entretenir son avance technologique sur ses concurrents.

Dourdin produit, entre autres éléments pour l’automobile, des films décoratifs pour les carrosseries. L’ETI investit pour prendre de l’avance sur les tendances et les technologies à venir — Photo : Dourdin

Le design de la voiture de demain sera-t-il épuré ? Adieu les tableaux de bord surchargés de boutons et de commandes, la tendance sera celle du lisse. Un effleurement de doigt sur le plafond de l’habitacle suffira à allumer la veilleuse. Une pression sur l’accoudoir et apparaîtront, à travers l’habillage, les boutons de commande des fenêtres. Une caresse sur le tableau de bord, et tout un réseau de leds, décoratives ou utilitaires, s’illuminera d’un coup.

Ces technologies émergentes, l’industrie automobile les appelle les "smart surfaces", les surfaces intelligentes. Encore à leurs balbutiements, elles devraient très prochainement équiper nos véhicules, jusqu’à devenir la nouvelle norme. Elles sont en tout cas au cœur du plan de développement de l'entreprise nordiste Dourdin (64 M€ de CA 2020, 800 salariés), qui s’apprête à investir 2,5 millions d'euros pour prendre une avance stratégique sur ces sujets.

"Les boutons vont disparaître, à nous de nous adapter. Dourdin a toujours cherché à se renouveler, et à innover. Aujourd’hui, il nous paraît indispensable de ne pas rater ce nouveau tournant, et de s’inscrire dans la durée de l’innovation. C’est le cœur de notre plan Pass 4.0, pour Plan d’accélération des Smart Surfaces ", résume Marc Dourdin, le DG de Dourdin. L’entreprise familiale, basée à Saint-André-lez-Lille, fabrique nombre d’éléments en plastique ou métal pour l’automobile. 38 % des quelque mille références produites chaque année par l’équipementier sont destinées à l’intérieur du véhicule, et pour la plupart, au tableau de bord et ses alentours : boutons, poignées, filets chromés. Les 62 % restants sont des pièces situées à l’extérieur de la voiture, poignées de portières, encadrements, logos, calandres, etc.

Un plan sur trois ans

"Nous sommes équipementiers de rang 1 et 2, c’est-à-dire que nous fabriquons des éléments qui seront directement posés par le constructeur, sur ses lignes. Mais aussi, des produits, comme les parties de consoles centrales, qui vont être complétées et assemblées chez un autre sous-traitant avant d’être livrées au constructeur, " détaille Marc Dourdin.

Imprimerie fondée en 1958, Dourdin a vite évolué vers l’automobile, en mettant au point les premiers films décoratifs pour les carrosseries. Aujourd’hui, Dourdin travaille avec la plupart des grands constructeurs automobiles, pour qui l'entreprise met au point, grâce à son bureau de design et son laboratoire, des décors et finitions innovants et exclusifs. "Nous mettons déjà en œuvre au quotidien différentes techniques, l’injection plastique, le chromage, le travail du métal, le thermoformage ou la fabrication de films décor. Le développement des Smart Surfaces va nous demander d’accélérer sur de nouvelles technologies, comme l’implantation de circuits intégrés et de microprocesseurs, au sein de nos produits."

Rendus "intelligents", les éléments fabriqués par Dourdin pourront obéir au doigt et à l’œil aux conducteurs. Une petite révolution qui ne se fera pas en un jour. Le plan d’investissement, calibré sur 36 mois, prévoit à la fois de la R & D, la mise au point de nouveaux process et l’achat de machines. "Nous avons déjà avancé sur certains sujets, et abouti à des prototypes concluants. Sur les trois prochaines années, il s’agit de développer de nouveaux procédés et produits, et de mettre en œuvre leur industrialisation. Cela passe par la modernisation de notre usine de Saint-André, et le développement de notre équipe, sur la partie R & D comme sur le commercial." Ce plan de développement prévoit la création de 16 nouveaux postes dans un premier temps, et d’une quarantaine à terme, sur le site nordiste du groupe, où travaillent environ 70 personnes.

