Lorraine Airport : « Nous pouvons rebondir aussi vite que nous chutons »
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Yves Loubet directeur général du Lorraine Airport Lorraine Airport : « Nous pouvons rebondir aussi vite que nous chutons »

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Ses avions cloués au sol et la quasi-totalité de ses salariés en chômage partiel, le Lorraine Airport enregistre près de 90% de baisse d'activité cette année. L'aéroport régional situé à Louvigny (entre Metz et Nancy) se sépare d'un tiers de ses effectifs. Son directeur général Yves Loubet espère une éclaircie à la mi-janvier.

Cette année, l'aéroport Metz-Nancy-Lorraine n'a accueilli que 37 000 passagers, contre 265 000 en 2019 — Photo : Lorraine Airport

Sur les 79 salariés de l’aéroport, plus d’une vingtaine vont être licenciés. L’intersyndicale estime que le Covid-19 ne doit pas être un prétexte. Comment réagissez-vous ?

Il faut bien se rendre compte de la situation : elle est triste et sombre. Mis à part quelques entraînements et vols privés, nous n’avons aucune activité. Commercialement parlant, c’est zéro. Nous espérions une reprise avec le déconfinement mais le départ d’Air France et de sa filiale Hop en juillet a eu un impact énorme. Il nous restait Twin Jet qui avait repris ses rotations mi-septembre pour Lyon, Marseille et Toulouse, mais la compagnie a finalement tout arrêté. Depuis le 2 novembre, nous n’avons plus rien. Par rapport à l’an dernier, notre activité a chuté de 87 %. De 265 000 passagers en 2019, nous sommes tombés à 37 000 cette année. Nous avons perdu 4,3 millions d’euros de recettes aéronautiques et nous n’avons aucune rentrée d’argent extérieure : plus de loueurs, plus de parkings. Aujourd’hui, 95 % de nos effectifs sont au chômage partiel. Seuls quelques agents maintiennent une veille opérationnelle. C’est tout. Nous avons dû faire un prêt pour payer les salaires d’août à septembre. Désormais, nous ne pouvons plus faire autrement : entre 23 et 25 salariés vont être licenciés, dont une quinzaine de licenciements secs.

Les syndicats dénoncent un manque de volonté politique de la part de la Région Grand Est pour sauver son aéroport. Ils évoquent même « un travail de sape ». Que leur répondez-vous ?

C’est quand même étonnant de leur part. Non, la Région ne reste pas les bras croisés. Elle vient de débloquer un million d’euros supplémentaires pour que nous puissions terminer l’année. Si elle ne l’avait pas fait, on fermait le 30 novembre. Sans oublier les dotations annuelles : c’était 1,2 M€ en 2020, ce sera 1,5 M€ en 2021. Au total, ce sont près de 4M€ déboursés en deux ans. Tout cela, pour faire 30 000 passagers. On ne peut pas dire que la volonté n’est pas là. Si l’aéroport était privé, nous aurions fermé depuis longtemps.

Dans ces conditions, croyez-vous que l’aéroport Metz-Nancy-Lorraine a encore un avenir ?

Son existence était déjà remise en question bien avant la crise, sans compter le contexte idéologique actuel ciblant les vols intérieurs et les petites lignes. L’avenir, déjà sombre, a donc été précipité par l’épidémie : tout s’écroule autour de nous. La pérennité du site dépend désormais de la réouverture des frontières. Si les vols vers le Maghreb reprennent en janvier et si nous parvenons à débloquer quelques destinations vacances, ce sera déjà ça de pris. Nous nous raccrochons à la moindre branche. En attendant, nous prévoyons de basculer après le 31 décembre dans une activité partielle de longue durée. Avec la réorganisation de nos équipes, nous gagnerons un peu de temps pour analyser l’évolution de la situation. Nous sommes un petit aéroport et nous pouvons rebondir aussi vite que nous chutons. Il suffit de pas grand-chose. En revanche, sur la stratégie à long terme, la balle reste dans le camp des élus. Ils prévoient de se réunir dans quelques semaines pour évoquer l’avenir de l’aéroport. Comme les élections régionales arrivent bientôt, il peut encore se passer beaucoup de choses.

# Aérien # Ressources humaines # Social # Conjoncture