Isère
Soitec accélère sa diversification 
Isère # Industrie # Investissement

Soitec accélère sa diversification 

S'abonner

Le fabricant grenoblois de matériaux semi-conducteurs dont le chiffre d’affaires a plus que doublé ces quatre dernières années, a su résister au ralentissement mondial des ventes de smartphones en 2022. Boosté par la croissance de ses deux autres divisions, automobile et appareils connectés, Soitec poursuit sa politique d’investissement avec l'extension de ses deux usines de Bernin et Singapour.

La division communications mobiles représente 3/4 du chiffre d'affaires de Soitec, qui est malgré tout parvenu à résister à la forte baisse des ventes de smartphones l'an dernier. L'entreprise anticipe un chiffre d'affaires en croissance d'environ 20% pour l'exercice 2022-2023 — Photo : Pierre Jayet

La quasi-totalité des smartphones du monde sont équipés en substrats à base de silicium, à forte valeur ajoutée, produits par le Français Soitec, entreprise grenobloise créée il y a 30 ans par deux ingénieurs du CEA-Leti et spécialisée dans la fabrication de matériaux semi-conducteurs innovants. "Les produits Soitec sont dans les poches de 5 milliards de personnes", résume ainsi Thomas Piliszczuk executive vice-président de toute l’activité business du groupe. "Nous produisons des substrats utilisés par les fabricants de semi-conducteurs pour graver leurs composants électroniques", poursuit le patron Global Business. Cette technologie, dite SOI (Silicium sur Isolant), très économe en énergie et désormais adoptée par l’ensemble des fabricants de smartphones, a permis à l’ancienne start-up de devenir une entreprise cotée, employant 1 191 salariés, au bénéfice de 202 millions d’euros pour 2022 et leader sur le marché des substrats SOI pour téléphones portables. Marché qui représente d’ailleurs les trois quarts de son activité.

Une bonne résistance à la chute des ventes de smartphones

Alors que les ventes de téléphones mobiles ont connu l’an dernier leur plus forte baisse depuis dix ans, de 11 %, dans un contexte de forte inflation et de déstockage post-Covid, le fabricant de matériaux semi-conducteurs est malgré tout parvenu à maintenir le cap. La division communications mobiles de l’entreprise, a ainsi connu une croissance de 17 % au troisième trimestre décalé 2022-2023, pour atteindre 170 millions d’euros. Une résistance qui s’explique notamment par l’augmentation de la superficie des matériaux Soitec dans les appareils, liée à l’adoption de la 5G et de la WiFi6. "La participation de Soitec dans les smartphones, mesurée en millimètres carrés, est de plus en plus importante ce qui nous a permis de continuer à croître sur ce segment, malgré le ralentissement des ventes de smartphones", explique Thomas Piliszczuk. Ce dernier estime que la taille des matériaux développés par Soitec pour les smartphones devrait tripler d’ici 3 à 4 ans, pour dépasser les 200 mm². "Nous sommes tout au début de la chaîne de valeur dans l’industrie des semi-conducteurs, mais nous possédons l’avantage de travailler directement avec les fabricants des plus grandes marques de smartphones, pour comprendre leurs besoins de long terme et leur proposer des solutions pour améliorer leurs performances", explique encore le patron Gobal Business. Un positionnement qui permet à l’entreprise d’anticiper l’évolution du marché des smartphones, aux applications de plus en plus complexes.

Deux autres divisions en pleine expansion

Soitec mise également sur l’accélération de ses deux autres segments d’activité, automobile & industrie et appareil intelligents, pour soutenir son activité globale, passée de 311 millions d’euros à 863 millions d’euros de chiffre d’affaires, en l’espace de quatre ans.

"Une nouvelle histoire commence pour Soitec avec l’essor des voitures électriques et des véhicules autonomes, où les semi-conducteurs sont de plus en plus utilisés. Notre entreprise va permettre d’accélérer l’adoption de ce type de véhicules car nous possédons la technologie pour produire des matériaux en carbure de silicium avec un rendement plus élevé et moins gourmand en énergie", explique encore Thomas Piliszczuk.

Preuve de cette accélération de la demande sur ce marché, le chiffre d’affaires de la division automobile a progressé de 96 % au troisième trimestre 2022-2023 pour atteindre 37 millions d’euros. De même, l’activité de la branche appareils intelligents a, elle, progressé de 57 % sur le T3 à 67 millions d’euros, portée par le développement de capteurs plus complexes et davantage d’intelligence embarquée dans les objets connectés. De quoi permettre à l’entreprise grenobloise d’atteindre son objectif de dépasser les 2 milliards de dollars de chiffre d’affaires à horizon 2026. "Nous sommes portés par deux autres méga-trends : le développement de la voiture électrique et autonome ainsi que l'intelligence artificielle déployée dans les objets connectés et le cloud", soutient Thomas Piliszczuk. À moyen long terme, l’entreprise entend cependant rééquilibrer l’activité entre ses trois activités. "Aujourd’hui, notre répartition est encore très focalisée sur le mobile. Mais au terme de l'année fiscale 2026 la communication mobile devrait représenter 65 % de notre chiffre d'affaires contre 25% pour l'automobile et l'industrie et 15% pour les objets connectés", poursuit Thomas Piliszczuk.

Extension de ses deux usines

En attendant, le groupe continue d’investir à marche forcée - ses investissements ont atteint 181 millions d’euros en 2022, contre 21 millions en 2018 - pour poursuivre ses développements technologiques et répondre à l’accélération de la demande. Ces dépenses ont notamment permis de financer l’extension des deux usines de Soitec, à Bernin (Isère), où se situe son siège, et à Singapour. "Notre nouvelle usine, Bernin 4 sera dédiée aux substrats carbure de silicium et devrait être inaugurée après l’été", explique le patron Global Business.

Côté asiatique, l’achèvement des travaux de l’extension du site de production de Pasir Ris, à Singapour, "autour de l’année fiscale 2025" permettra à Soitec d’ajouter 45 000 m2 de salle blanche et de bureaux et de doubler sa capacité de production annuelle dans la cité-état, pour atteindre 2 millions de substrats SOI. Ce second site de production dessert les clients asiatiques de Soitec, mais également le continent américain, et même européen.

"Nos grands clients demandent à être approvisionnés par plusieurs usines afin de limiter leurs risques et beaucoup d'entre eux sont en Asie - donc produire au plus près permet de limiter l'impact lié au transport", explique encore Thomas Piliszczuk. Le fabricant de substrats japonais Shin Etsu Chemical ainsi que le taïwanais Global Wafers, principaux clients de l’entreprise grenobloise, possèdent d’ailleurs tous deux des licences de Soitec pour leur permettre de fabriquer eux-mêmes certains substrats à base de SOI. Une façon pour eux de diversifier leurs sources d’approvisionnement. Certes, ces royalties ne représentent qu’une dizaine de millions d’euros de recettes pour Soitec. Mais ces licences permettent surtout à l’entreprise d’étendre son assise et sa technologie dans le monde.

Isère # Industrie # Électronique # Automobile # Investissement
Fiche entreprise
Retrouvez toutes les informations sur l’entreprise SOITEC