RSE : les entreprises françaises à la traîne
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RSE : les entreprises françaises à la traîne

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Les entreprises françaises ont encore des progrès à faire en matière de RSE. C'est ce que révèle une étude réalisée par Altares et Dun and Bradstreet à partir du nouveau scoring ESG des PME, ETI et grands groupes. Par rapport à leurs homologues européennes, les entreprises tricolores sont en retard.

Baromètre RSE Altares — Photo : Olivier Le Moal - stock.adobe.co - Olivier Le Moal - Olivier Le Moal

Les entreprises françaises se situent dans le milieu du classement mondial de l’engagement RSE et à la traîne du palmarès européen, loin derrière notamment les pays nordiques. C’est ce qui ressort du premier baromètre RSE publié par Altares sur la base du scoring établi au niveau mondial par Dun and Bradstreet. Or, cet engagement RSE est aujourd’hui une donnée fondamentale de la stratégie de développement des entreprises soumises à de nouvelles contraintes réglementaires. Que l’on parle de RSE (responsabilité sociétale des entreprises), qui fait référence à la façon dont une entreprise se comporte envers les individus, la société et l’environnement ou d’ESG (environnement, social, gouvernance), qui fait plus spécifiquement référence à l’évaluation des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance d’une entreprise, le scoring en la matière devient une donnée essentielle du pilotage d'une entreprise.

85% des entreprises françaises scorées ESG

Le baromètre RSE d’Altares vise à "fournir une vision globale et approfondie des pratiques durables des entreprises" à partir de l’analyse d’indicateurs de performance RSE avancés tels que l’empreinte carbone, la diversité et l’inclusion, l’approvisionnement responsable, les initiatives de responsabilité sociale, la transparence des informations et l’engagement des parties prenantes.

Sur les 500 millions d’entreprises analysées par Dun & Bradstreet dans 220 pays, 80 millions sont aujourd’hui scorées ESG. En France, 85 % des entreprises dites "économiquement actives" de la base de données d’Altares (soit 3,5 millions de numéros SIREN) le sont.

Pour construire son baromètre, Altares s’est intéressé aux seules entreprises de plus de 20 salariés (95 581 structures privées et publiques actives au 19 juin 2023), des PME, ETI et grands groupes qui "ont un impact économique […] en termes d’emploi, de consommation, d’investissement et de développement local". Ces sociétés de plus de vingt salariés sont en outre "souvent soumises à des obligations réglementaires plus strictes en matière de divulgation d’informations et de transparence", complète Altares, les plus grandes devant "publier des rapports sur leur performance RSE et se conformer à certaines normes ou réglementations", ce qui facilite l’évaluation de leurs actions en matière de RSE.

La France en retard

Le score ESG d’Altares se décline sur une échelle de 1 à 5 sur chaque pilier (E pour environnement, S pour social et G pour gouvernance) et de façon globale, 1 correspondant à une bonne performance et 5 à une mauvaise.

Globalement le score RSE des entreprises françaises (2,53) ne se situe pas dans le peloton de tête mondial et arrive même très largement derrière la plupart des pays européens : 1,75 pour la Suède, 1,88 pour l’Irlande, 2,05 pour l’Autriche, 2,08 pour la Belgique, 2,12 pour le Danemark, 2,14 pour le Luxembourg, 2,16 pour la Hongrie, 2,24 pour la République tchèque, 2,26 pour le Portugal, 2,28 pour la Norvège, 2,42 pour l’Allemagne, la Serbie et la Pologne, 2,43 pour la Grande Bretagne… Seuls les Pays Bas (2,53), la Lituanie (2,69), l’Espagne (2,81), la Lettonie (2,94), l’Estonie (3,09) et l’Islande (3,19) font moins bien.

Pression législative et des consommateurs

Si de nombreux pays européens arrivent en tête du classement mondial, c’est qu’ils ont mis en place des lois et des réglementations strictes en matière de RSE qui obligent les entreprises à respecter certaines normes sociales et environnementales, et à adopter des pratiques responsables.

De leurs côtés, les consommateurs de ces pays semblent également plus conscients des enjeux sociaux et environnementaux et donc plus enclins à soutenir des entreprises qui adoptent des pratiques durables et responsables.

En France, les scores ESG reflètent des engagements RSE différents selon les secteurs d’activité. Les activités à forte dépendance aux énergies fossiles comme le transport peinent ainsi à entreprendre des démarches RSE tandis que d’autres secteurs comme le BTP, soumis depuis longtemps à des contraintes réglementaires comme les normes HQE (haute qualite environnementale), sont en pointe, notamment en termes de gouvernance.

En revanche, l’analyse du sous-score "environnement" montre que "l’ensemble des secteurs d’activité a encore des progrès à faire sur ce thème pourtant porteur en termes de communication", constate Altares.

Contre toute attente, la différence de scores ESG par taille d’entreprise est en revanche assez minime, les grandes entreprises n’ayant pas un comportement plus vertueux que les petites en matière de RSE.

Des contraintes réglementaires accrues

Ce scoring ESG des entreprises, qui facilite l’évaluation de la performance RSE des prestataires, clients et fournisseurs, est appelé à jouer un rôle de plus en plus important dans un proche avenir, du fait du renforcement des contraintes réglementaires.

En France, la loi du 27 mars 2017 a imposé aux grandes entreprises un devoir de vigilance pour prévenir les risques sociaux, environnementaux et de gouvernance, liés à leurs opérations ainsi qu’aux activités de leurs filiales et sous-traitantes. Elles doivent pour cela établir un plan de vigilance visant à cartographier les risques liés aux droits environnementaux et humains, à évaluer régulièrement leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs, à définir des actions de prévention de ces risques avec la mise en place d’un mécanisme d’alerte, et à créer un dispositif de suivi des mesures mises en œuvre et d’évaluation de leur efficacité.

La même année, la transposition dans le droit français de la directive européenne NFRD (non financial reporting directive) a contraint les entreprises de plus de 500 salariés à publier chaque année une déclaration de performance extra-financière (DPEF). La révision de cette directive par le Parlement européen au printemps 2022 change la donne. Désormais la CSRD (corporate sustainibility reporting directive) va contraindre à un reporting plus détaillé un plus grand nombre d’entreprises. Elle concernera désormais les entreprises satisfaisant au moins deux des trois critères suivants : plus de 250 salariés, 40 millions d’euros de chiffre d’affaires net, 20 millions d’euros de total du bilan, mais également les PME cotées qui satisfont deux des trois critères suivants : entre 10 et 250 salariés, chiffre d’affaires net entre 700 millions d’euros et 40 millions d’euros, et entre 350 000 euros et 20 millions d’euros de total du bilan.

Ce texte européen qui doit être transposé dans le droit français d’ici la fin de l’année pour entrer en application progressivement entre 2024 et 2028, donnera tout son sens au devoir de vigilance des entreprises sur leurs risques RSE et à l’utilité d’un scoring spécifique.

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