Vers les 100 millions d’euros de chiffre d’affaires

Dourdin donne un coup d’accélérateur à un moment où le marché, sonné, cherche encore ses marques après l’année 2020. Grâce à cette stratégie d’innovation, Dourdin espère prendre une longueur d’avance sur ses concurrents. En attendant, elle lui vaut le soutien de l’État, qui lui accorde 1,2 million d'euros de subvention dans le cadre du plan de relance. Un coup de pouce bienvenu. "Nous avons plusieurs filiales à l’étranger, qui sont régulièrement subventionnées de manière substantielle par les États concernés. En France, c’est toujours très compliqué d’obtenir des aides, d’ailleurs c’est la première fois que cela nous arrive. On a déjà reçu un premier chèque de 300 000 €, ça surprend un peu, mais ça fait toujours plaisir," s’amuse Marc Dourdin.

Au travers de ce plan d’investissement, Dourdin compte bien rebondir après une année 2020 compliquée. "Nous sommes passés de 86 M€ de chiffre d'affaires en 2019, à 64 M€ en 2020. Mais nous avons pu mesurer à quel point notre stratégie de diversification, tant commerciale que géographique, nous a permis d’amortir la crise. Nous avons fait -34 % sur la France, mais -26 % au niveau groupe. Certains marchés ont continué à tourner quand d’autres étaient à l’arrêt. Et comme nous travaillons sur un très grand nombre de véhicules différents, nous avons pu bénéficier du succès qu’ont rencontré certains modèles cette année, malgré tout."

En dépit du contexte d’incertitude, renforcé encore par les problèmes récurrents d’approvisionnement qui touchent tout le secteur depuis l’année dernière, Dourdin maintient sa feuille de route. L'entreprise compte atteindre les 100 millions d'euros de chiffre d'affaires l’année prochaine, via une croissance organique mais aussi, externe. "Il n’est bien sûr pas facile de se projeter, mais chacun de nos pays a des projets intéressants. Il est malgré tout certain que nous ne retrouverons pas les volumes de 2019 avant plusieurs années," regrette Marc Dourdin.

Un pied en Allemagne

Dans ce projet de développement, Dourdin pourra s’appuyer sur l’acquisition, encore en cours, d’une usine en Allemagne. Il lui a fallu deux ans de prospection pour trouver la perle rare. Un équipementier de rang II, employant 130 personnes, et réalisant entre 13 et 15 M€ de chiffre d’affaires. C’est la première implantation outre-Rhin du fabricant, qui compte déjà un bureau commercial en Italie, et plusieurs sites industriels au Portugal, en Roumanie, et en Turquie. "Nous avons l’habitude de suivre certains de nos clients à l’étranger, et de nous installer à proximité de leurs usines. C’est à chaque fois un pari, qui fonctionne, ou pas. Suivre Renault en Roumanie pour participer à la fabrication de la Dacia, c’était un succès. En revanche, nous avons revendu début 2020 notre usine chinoise, qui n’a jamais décollé", retrace Marc Dourdin. Mettre le pied sur le sol allemand est loin d’être anodin pour l’équipementier, qui espère s’ouvrir les portes des grands constructeurs nationaux. "Le marché allemand est assez fermé, ils ne travaillent qu’entre eux. Nous travaillons avec à peu près tous les constructeurs européens, de Renault à Ferrari, mais pas encore avec les Allemands. Avec cette nouvelle filiale, qui travaille notamment pour BMW, nous pouvons désormais nous faire une clientèle sur place. C’est vraiment une entreprise intéressante pour nous, d’un point de vue stratégique comme technologique. Ils ont des savoir-faire et des machines qui vont nous intéresser grandement dans le cadre de notre plan Pass 4.0. Les synergies promettent d’être nombreuses, " se félicite Marc Dourdin.

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