Comme aime à le répéter le président d'Unither, Eric Goupil : "Associer une seule dose de vaccin et une aiguille, c’est une idée vieille comme le monde, mais cela implique des difficultés techniques". Le projet est né en 2019, quand le dirigeant rencontre la société américaine Apiject. Ils échangent sur la création d’une seule dose de vaccin dans un contenant en polyéthylène, avec une seringue prête à l’emploi. Un produit à bas coût, qui permettrait notamment une large vaccination dans les pays dits à faibles revenus. "Ils auraient été les concepteurs, et nous, les fabricants". Unither étant leader mondial dans les unidoses stériles à technologie BFS, Blow, Fill, Seal (collyre, sérum physiologique, produits pour l’asthme en doses unitaires), l’union sur le papier était intéressante. Mais c’était sans compter sur la crise Covid, qui a provoqué un repli sur les marchés intérieurs. "Nous ne voulions pas être sous licence américaine, mais plutôt créer une licence pour le marché français, pour être souverain", ajoute Eric Goupil. La crise sanitaire ayant mis en lumière l’importance de renforcer l’industrie pharmaceutique en France, le projet d’Unither a vite trouvé une légitimité, et un soutien des pouvoirs publics.
1 milliard de doses par an
Depuis quelques semaines, les travaux pour le projet Euroject, sur le site d’Unither (14 000 m² et 380 salariés) dans la zone industrielle nord d’Amiens, ont démarré. L’extension de 6 000 m² sera achevée en mars 2024, avec une mise en service de trois lignes de production en 2025, qui nécessitera 120 salariés supplémentaires. "Nous aurons la capacité d’aller jusqu’à cinq lignes de production, et un objectif d’un milliard de doses par an, avec un coût de production faible, quasi identique à celui des multidoses". L’investissement pour ce projet s’élève à 95 millions d’euros, dont 34,8 millions financés par l’État. Le reste provient de fonds propres de l’entreprise.
Il aura fallu deux années de R & D pour développer cette unidose stérile avec une aiguille pouvant s’y connecter. Il ne faut pas qu’il y ait d’altération du vaccin, pas de fuite, pas d’interaction entre le contenu et le contenant, "les tests sont quasiment terminés, nous avons encore quelques mises au point, mais nous sommes confiants". L’objectif maintenant est de convaincre les fabricants de vaccin. "L’avantage de la pandémie, c’est qu’aujourd’hui il n’y a plus quatre grands acteurs, mais une bonne dizaine. Mais comme toute idée innovante, il faut convaincre, précise le président. Nous avons déjà quelques contacts avec certains, qui ont un intérêt de principe fort, il faut maintenant qu’ils sautent le pas".
Croissance de 10 % dans les 5 ans
Cette nouvelle activité est donc une prise de risque pour Unither, mais les reins de l’entreprise sont solides. Avec huit sites industriels en France, et dans le monde, Chine, Brésil et États-Unis, le sous-traitant pharmaceutique pèse 450 millions de chiffre d’affaires. "Avec une croissance de 10 % dans les cinq prochaines années", ajoute Eric Goupil. Une croissance portée par le marché de l’ophtalmologie, qui représente aujourd’hui 40 % de son chiffre d'affaires. "La population vieillit, la tendance est portée par le "sans conservateur", et enfin, les produits innovants, contre la presbytie ou des traitements de prévention de la myopie chez les jeunes enfants se développent à grande vitesse".
