Vents contraires sur l'éolien marin normand
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Vents contraires sur l'éolien marin normand

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Si le projet de parc éolien au large de Dieppe-Le Tréport a enfin reçu le feu vert des autorités, ceux de Courseulles-sur-Mer et Fécamp nagent encore dans les méandres des recours administratifs. Pourtant, les acteurs économiques se mobilisent et veulent croire en l’avenir de la filière des énergies marines renouvelables.

— Photo : Heos marine

La Normandie dispose de l’un des premiers potentiels éoliens mondial. Rien d’étonnant alors que trois des six projets de parcs éoliens maritimes français se situent dans la région, au large de Courseulles-sur-Mer, de Fécamp, et de Dieppe-Le Tréport. Ces dossiers traînent toutefois en longueur. Le gouvernement a attribué les parcs à des consortiums privés, chargés de les construire et de les exploiter, suite à des appels d’offres lancés… en 2011 et 2013. Depuis, pas une pale d’éolienne n’a encore tourné à proximité du littoral normand. Au grand dam des 200 entreprises impliquées dans la filière des énergies marines renouvelables (EMR) locales. La faute aux nombreux recours, la construction des parcs marins suscitant l’opposition d’associations de défense de l’environnement, de pêcheurs et de particuliers.

Feu vert pour le parc Dieppe / Le Tréport

La confirmation en juin dernier par le président de la République de la poursuite du projet de Dieppe / Le Tréport (EMTD) a redonné espoir à la filière régionale. Le 29 février dernier, les préfètes de la région Normandie et du département de la Somme autorisaient par décrets la construction de ce parc et son raccordement au réseau électrique national, tâches respectivement confiées à la société Éoliennes en Mer Dieppe-Le Tréport (EMTD) et au Réseau de Transport de l’Électricité (RTE). Le tout dans une perspective de mise en service à l’horizon 2023 pour une durée d’exploitation prévue de 25 années.

Autre bonne nouvelle annoncée quelques jours plus tôt : le constructeur d’éoliennes offshore Siemens Gamesa Renewable Energy a déposé le permis de construire de sa future usine du Havre. Les autorités portuaires, qui l’attendaient impatiemment, ont déjà préparé le terrain de 40 hectares qui va l’accueillir. L’industriel ne précise pas le montant de son investissement, mais il rappelle que 750 emplois directs et induits doivent être créés. La construction de l’usine doit débuter l’an prochain et la production démarrer fin 2021. Outre le site de Dieppe-Le Tréport, elle approvisionnera les parcs éoliens d’Yeu-Noirmoutier et de Saint-Brieuc et peut-être des pays du nord-ouest de l’Europe où les EMR sont très développées.

À Dieppe, EMTD est donc « passé d’un projet qui pouvait se faire à un projet qui va se faire » affirme Christophe Le Blanc, le directeur du développement du consortium. Celui-ci est piloté par l’électricien Engie et réunit EDP Renewelable, Enbridge, WPD, la Banque des Territoires (ex-Caisse des Dépôts), récemment rejoints par le japonais Sumitomo. Installé sur 110 km2 de superficie à une quinzaine de kilomètres au large des deux ports cauchois, le parc marin développera une puissance frôlant les 500 MW, au moyen de 62 éoliennes de 8 MW, fabriquées par Siemens Gamesa au Havre dans un complexe industriel voué à intégrer la fabrication des pales, l’assemblage des nacelles et un hub logistique.

Des projets d’envergure retardés

Les vents sont aujourd’hui moins porteurs en ce qui concerne la réalisation des deux autres sites normands, à Courseulles-sur-Mer et à Fécamp, portée par Éolien Maritime France (EDF Renouvelables et Enbridge) et WPD. « Les autorisations obtenues font l’objet de recours qui retardent le démarrage des travaux. Nous attendons les dernières décisions de justice concernant les autorisations de ces projets pour lancer leur construction en vue de premières mises en service dès 2022 » indique la direction. Une mise en service théorique parce que personne ne semble être en mesure de prévoir la durée des délais des recours administratifs.

Conçu pour être implanté sur une emprise de 50 km2 à plus de 10 km des côtes du Bessin, le projet éolien en mer du Calvados a une puissance de 450 MW émanant de 75 éoliennes dont les fondations seront de type mono-pieux. Elles seront équipées de turbines General Electric de 8 MW produites dans son unité de Saint-Nazaire (ex Alstom). Les pales proviendront de l’usine LM Wind Power de Cherbourg, également du groupe GE, ouverte l’an dernier qui a déjà recruté une centaine de personnes.

Positionné sur 67 km² entre 13 et 22 km au large des hautes falaises cauchoises, le projet de Fécamp pourrait être le premier à sortir des eaux. Il développera quant à lui 498 MW avec 83 éoliennes GE. Les études menées sur zone ont conduit à sélectionner la technologie des fondations gravitaires pour l’ensemble des éoliennes de ce site.

En attendant, au compteur d’électricité d’origine EMR, la France affichait seulement 2 MW de puissance installée en 2018 alors qu’elle dépassait 1 300 MW au Royaume-Uni. L’Allemagne en était à 969 MW et la Belgique à 309 MW. Pour Frédéric Moncany de Saint-Aignan, président du Cluster Maritime Français, « la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour la période 2023-2028 en cours de discussion devra donner aux différentes technologies, éolien posé et flottant comme hydrolien, des perspectives de volume et de calendrier pour permettre à la France de saisir cette opportunité des EMR ».

Les autorisations obtenues font l’objet de recours qui retardent le démarrage des travaux, s’inquiète la direction d’Éolien maritime France et de WPD.

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