Le chantier du Grand Paris Express devrait générer à lui seul 45 millions de tonnes de terres de déblais sur 15 ans, soit l’équivalent de 9 000 piscines olympiques de deux mètres de profondeur. Plus généralement, 70 % des 160 millions de tonnes de terres extraites chaque année en France restent inutilisées. Ces terres d’excavation sont transportées vers d’anciennes carrières qui font payer des droits de décharge ou déposées chez des agriculteurs, sans pouvoir être valorisées, avec une traçabilité faible voire un risque de dégradation de l’environnement, notamment en zones humides.
Le cabinet d’ingénierie Terra Innova, créé en 2018 et implanté à Vertou, près de Nantes, a pour ambition d’apporter des solutions à ces problématiques financières et environnementales. "Notre concept est de mettre de l’intelligence agronomique et environnementale dans la gestion de ces terres de chantier pour les envisager, non plus comme des déchets mais comme des ressources servant à recomposer des paysages, recréer des sols dégradés par l’action de l’homme en accroissant la rétention d’eau ou en apportant des matières fines sur des sols rocheux…", énumère Nathaniel Beaumal, dirigeant fondateur de Terra Innova.
Faire le lien entre les chantiers et les agriculteurs
La jeune entreprise récupère donc les terres issues de chantiers de plus de 500 000 m3 auprès d’une clientèle constituée de maîtres d’ouvrage (collectivités, promoteurs, aménageurs) et d’entreprises de travaux publics. La première étape consiste à caractériser ces terres (pollution, qualités agronomiques…) pour éliminer les terres non valorisables. Cette première phase est facturée forfaitairement aux clients. Terra Innova recherche ensuite des agriculteurs intéressés par ces matériaux et les accompagne dans leur valorisation, via différentes techniques agricoles destinées à les fertiliser. Terra Innova se rémunère alors au prorata des volumes de déblais valorisés. Pour trouver une solution au plus près des chantiers, la jeune entreprise est présente dans tout l’Ouest de la France, à Lyon, ainsi qu’en Seine-et-Marne.
Levée de fonds
Terra Innova, qui emploie 16 salariés, a réalisé un chiffre d’affaires de 320 000 euros en 2019, de 630 000 euros en 2020 et vise 1,2 million d’euros en 2021. "Nous sommes le seul acteur spécialisé à prendre la terre sur les chantiers pour l’emporter directement chez les agriculteurs. Mais nous sentons la concurrence arriver, y compris chez les gros acteurs du BTP qui nous suivent de près. Nous nous inscrivons dans une logique d’économie circulaire, plus complexe que de mettre ces déblais à une décharge agréée, mais plus vertueuse. Ce qui intéresse les clients engagés dans une démarche RSE", rapporte le dirigeant.
Pour prendre la concurrence de vitesse, Terra Innova souhaite accélérer son déploiement dans l’hexagone en ouvrant de nouvelles implantations dans le Sud et le Grand Est en 2022 et en couvrant toute la France en 2023. L’entreprise nantaise pourrait ensuite se déployer à l’international en ciblant notamment les marchés suisse, britannique et polonais. Non rentable, Terra Innova prépare une levée de fonds pour financer ces futurs développements.
