Xavier Bertrand : « Les Hauts-de-France étonneront à nouveau la France et le monde »

Xavier Bertrand : « Les Hauts-de-France étonneront à nouveau la France et le monde »

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Témoignage. Président du conseil régional depuis le 4 janvier, date à laquelle la nouvelle région n'avait ni nom ni logo, Xavier Bertrand revient sur ses ambitions pour les Hauts-de-France et surtout, sur la façon dont il compte les mettre en oeuvre.
— Photo : Le Journal des Entreprises

Vous avez fait du retour à l'emploi votre cheval de bataille. Pourriez-vous revenir sur les principales mesures que vous comptez mettre en place ?

Le travail, la création d'emplois sont au coeur de notre projet pour les Hauts-de-France, au coeur de la politique que nous mettons en oeuvre depuis janvier. La région soutient ceux qui travaillent, ceux qui veulent travailler et ceux qui donnent du travail, les entrepreneurs. Dès mon arrivée, j'ai souhaité mettre en place des mesures concrètes, comme Proch'Emploi, une plateforme qui permet de mettre en relation demandeurs et employeurs par bassin d'emploi. Déjà plus de 6.000 personnes ont été reçues en entretien, et cela continue. Nous utilisons le levier de la formation pour leur permettre de postuler sur des emplois disponibles près de chez eux, mais pour lesquels ils n'ont pas, ou pas exactement, les qualifications demandées. Nous avons ainsi été la première Région à signer avec l'État dans le cadre du plan « 500.000 formations », assurant ainsi 33.000 entrées en formation supplémentaires dans la Région, en complément des 55.000 déjà financées. Notre Région vient aussi de voter un grand plan pour l'apprentissage des jeunes, sans doute le plus ambitieux de France : triplement de la prime à l'apprentissage, et engagement de la Région de reprendre l'apprenti, en cas de rupture de contrat. Un plan qui vaut pour toute la durée du mandat. Les Hauts-de-France s'engagent également à aider les TPE et PME pour toute nouvelle création d'emploi d'un salarié à temps plein, en prenant en charge 25 % du montant des charges patronales, jusqu'à 1,6 SMIC. La Région aide les habitants dans leur quotidien, c'est l'idée de la prime Transports, directement destinée à ceux qui font plus de 30 km en voiture pour aller travailler. Près de 17.000 personnes ont déjà déposé un dossier pour bénéficier de cette aide de 240 euros par an.





En dehors du retour à l'emploi, quelles vont être les principales lignes de votre politique économique ?


Mon ambition est d'inscrire les Hauts-de-France dans le développement, le renouvellement, l'innovation économiques. Je veux faire des Hauts-de-France une région pro-business dans laquelle nous travaillons ensemble, collectivités locales et partenaires (CCIR, CESER, CRMA, Chambres d'agriculture...) au service de l'intérêt régional ! Je veux faciliter la vie des entreprises, lever les blocages qui empêchent leur développement. Je veux qu'ensemble, nous puissions bâtir un écosystème qui leur est favorable. J'ai ainsi demandé au Président de la République que les Hauts-de-France deviennent une zone franche réglementaire pour plus de souplesse, plus de marge de manoeuvre en matière d'urbanisme et d'environnement. Se battre pour une région pro-business, c'est également se battre pour des grands projets structurants qui profiteront à tous comme le Canal Seine-Nord Europe, qui assurera des dizaines de milliers d'emplois pendant sa construction et son exploitation. Durant la campagne électorale pour les régionales, les chefs d'entreprise ont plusieurs fois manifesté leurs inquiétudes et leur manque de confiance, aussi bien face au contexte économique que face aux politiques.






Quelles mesures le conseil régional peut-il prendre pour rétablir un climat de confiance ?

Le Président de la Région doit être le VRP de la Région, et l'avocat de l'intérêt régional. Il y a une part d'investissement personnel qui doit contribuer à emporter la décision, auprès des investisseurs. Les chefs d'entreprise sont, comme les habitants, défiants envers une politique éloignée du quotidien. Ma conviction est que, par la proximité, par l'écoute, par des actions concrètes, nous pouvons réussir. Je suis aux côtés des entrepreneurs, que je rencontre chaque semaine dans leurs entreprises. S'ils font face à des problèmes de financement, la région les accompagne, notamment grâce à la Banque Régionale pour le Travail et l'Investissement que nous sommes en train de bâtir. S'ils rencontrent des difficultés dans le recrutement, la région se mobilise en construisant avec eux un plan de formation sur-mesure pour permettre de former des demandeurs. C'est par la proximité, la réactivité et la simplicité des aides, que nous restaurerons la confiance. Cette confiance, elle passe aussi par le respect des engagements pris. Pendant la campagne électorale, j'avais dit que je n'augmenterai pas les impôts. Voici quelques jours, le Gouvernement et l'Association des Régions de France se sont accordés sur la création d'une nouvelle taxe dite « taxe spéciale d'équipement » qui viendrait peser sur les entreprises et les ménages. Une décision contraire aux intérêts de l'économie, des entreprises et des habitants de ma Région. C'est la raison de mon retrait de l'ARF. Je demande au Gouvernement de revenir sur cette taxe. Et s'il décide de la maintenir, je mobiliserai les parlementaires de la Région lors du débat de la loi de finance à l'automne, pour que les Régions puissent librement fixer le niveau de cette taxe. Si nous gagnons cette bataille, je le dis aux entrepreneurs de ma Région : pour les Hauts-de-France, cette taxe sera à 0.




