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WICS : "Nous mettons les sciences cognitives au service de la gouvernance de l’entreprise"
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Nathalie Chappey et François Naux fondateurs du cabinet WICS "Nous mettons les sciences cognitives au service de la gouvernance de l’entreprise"

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Nathalie Chappey, orthophoniste de formation et ancienne présidente de l’entreprise Mobidys, associée à François Naux, chef d’entreprise, a créé début 2023 à Nantes le cabinet de conseil WICS (Work In Cognitive System) qui accompagne les PME et ETI dans leur gouvernance en faisant appel aux sciences cognitives.

François Naux et Nathalie Chappey ont fondé le cabinet de conseil en gouvernance cognitive WICS — Photo : WICS

Vous vous présentez comme un cabinet spécialisé en gouvernance cognitive. Qu’est-ce que cela signifie ?

Nous capitalisons sur nos expériences respectives dans l’accompagnement des personnes ayant des troubles du développement cognitif, en tant qu’orthophoniste, et de dirigeant d’une entreprise familiale, puis d’une PMI. Notre idée est de mettre les sciences cognitives au service de l’entreprise, en transposant aux entreprises, en tant que personnes morales, les mécanismes intervenant dans la prise de décision d’une personne physique. Quelques chiffres situent les enjeux : seulement 1 % des quelque 35 000 décisions que nous prenons quotidiennement sont conscientes et nos capacités cognitives diminuent de 30 % en situation de stress. D’où notre volonté d’éclairer et de sécuriser les décisions que prennent les dirigeants en faisant appel à leur capital cognitif.

Comment définissez-vous le capital cognitif ?

Pour traiter les informations qu’il reçoit, notre cerveau fait appel aux connaissances conceptuelles que nous avons acquises, à des connaissances comportementales qui aident à interpréter une situation donnée et aux compétences qui relèvent du savoir-être. Mais plusieurs biais, qu’il ne faut d’ailleurs pas associer à des défauts, peuvent faire que l’on n’utilise pas la façon de penser adaptée pour prendre décision.

Quels biais cognitifs peuvent fausser la prise de décision ?

Notre cerveau est fait pour gérer notre survie. Il a donc tendance à automatiser la prise de décision pour économiser de l’énergie. Dès que le cerveau est fatigué, en surcharge cognitive ou en stress, il passe en mode automatique pour diminuer la pression. Notre travail consiste à remettre de la prise de conscience dans le processus de décision. Souvent, nous disons : "prends ton temps, car tu es pressé". Un autre biais fréquent chez le dirigeant est d’être tellement habité par son entreprise qu’il ne parvient plus à se dissocier d’elle. Il confond ses émotions et son état de forme avec ceux de l’entreprise et vice et versa. Cela peut fausser les raisonnements et amener le dirigeant à ne pas laisser assez de place à son équipe de direction. Notre rôle est de l’amener à prendre du recul, à faire un pas de côté, toujours au bénéfice de la personne morale qu’est l’entreprise.

Les modes de fonctionnement différents du cerveau peuvent également être sources de conflits ?

Oui, tout à fait. Le cerveau a plusieurs fonctions exécutives : la planification, l’analyse, la résolution de problème, le jugement, la mémorisation, la décision, l’imagination… Chaque cerveau privilégie une de ces fonctions. Un organe de gouvernance, comme un conseil d’administration, peut ainsi réunir des personnes faisant appel à la mémoire -"on a toujours fait comme cela"-, d’autres qui raisonnent en termes de risques ou encore de solutions. Le risque est d’aboutir à un dialogue de sourd, à des discussions qui tournent en rond, à un sentiment de frustration… 96 % des dirigeants s’interrogent sur les barrières qui freinent ou s’opposent à la réalisation de leurs stratégies. Nous avons tendance à chercher des réponses du côté de la chaîne de production, de la chaîne de création de valeur. Mais il faut aussi questionner l’humain, les cerveaux…

Comment intervenez-vous pour résoudre ces dysfonctionnements ?

Notre objectif est d’associer des forces individuelles au service du collectif, dans l’intérêt de l’entreprise. Nous aidons les individus qui sont des "je" à former du "nous" sans se perdre, à aligner les cerveaux qui sont autour d’une table pour qu’ils aillent dans la même direction. Pour cela, nous mettons des mots sur les comportements et nous créons un langage commun. Nous travaillons sur le capital cognitif de l’entreprise, constitué de ses valeurs, sa culture, sa raison d’être, ses savoir-faire, etc., pour aider le dirigeant à créer du sens et à la communiquer pour susciter l’engagement. En résumé, nous plaçons le cognitif au cœur de la performance de l’entreprise.

Dans quel contexte les entreprises font-elles appel à vos services ?

Notre terrain de jeu, c’est la gouvernance d’entreprise. Nos cadres d’intervention privilégiés sont les entreprises en forte croissance qui ont besoin de structurer leur gouvernance, les entreprises en phase de cession-transmission qui veulent préserver leur capital cognitif pour assurer leur pérennité, les entreprises en restructuration ou encore des salariés qui deviennent associés. Nous travaillons toujours en binôme pour apporter une double approche en sciences cognitives et en gestion d’entreprise.

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