Ce que change la loi de finances 2022 pour les entreprises
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Ce que change la loi de finances 2022 pour les entreprises

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Aménagement des incitations fiscales à la transmission d'entreprise, instauration d'un nouveau régime d'amortissement d'un fonds de commerce… : la loi de finances pour 2022 comporte de nouvelles mesures fiscales et sociales qui s'appliquent aux entreprises. Tour d'horizon.

La loi de finances pour 2022 assouplit plusieurs dispositifs d'exonération des plus-values professionnelles réalisées lors de la cession d'une entreprise individuelle — Photo : Andrey Popov

Publiée au Journal officiel du 31 décembre 2021, la loi de finances pour 2022 apporte son lot de changements en matière de fiscalité pour les entreprises. Même si "globalement, les lois sont assez pauvres cette année avec peu de chamboulements, ce qui est lié au contexte sanitaire", note Miguel Hernandez, directeur technique du cabinet d'expertise comptable In Extenso.

Transmission d'entreprise individuelle favorisée

La loi de finances pour 2022 assouplit plusieurs dispositifs d'exonération des plus-values professionnelles réalisées lors de la cession d'une entreprise individuelle. Les plafonds d'exonération des plus-values ont été revus à la hausse, passant de 300 000 à 500 000 euros. Objectif affiché, correspondre davantage à la réalité économique de la valorisation des entreprises. Le système étant dégressif, avec une exonération partielle prévue jusqu'à un million d'euros, contre 500 000 euros auparavant. Autrement dit, une cession d'une valeur de 750 000 euros sera désormais exonérée à hauteur de 50% alors qu'elle ne l'était pas du tout auparavant. S'agissant des cessions des titres de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, l'abattement fixe de 500 000 euros sur les gains de la cession a été prorogé jusqu'à fin 2024. Et le délai pour céder les titres après avoir fait valoir ses droits à la retraite en 2019, 2020 ou 2021 a été porté de 2 à 3 ans.

Départ à la retraite facilité

Autre mesure directement liée à la crise sanitaire, l'allongement d'un an pour les chefs d'entreprise ayant fait valoir leurs droits à la retraite en 2019, 2020 ou 2021 pour pouvoir bénéficier du régime d'exonération de plus-values. Ainsi, un entrepreneur individuel peut bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu, au titre des plus-values de cession de son entreprise lorsqu'il a fait valoir ses droits à la retraite dans les trois ans précédant la cession, au lieu de deux ans dans le régime normal. "Une mesure qui s'adresse aux chefs d'entreprise qui ont fait valoir leur droit à la retraite pendant la crise, en 2019, 2020 ou 2021, et n'auraient pas trouvé de repreneur dans les deux ans qui leur étaient impartis", explique Miguel Hernandez. Attention, elle ne concerne que les PME au sens communautaire du terme.

Le dispositif d'exonération des plus-values professionnelles pour départ à la retraite et celui sur la transmission d'une entreprise individuelle sont applicables aux chefs d'entreprise dont l'activité est en location gérance. Si auparavant seules les cessions au locataire gérant permettaient de bénéficier de ces dispositifs, dorénavant les cessions à des tiers autres que le locataire gérant le permettent aussi.

Baisse du taux d'imposition

Le taux normal de l'impôt sur les sociétés (IS) passe à 25 % pour toutes les entreprises, quels que soit leur taille et leur chiffre d'affaires, en 2022. Depuis 2018, l'Etat a lancé une réforme pour améliorer la compétitivité des entreprises. La loi de finances 2022 ne remet pas en cause ce point. Les petites entreprises dont le chiffre d'affaires ne dépassent pas 10 millions d'euros bénéficient quant à elles, sous certaines conditions, d'un taux d'IS réduit à 15% dans la limite de 38 120 euros de bénéfices.

Exigibilité de la TVA sur acompte

A compter du 1er janvier 2023, la TVA deviendra exigible dès l'encaissement d'acomptes versés pour toute vente de biens, soit avant même leur livraison. "Les entreprises vont devoir anticiper ce décalage de TVA en termes de trésorerie et paramétrer leurs systèmes d'information", expose Miguel Hernandez. Le cabinet d'expertise-comptable a déjà reçu des doléances de certains secteurs particulièrement sensibles à ce changement car intervenant dans des activités faisant appel à de grands montants d'acomptes.