Quel va être le budget de fonctionnement des Hauts-de-France ? Allez-vous réduire l'endettement ?


Je me suis engagé à réaliser 300 millions d'économies, qui vont nous redonner des marges de manoeuvre pour appliquer nos politiques. Cela va du non-remplacement de certains départs en retraite à des économies sur le train de vie, notamment des élus et des groupes politiques, que nous avons commencé en votant dès le 4 janvier une baisse de 5 % des indemnités des élus, en passant par la revente de plusieurs dizaines de véhicules de la Région.





Le démarrage du chantier du Canal Seine-Nord Europe est prévu en 2017. Vous avez évoqué votre volonté d'accélérer ce dossier : qu'entendez-vous précisément par là et par quoi cela va-t-il se traduire concrètement ?



Nous avons, avec Gérald Darmanin, Vice-président délégué aux transports, repris ce projet qui était au point mort depuis plusieurs années. Parce que nous sommes convaincus que le Canal Seine-Nord Europe sera un des leviers fondamentaux pour le développement des Hauts-de-France à 30 ou 50 ans. C'est tourner notre région vers l'avenir ! Nous avons franchi une étape déterminante en créant la société de projet le 20 avril dernier. Et le 8 juillet dernier, la Région Hauts-de-France a voté le protocole financier et de gouvernance du canal. D'autres étapes restent à franchir, nous serons mobilisés jusqu'au bout ! Je veux que pour tout investisseur en Europe, le hub logistique soit clairement la Région Hauts-de-France.


Quels sont pour vous les autres projets d'infrastructures prioritaires ?

Outre le Canal Seine-Nord Europe, il y a bien sûr les aéroports de Beauvais et de Lesquin. Nous souhaitons aussi mener à bien le projet de barreau Roissy-Picardie, qui permettra de relier les Hauts-de-France à l'Île-de-France sans passer par la gare du Nord, saturée. Nous travaillons également sur une nouvelle version du Réseau Express Grand Lille, qui intègre à la fois le territoire de la Picardie ainsi que la connexion aux réseaux de transports belges. Nous souhaitons développer les échanges transfrontaliers entre le Calaisis et le Kent par la mise en place d'un service ferroviaire quotidien entre Lille, Calais Frethun et Ashford, voir, au-delà, vers Ebbsfleet et Londres. Enfin, c'est le réseau routier, notamment la question de la RN2, dans l'Aisne.
Comment allez-vous poursuivre ce qui a été démarré autour de la Troisième Révolution Industrielle ? Notamment en étendant ce qui a déjà été fait en Nord ? Pas-de-Calais à la Picardie. Ce sont plus de 300 projets qui ont déjà vu le jour, portant sur l'innovation dans tous les secteurs. La TRI doit être à la fois grand public, et orientée vers les professionnels. Il y a un vrai enjeu autour de la réussite de ces évolutions notamment dans le bassin minier, sur la rénovation des logements. Concernant les énergies renouvelables, j'ai dit que je souhaitais que nous regardions du côté de l'hydrolien, plutôt que de l'éolien. Nous envisageons également l'ouverture prochaine d'une école de la TRI, de comptoirs TRI dans les lycées et universités, pour orienter nos jeunes vers les métiers de demain dont est porteuse la TRI.


Quelle est, enfin, votre vision de la région dans cinq ans ?
Une Région qui aura renoué avec sa grande histoire industrielle, qui sera fidèle à sa tradition agricole, et qui saura en même temps porter l'économie et les métiers de demain, avec des entreprises à forte valeur ajoutée. Une Région qui aura relevé la tête, au coeur de l'Europe, fière de son identité, et qui, après avoir été le berceau de la 1ère et de la 2ème, étonnera à nouveau la France et le monde, en portant la Troisième Révolution Industrielle !