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Autoroute A831 : Les raisons d'un blocage à la française
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Autoroute A831 : Les raisons d'un blocage à la française

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Malgré les promesses de l'État et le soutien de presque tous les élus et des chefs d'entreprise locaux, le projet d'autoroute A831 entre Fontenay-le-Comte à Rochefort en Charente-Maritime, pourrait être enterré mi-juillet. Explications.
— Photo : Le Journal des Entreprises

Le compte à rebours a débuté. Mi-juillet, la déclaration d'utilité publique (DUP) accordée au projet d'autoroute A831, cette portion de 64 km devant relier Fontenay-le-Comte à Rochefort en Charente-Maritime, arrivera à son terme. « Si la DUP n'est pas prorogée, il faudra recommencer les études. On repart pour dix ans de travail », craint Laurent Piha, dirigeant de SDEL, une filiale de Vinci, et président du club Entreprises du Pays de Fontenay. Le premier ministre, Manuel Valls, a récemment annoncé qu'il allait demander la prorogation, mais rien n'est encore acté. Depuis trois ans, le dossier A831 n'a pas avancé d'un iota. Petit flash-back : début 2012, l'État lance l'avis de candidatures destiné aux compagnies autoroutières. Plusieurs se voient retenues dont les filiales de Bouygues, Eiffage et Vinci. Depuis ? Le surplace. Dans la région, pourtant, élus de droite comme de gauche ainsi qu'une forte proportion de chefs d'entreprise soutiennent l'infrastructure. Parmi eux, les présidents des conseils régional et départemental, Jacques Auxiette (PS) et Bruno Retailleau (UMP) auquel a succédé Yves Auvinet (divers droite), Dominique Bussereau (UMP), député et à la tête du département de Charente Maritime ou encore le député et ancien maire de Fontenay Hugues Fourage (PS). Et point de zadistes en vue dans le marais Poitevin ! Depuis une vingtaine d'années, le projet revient sur la table. Alors, pourquoi un tel blocage ?




L'État refuse de payer

Parmi les derniers rebondissements, à l'été 2013, une commission parlementaire chargée de faire le tri dans les projets d'infrastructures, en vue de faire faire des économies au gouvernement, met un coup d'arrêt à l'A831. Ce dernier se voit classé parmi les projets « à engager au-delà de 2050 ». S'ensuivent alors des manifestations d'élus et chefs d'entreprise (voir ci-contre). Séance de rétropédalage du ministre délégué aux Transports de l'époque, Frédéric Cuvillier qui donne un feu vert, sous conditions : l'A831 ne doit rien coûter à l'État et l'insertion environnementale de l'autoroute doit être exemplaire. Les élus acceptent. En jeu pour eux, l'emploi à court et long terme - plusieurs milliers sur le chantier estime Laurent Piha - le désenclavement ou l'ambition de faire de Fontenay la base arrière du Port de La Rochelle, en termes logistiques.




« Les conditions remplies »

Tout est remis en cause au printemps 2014, date de l'arrivée de Ségolène Royal au ministère de l'Écologie. « Je ne donnerai pas le feu vert pour que soit transmis aux entreprises le dossier de consultation technique », déclare-t-elle en juillet de la même année au journal Sud Ouest. Avant d'être en partie recadrée par Manuel Valls, qui a ajouté de nouvelles conditions, notamment le chiffrage de la proposition alternative de la nouvelle ministre : le contournement routier de la ville de Marans... « Aujourd'hui toutes, les conditions ont été remplies : le chiffrage global va être effectué sans inclure d'aide de l'État, en intégrant le coût lié aux préconisations de la LPO (NDLR : 125 M€) et le chiffrage du projet de contournement de Marans a été fait en parallèle, assure le chef d'entreprise Laurent Piha, la seule petite zone d'ambiguïté concerne le rapport de la LPO qui devait être porté à la connaissance du public. Il n'est resté qu'à peine 24h sur la page du gouvernement lié à ce projet ». Dans un courrier du 27 février dernier adressé à Hugues Fourage, le premier ministre semblait pourtant lever les dernières ambiguïtés. « J'ai donné des instructions pour que cette information soit effectuée dans les plus brefs délais et pour qu'un nouvel appel à candidatures soit lancé auprès des entreprises. Cette procédure permettra d'engager la consultation des entreprises ainsi que de connaître le coût de cette opération », écrit Manuel Valls. La décision de réaliser, ou non, l'A831 sera alors prise.




« L'A831, c'est fini »

Interviewée dans les médias au printemps, la ministre de l'Écologie persiste pourtant : « Ça m'étonnerait beaucoup que l'autoroute dans le marais soit construite », puis ajoutera plus tard « L'A831, c'est fini ». Indiquant qu'elle ne voulait pas « laisser détruire le Marais poitevin ». Contactée par notre rédaction, la ministre n'a pas donné suite. Dans les Pays de la Loire, les élus écologistes s'opposent également au projet. Pour le vice-président du conseil régional Jean-Philippe Magnen (EELV), les compensations écologiques restent insuffisantes pour une emprise foncière de 5 millions de m² et la procédure de débat public n'a pas été totalement indépendante. Selon lui, la question écologie n'est pas la première aberration. « Je ne suis pas contre toutes les autoroutes, mais contre les autoroutes inutiles comme l'A831...» . Il fustige des retombées économiques discutables et son « coût exorbitant évalué à 870 millions d'euros, sachant qu'on gagnera moins d'un quart d'heure pour aller à La Rochelle, ça fait cher la minute ! ». Pour désenclaver le Sud Vendée, les Verts veulent développer les lignes ferroviaires vers Bordeaux et Niort, avec la remise en état des lignes, la réouverture des gares comme Velluire... Et bien sûr le contournement de Marans, pour lequel 15 millions ont été prévus dans le contrat de plan entre l'État et la Région Poitou-Charentes

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Querelles politiciennes ?

Dernier verrou : certains évoquent des querelles politiciennes entre Ségolène Royal et des élus comme les maires et députés de gauche Jean-François Fountaine et Olivier Falorni, ce dernier l'ayant battu aux dernières législatives de 2012. « Elle était déjà opposée à l'autoroute côté marais Poitevin il y a plus de 20 ans, car Mitterrand était contre. Et puis, à l'époque elle visait la mairie de Niort, où a fini par passer l'A83... », glisse le maire de Fontenay, Jean-Michel Lalère (UMP). L'édile envisage une action en justice contre la ministre de l'Écologie. Maintenant la pression, le département de la Vendée a, lui, placardé un message dans tous les abribus de Vendée : « A831 : Manuel Valls, que valent vos promesses ? ».

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