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Soprema commence à dire au revoir au pétrole
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Soprema commence à dire au revoir au pétrole

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Soprema, le géant de l'étanchéité et de l'isolation, veut s'affranchir du tout pétrole et produit sa propre matière première à partir de plastiques. Le groupe alsacien a investi 7 millions d'euros dans une unité de recyclage unique en son genre.

— Photo : Bartosch Salmanski - 128db.fr

« Avec un taux de croissance moyen de 11 % ces dernières années, Soprema (2,75 Md € de CA en 2018 ; 7 600 collaborateurs), s’apprête à passer la barre des 3 milliards d'euros de chiffre d’affaires en 2019 », prévoit Pierre-Etienne Bindschedler, PDG du groupe strasbourgeois spécialisé dans l’isolation et l’étanchéité. Ce n’est pas tant pour vanter les bons résultats de l’entreprise familiale mais plutôt pour louer ses velléités vertes que le patron alsacien a inauguré une nouvelle unité au sein du Port du Rhin à Strasbourg.

En service depuis le début d’année, cette unité emploie actuellement 15 personnes et a les capacités d’en embaucher 30. Sur un espace de 22 000 m² acquis à un logisticien, l’entrepôt est occupé pour moitié par une ligne de recyclage des emballages plastiques en matière PET complexe, soit « une première mondiale », selon le groupe.

Les balles de matières PET fournies par l’organisme de collecte de déchets CITEO sont triées puis réduites en paillettes à travers l’étape du recyclage mécanique. La seconde étape, celle du recyclage chimique, permet à Soprema, selon un procédé développé en interne par les centres R&D du groupe, de produire, à partir des paillettes, du polyol liquide. Cette matière éco-sourcée, c’est-à-dire produite à partir de matière première recyclée, est ensuite envoyée par camions citernes sur les sites Soprema de Hof, en Allemagne, et de Saint-Julien-du-Saut, dans l’Yonne, où elle est utilisée pour fabriquer des mousses isolantes en polyuréthane pour le bâtiment.

30 millions d'euros investis depuis 15 ans

« Ce qui est novateur, c’est que Soprema devient producteur de sa propre matière première. C’est une évolution pour notre groupe, celui-ci s’oriente vers l’intégration de ces matières afin d’être autonome des produits pétro-sourcés », souligne Pierre-Etienne Bindschedler dont l'entreprise a dépensé près de 30 millions d’euros depuis 2005 dans des programmes de recherche afin de devenir indépendant des matières premières issues du pétrole. « Ces matières premières éco ou bio sourcées coûtent cependant jusqu’à trois fois plus cher que les produits dérivés du pétrole. Les industriels doivent ainsi engager un travail sur la filière afin d’être compétitifs », nuance le PDG.

Construire une filière

Une filière qui en est encore à ses débuts. En effet, les PET complexes, qui entrent dans la composition des bouteilles en plastique opaque, des barquettes alimentaires ou encore des pots de yaourts sont encore mal recyclés car non pris en charge par tous les centres de tri. Ainsi, CITEO, partenaire de Soprema dans cette opération, fournit gratuitement les déchets PET complexes récoltés dans les centres de tri français « tant qu’il n’existe pas encore de filière structurée pour la valorisation de ce type de déchets », précise Sophie Genier, directrice du service recyclage chez CITEO.

Soutenu par l'Ademe dans le cadre du Programme d'Investissement d'Avenir, Soprema a investi 7 M€ dans le procédé et prévoit, la première année, la production de 5 000 tonnes de polyols à partir d'additifs et de 3 500 tonnes de déchets. D’ici cinq ans, le site espère produire 10 000 tonnes par an. Le groupe reste discret quant au coût de revient de la matière obtenue, qui se substitue à 50 % au polyols pétro-sourcé dans le processus de fabrication. À moyen terme, Soprema envisage même la commercialisation externe de ces polyols.

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