Les CCI ont-elles encore un avenir ?
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Les CCI ont-elles encore un avenir ?

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Réduction drastique des budgets, redéploiement géographique du réseau, prérogatives concurrencées par les collectivités... Les élections consulaires qui s'annoncent sont placées sous le signe de la crise. Dans ce contexte, quel est l'avenir des CCI ? Éléments de réponse.

— Photo : Le Journal des Entreprises

Deux millions de chefs d'entreprise sont appelés à voter pour renouveler leurs représentants aux chambres de commerce et d'industrie (CCI) du 20 octobre au 2 novembre prochain. Ces élections viennent clore l'une des mandatures les plus chahutées qu'aient connues les chambres consulaires. Ces établissements publics gérés par des chefs d'entreprise mais placés sous la houlette de l'État, sont attaqués ces dernières années sur plusieurs fronts. « C'est vrai qu'il y a un peu le feu à la maison avec la baisse de nos ressources fiscales, un positionnement pas toujours reconnu par les collectivités, une image à redorer et les attentes des chefs d'entreprise en pleine évolution », constate Jean Vaylet, président de la CCI de Grenoble.

Crise budgétaire

La crise est d'abord budgétaire. Depuis 2012, l'État a réduit de plus d'un tiers les ressources fiscales affectées aux CCI, procédant de surcroît à un prélèvement exceptionnel sur leurs fonds de roulement en 2014 et 2015. Et le projet de loi de Finances pour 2017 prévoit une nouvelle baisse de 6,7%. « Une catastrophe budgétaire jamais connue par aucun opérateur, avec à la clé des investissements et des effectifs revus à la baisse », commente André Marcon, président de CCI France. En plein redéploiement géographique de leur réseau, les CCI sont également en concurrence avec les collectivités locales, et notamment les conseils régionaux, sur certaines de leurs missions, et non des moindres. La loi NOTRe (nouvelle organisation territoriale de la République) confie ainsi aux Régions le soin d'élaborer un schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII). Ces coups de boutoir portés aux chambres sont révélateurs d'une remise en cause, quoiqu'à mots couverts, du rôle des CCI par les élus et même par certains chefs d'entreprise.

Proximité et jeu collectif

S'ils reconnaissent une part de responsabilité dans cet état des lieux, les présidents de CCI croient dur comme fer en l'utilité de leur institution. « Nous n'avons pas suffisamment su vendre à nos politiques l'importance du rôle des chambres. Maintenant, il faut sortir de la posture où nous sommes focalisés sur nos problèmes pour remplir notre mission : accompagner les entreprises. Nous devons également montrer aux élus locaux la valeur ajoutée que nous pouvons leur apporter dans le développement économique des territoires », analyse Pierre Goguet, président de la CCI de Bordeaux.

Pour faire la preuve de la pertinence de leur institution, les élus de la prochaine mandature auront plusieurs défis à relever. Le premier est celui de la proximité. « Nous devons mettre en place une organisation et une gouvernance favorisant une proximité étroite avec les chefs d'entreprise, pour être à l'écoute de leurs besoins et de leurs attentes », indique ainsi Jean Vaylet. Les CCI devront également apprendre à jouer plus collectif. « Il faut le faire entre CCI mais aussi avec les collectivités et les organisations professionnelles et pas seulement quand nous sommes chef de file », insiste André Marcon. Un autre grand chantier, démarré sous l'actuelle mandature et qui devra être finalisé, est celui de la digitalisation.

Digitalisation

« Nous disposons d'une énorme masse d'informations qualifiées émanant du terrain, il s'agit de la traiter et de la faire remonter en valeur ajoutée, sous forme d'opportunités d'affaires... », explique André Marcon. Autre utilité de la digitalisation des chambres : « Dans un contexte de réduction de nos ressources, les questions courantes pourront être réglées sur la plate-forme digitale. Tandis que nos équipes répondront aux problématiques plus complexes. Cela suppose une montée en compétences de nos personnels », témoigne pour sa part Pierre Goguet, président de la CCI de Bordeaux. D'une manière générale, l'enjeu est de préparer les entreprises aux mutations économiques de demain. La CCI de Nantes Saint-Nazaire planche ainsi depuis plusieurs années sur la Troisième Révolution Industrielle et Agricole (TRIA). Son président, Jean-François Gendron explique : « Avec la TRIA, nous voulons faire émerger des entreprises dans des secteurs d'avenir comme le stockage de l'énergie, les réseaux intelligents, l'éco-mobilité ou l'agriculture écologiquement intensive ». En tout état de cause, tous ces chantiers ne pourront être menés à bien que grâce à l'engagement des chefs d'entreprise. Tous les candidats à la prochaine mandature encouragent aujourd'hui leurs pairs à aller voter. Ne serait-ce que pour asseoir la légitimité des représentants du monde économique face aux politiques. Pourtant, les chefs d'entreprises ne se précipitent généralement pas aux urnes. Lors des dernières élections en 2010, seuls 17 % d'entre eux avaient voté.

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