Allongement du délai d'option et de renonciation

Jusqu'à maintenant, le chef d'entreprise qui était en régime micro devait anticiper et opter au régime réel avant le 1er février de l'année pour laquelle s'il souhaitait changer de régime d'imposition. Il peut dorénavant opter pour ce régime au moment où il dépose sa déclaration fiscale au titre de l'exercice précédent, soit en mai ou juin de la même année. Il dispose ainsi d'un temps plus conséquent pour se décider. Objectif, lui permettre de mieux évaluer les conséquences fiscales de son choix. "L'ancien système était assez piégeant, reconnaît Miguel Hernandez. Le gouvernement affiche ainsi sa volonté de laisser les chefs d'entreprise agir en connaissance de cause. C'est plus sécurisant pour eux et pour les experts-comptables car ils disposent ainsi d'une meilleure visibilité de leurs résultats". Le chef d'entreprise a également la possibilité de renoncer à l'option prise de passer en régime réel jusqu'au dépôt de sa déclaration. Seule condition, être en deçà des seuils du régime micro.

Amortissement du fonds de commerce

Les chefs d'entreprise ont la possibilité à titre temporaire d'amortir fiscalement leurs fonds commerciaux acquis entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025. Cela leur permet de déduire fiscalement les amortissements comptabilisés. La cible, les entreprises qui amortissent comptablement leur fonds commercial, et parmi celles-ci, notamment celles qui ne dépassent pas deux des trois seuils retenus (effectif de moins de 50 salariés, 12 millions d'euros de chiffre d'affaires, 6 millions d'euros de total bilan) et qui optent pour une mesure de simplification consistant à amortir, sans aucune justification, le fonds commercial sur 10 ans. Objectif : encourager le rachat de fonds commerciaux qui ont perdu de la valeur avec la crise. "C'est un régime de faveur qui laisse quatre ans aux chefs d'entreprises pour bénéficier de cet avantage exceptionnel", commente Miguel Hernandez.

Allongement de la durée du statut de jeune entreprise innovante (JEI)

Le statut de JEI a été ouvert aux entreprises créées depuis moins de 11 ans et non plus aux seules ayant moins de 8 ans d'ancienneté. En revanche, cet allongement ne permettra à ces entreprises que de bénéficier de l'exonération fiscale totale prévue la première année où elles réalisent des bénéfices et de l'exonération partielle la deuxième année. Pas d'exonération de cotisations patronales d'assurances sociales et de taxes locales minorées pour elles au-delà des 7 premières années.

Réforme juridique du statut de l'entrepreneur individuel

Le plan indépendants se base entre autres sur la loi de finances 2022. Il prévoit qu'à partir de 2022, l'entrepreneur individuel verra de facto ses patrimoines personnel et professionnel séparés. Objectif : ne pas revenir sur les acquis en termes de protection du patrimoine privé initiée en 2003. L'idée étant de reprendre dans le régime de droit commun le régime de l'EIRL, qui lui est supprimé, sauf pour les chefs d'entreprise ayant déjà opté pour ce statut et qui souhaiteraient le conserver. Par ailleurs, des dispositifs juridiques de simplification d'apport ou de transformation de l'EI en société vont être créés. Précisant que "les textes risquent encore d'évoluer suite aux débats parlementaires", Miguel Hernandez relève quelques brèches créées par le législateur. Par exemple, "un créancier professionnel pourrait demander au chef d'entreprise de donner un gage sur ses biens personnel".

Évolution du statut de conjoint collaborateur

Le statut de conjoint collaborateur, qui était jusqu'alors réservé uniquement aux conjoints pacsés ou mariés, est dorénavant ouvert aux concubins depuis le 1er janvier 2022. En revanche, le plan indépendants prévoit de limiter ce statut à une durée de cinq ans. Objectif, réduire la situation de dépendance économique du conjoint à l'égard du chef d'entreprise.

Modulation des cotisations sociales

Les entrepreneurs individuels vont pouvoir moduler eux-mêmes leurs cotisations et contributions sociales au fil de l'eau selon l'état réel de leur activité. Objectif : faire correspondre au plus près les versements de cotisations sociales des indépendants avec le niveau réel de leur activité (et éviter des décalages de deux ans au risque de devoir payer des cotisations élevées sur une période où l'activité s'est réduite).

Retraite et formation des chefs d'entreprise

Les chefs d'entreprise des secteurs S1 et S1 bis (CHR, sport, événementiel…) qui n'auraient pas dégagé suffisamment de revenus verront leurs trimestres de retraite validés au regard d'une moyenne de revenus calculée à partir des trois derniers exercices.

Par ailleurs, les dirigeants de micro-entreprises verront leur crédit d'impôt formation doublé. Pour rappel, celui-ci est égal au produit du nombre d'heures de formation, plafonné à 40 heures, par le taux horaire du smic, soit donc deux fois le taux horaire du Smic pour les heures de formation effectuées à partir du 1er janvier 2022.

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