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Le tour de force de la Manufacture Française du Cycle
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Le tour de force de la Manufacture Française du Cycle

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Se revendiquant « première usine de vélos de France », la Manufacture Française du Cycle, installée à Machecoul, en Loire-Atlantique, est repartie sur un rythme effréné après des semaines d’arrêt dues au confinement. Un obstacle sur sa route : les difficultés d’approvisionnement de pièces.

2 200 vélos sont fabriqués chaque jour dans l'usine de la Manufacture Française du Cycle à Machecoul. — Photo : MFC

Que de chemin parcouru par la Manufacture Française du Cycle (MFC) depuis 2012. À l’époque, l’entreprise née à Machecoul (Loire-Atlantique) en 1925 est à plat et dépose le bilan. Rachetée début 2013 à la barre du tribunal de commerce par la coopérative de commerçants Intersport, elle est regonflée à bloc et revendique aujourd’hui être le numéro un français de la production de vélos. «Et même de loin, se félicite son directeur général David Jamin. 75 % des cycles vendus en France sont importés. Sur les 25 % restants, nous en fabriquons à peu près les deux tiers. »

La Manufacture française du cycle à Machecoul — Photo : MFC

Et voici l’entreprise aux 500 salariés et 125 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019 dans la forme d’un maillot jaune dopé par la période post-confinement. De 130 000 vélos assemblés par an lors de la reprise par Intersport, le compteur affiche pour 2019 le chiffre de 450 000. Actuellement, 2 200 sont fabriqués chaque jour. Et ce nombre pourrait être franchi aussi facilement que le maillot à pois du Tour passe un col de troisième catégorie. Mais le marché du vélo en pleine ascension étant mondial, les fournisseurs de pièces peinent à suivre. Ce qui freine MFC dans son élan.

Des composants recherchés en premier lieu en France

Dans ce berceau de la mythique marque Gitane, la raison d’être est « de concevoir, fabriquer et vendre des cycles français de qualité », résume David Jamin. La conception passe par le service R & D, qui représente une trentaine de salariés. Par fabrication, comprendre assemblage et peinture, sachant que près de 90 % des vélos produits sont aussi peints sur place. David Jamin emprunte à l’image culinaire pour mieux faire comprendre le savoir-faire de MFC. « Nous mettons les ingrédients qui vont bien ensemble pour fabriquer nos vélos, c’est-à-dire que nous achetons des composants spécifiques, un peu comme si le cuisinier se faisait faire un produit qui n’existait pas ailleurs. » Ces composants, ou pièces des deux-roues, sont achetés en priorité en France, puis, « si ce n’est pas possible », en Europe, et enfin en Asie, en dernier lieu.

La Manufacture française du cycle à Machecoul — Photo : MFC

Ces importations sont aujourd’hui un vrai casse-tête pour l’entreprise. Le contrecoup du Covid étant planétaire, « les équipementiers collectent en ce moment les demandes d’entreprises de beaucoup de pays et ont du mal à suivre. Il y a des choses que l’on peut faire sans eux, d’autres non, nous sommes donc en grosse difficulté d’approvisionnement, les délais s’allongent. » Et David Jamin de poursuivre : « Si on pouvait produire plus, on vendrait plus, car nous avons la capacité d’augmenter la production, mais nous sommes bloqués ». L’entreprise recherche du reste des solutions de relocalisation de composants.

Bénéficiant de l’essor de la pratique du vélo et pour suivre la cadence, MFC fait actuellement appel à des intérimaires pour grossir ses rangs : ils sont aujourd'hui 550 salariés à travailler à la Manufacture. Ce développement du deux-roues résulte de plusieurs facteurs. Déjà, les pouvoirs publics et les collectivités locales incitent tout un chacun à enfourcher un deux-roues et faire travailler ses mollets (aménagement de pistes cyclables urbaines comme à Nantes ou à la Roche-sur-Yon, aide de 50 euros de l’État pour les réparations…). Puis, « le vélo est amené à se développer, pense David Jamin, sa pratique est bonne pour la santé, pour l’environnement, pour le portefeuille… ». Si la France n’en est pas au stade des Pays-Bas par exemple, « le Covid a été un déclencheur et nous a fait gagner du temps dans la culture vélo. »

La Manufacture française du cycle à Machecoul — Photo : MFC

Une usine contrainte de fermer plusieurs semaines

Le Covid déclencheur, certes, mais qui a bien failli faire dérailler l’entreprise. « Nous vendons principalement en France et 90 à 95 % de nos ventes sont faites à travers des magasins physiques. Mi-mars, avec le confinement, nos sources de distribution étaient fermées », se souvient le directeur général. Or, mars-avril sont des mois essentiels pour la vente de cycles, les beaux jours s’annonçant. « Tous les stocks en magasin étaient pleins, nos entrepôts également. Et je n’allais pas mettre en danger la santé des 500 salariés. Le lundi 16 mars, à 20 heures, je fermais l’usine. »

La production reprendra tout doucement fin avril. Le 11 mai, les magasins rouvrent. « Dès le début, les ventes sont fortes. Le premier samedi, jour important pour le commerce, aussi. La deuxième, puis la troisième semaine, c’est la même chose. » L’effet rebond. « Entre fin mai et fin juin, on s’y est remis à fond. » La cadence n’a pas ralenti depuis. « Mais il nous sera impossible de rattraper les deux mois et demi d’arrêt de production ». Conséquence directe, le chiffre d’affaires de 125 millions d’euros de 2019 ne sera pas atteint en 2020, même si « l’usine est rentable », précise David Jamin.

Un chiffre d’affaires dont une large part (le PDG ne précisera pas laquelle) provient du principal client et par ailleurs actionnaire, Intersport. La Manufacture Française du Cycle produit l’intégralité de la marque distributeur de l’enseigne, la gamme Nakamura. « Intersport souhaite continuer à prendre des parts de marché sur le vélo, si cela se confirme, il nous faudra moderniser nos outils. »

Le deuxième pilier de développement de MFC se matérialise par des ventes via le circuit de distribution des magasins de cycles. « En 2014, nous avons racheté la marque française Sunn et nous l’avons relancée. Nous ne sommes pas encore un gros acteur sur ce marché, mais notre ambition est de monter sur le podium des grandes marques françaises. »

Photo : Cyril Raineau - Le Journal des Entreprises

Leader français du vélo à assistance électrique

La vente de pièces et d’accessoires, « nous sommes grossistes de 4 000 à 5 000 composants », représente environ un peu moins de 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. Enfin, MFC souhaite mettre l’accélérateur sur le vélo à assistance électrique (environ 100 000 des 450 000 vélos produits à Machecoul). Leader français sur ce secteur, MFC ne veut pas décrocher, recherchant à améliorer les performances de ses cycles : meilleur équilibre des poids, autonomie plus importante des batteries…

Si le vélo électrique est une tendance depuis plusieurs années, une autre émerge, le vélo connecté. Un exemple : avec une interface mobile, il est possible d’empêcher le démarrage d’une batterie, évitant ainsi le vol. Dans ce domaine, comme le résume David Jamin, « plein de choses sont à imaginer. » Même la tête dans le guidon pour répondre à la demande, MFC n’a donc pas fini de tracer sa route.

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