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Brodard & Taupin se lance dans l'impression des mangas
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Brodard & Taupin se lance dans l'impression des mangas

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Sur un marché français très porteur, l’imprimerie sarthoise Brodard & Taupin se dote d’une nouvelle machine et va entamer au cours de ce premier trimestre l’impression de mangas. Un produit jusqu’ici essentiellement imprimé en Italie pour les lecteurs hexagonaux.

Chaque année sortent de l'imprimerie Brodard & Taupin environ 35 million de livres en format poche ou en grand format — Photo : Brodard & Taupin

Après le Japon, la France est le second pays lecteur de mangas. Sur le marché français, ces livres illustrés d’origine japonaise proviennent pour la plupart d’Italie et sont peu fabriqués par des imprimeurs français. À La Flèche, l’imprimerie Brodard & Taupin, filiale du groupe français CPI, basé à Boulogne-Billancourt et qui compte une quinzaine de sites en Europe dont trois en France (Brodard & Taupin, Firmin-Didot dans l’Eure et Bussière dans le Cher), investit et se lance sur ce marché. "Il est très actif et encore en croissance, témoigne Virginie Hamm-Boulard, directrice générale de Brodard & Taupin. Nous y avions déjà réfléchi avant la crise sanitaire, à la fois pour nous diversifier et garantir les emplois, et nous avons lancé ce projet début 2021."

Après avoir perdu sa seconde place sur le podium des lecteurs de mangas au profit des États-Unis, la France l’a en effet regagnée en 2021, avec 29 millions d’exemplaires vendus, contre 22 millions l’année précédente. Et surtout, pour la première fois, les ventes de mangas ont dépassé l’an dernier dans l’hexagone celles des BD traditionnelles. L’engouement est croissant, accentué par celui pour les séries animées dont ils sont issus et diffusés sur les plateformes de streaming. Le Pass Culture, étendu aux jeunes de 15 à 17 ans en 2021 et qui leur offre la possibilité d’acheter des biens culturels, a lui aussi accentué la tendance. En juin dernier, 70 % des livres achetés avec le Pass étaient des mangas…

35 millions de livres imprimés par an

À La Flèche, l’entreprise Brodard & Taupin emploie actuellement 115 personnes, dont 80 en production.

Entrée dans le groupe CPI en 1991, Virginie Hamm-Boulard dirige Brodard & Taupin depuis le 1er janvier 2019 — Photo : Olivier Hamard

Elle imprime environ 35 millions de livres chaque année, dont 25 millions en format poche avec une rotative offset et 10 millions d’ouvrages de littérature générale en grand format en typographie avec une presse, pour le compte de grands éditeurs français. Le dernier roman de Pierre Lemaître, des ouvrages de Marc Lévy, plusieurs volumes de la saga des Harry Potter ou Une terre promise, premier tome des mémoires de Barak Obama, sont entre beaucoup d’autres sortis des rotatives de Brodard & Taupin. "Nous sommes spécialisés dans les moyens et longs tirages, complète Virginie Hamm-Boulard, pouvant aller de 3 000 à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires. Nos clients nous confient des fichiers prêts à imprimer et nous réalisons l’impression de tous les éléments du livre, l’assemblage et le brochage. Entre la réception de la commande et la livraison, il faut compter environ 5 jours, voire une dizaine ou une quinzaine de jours selon les tirages, mais cela peut parfois descendre à 48 heures ou même 24 heures. Le marché de l’édition surfe en effet beaucoup sur l’actualité. En moyenne, un livre est imprimé trois semaines avant sa parution dans les rayons."

20 % des capacités de productionpour les commandes inattendues

Brodard & Taupin travaille donc à la commande, avec un volume à peu près garanti chaque année, le marché du livre en France continuant à se porter honorablement, comparativement à d’autres pays européens. L’entreprise de La Flèche a face à elle quelques concurrents français, mais aussi italiens et espagnols, mais pour les éditeurs, le nom de l’imprimeur a toujours une importance, comme un label de qualité. Les départs de livres de l’imprimerie de La Flèche sont quasi-quotidiens, tout comme la réception de papier. La mission de l’entreprise, dont les machines fonctionnent 24 heures sur 24 du lundi au vendredi, s’achève à la livraison en centres logistiques des livres imprimés, qui seront ensuite distribués dans les points de vente. Dans ce secteur mouvant au gré de l’actualité et des rééditions, Brodard & Taupin réserve en permanence au moins 20 % de ses capacités de production pour parer aux éventuelles commandes inattendues.

900 000 euros d’investissement

La spécialité de l’entreprise sarthoise, née en 1923 par l’association de l’imprimeur Brodard et du relieur Taupin, avant d’être intégrée au groupe Hachette puis cédée en 1998 au groupe CPI, est l’impression exclusive de livres dits "noirs", sans ou avec peu d’images. L’entrée sur le marché du manga, toujours en plein essor en France, va donc être pour l’imprimeur fléchois une réelle nouveauté. L’entreprise a dû s’équiper, les outils dont elle disposait jusqu’ici ne permettant pas l’impression d’ouvrages illustrés, plus chargés en encre. "Il nous fallait une machine réellement adaptée à ce type d’impression, précise Virginie Hamm-Boulard. Nous sommes allés en chercher une de marque anglaise aux Pays-Bas, qui était utilisée pour l’impression de bibles. Elle a été entièrement refaite à neuf et reconditionnée par une entreprise italienne."

L’investissement s’élève à 900 000 euros, soutenu par France Relance à hauteur de 150 000 euros. "Un équipement neuf nous aurait coûté environ 4 millions d’euros", indique Virginie Hamm-Boulard.

L'imprimerie sarthoise lancera au printemps l'impression de mangas, et envisage d'en produire environ 10 millions d'exemplaires par an — Photo : Brodard & Taupin

L’entreprise sarthoise n’a pas eu besoin d’agrandir ses locaux, qu’elle a réorganisés pour accueillir cette nouvelle machine dédiée à l’impression des mangas. L’assemblage et le brochage des livres seront effectués sur une ligne déjà existante, qui fonctionne actuellement en 2X8. La production, pour laquelle Brodard & Taupin a déjà enregistré des commandes, devrait débuter en mars, avec l’objectif d’ici quelques années d’atteindre 10 millions de livres imprimés par an. "Nous formons actuellement du personnel pour ce type d’impression, ajoute Virginie Hamm-Boulard, et nous allons aussi recruter quatre à cinq personnes."

Pour l’imprimeur sarthois, s’ouvrir le marché du manga offre la possibilité de " pouvoir augmenter notre chiffre d’affaires avec des frais fixes à peu près identiques ", comme l’indique sa directrice générale. Brodard & Taupin, qui réalise chaque année un chiffre d’affaires autour de 12 millions d’euros, pourrait voir ainsi son activité augmenter, et optimiser encore son outil industriel. L’entreprise est en effet organisée pour faire face à des pics d’activité, avec des mois forts en mars et avril comme en septembre et octobre, et des mois où le rythme est moins soutenu tels novembre et juillet, où la production peut être ralentie de 40 à 50 %. Avec un matériel qui s’inscrit dans la longévité : les machines d’impression, tant en offset ou en typographie, si elles représentent d’importants investissements, peuvent fonctionner plusieurs dizaines d’années. C’est donc dans des outils périphériques que l’entreprise réalise habituellement des investissements, comme récemment dans des robots de palettisation.

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