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Loïc Buffet (Nantes d’Airbus Atlantic) : "Airbus travaille sur trois concepts d’avion propulsé à l’hydrogène"
Interview Nantes # Aéronautique # Investissement industriel

Loïc Buffet responsable Airbus Atlantic du ZEDC (ZEROe Development Centre) de Nantes. "Airbus travaille sur trois concepts d’avion propulsé à l’hydrogène"

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Le géant Airbus veut décarboner l’avion commercial. Parmi les projets de recherche et développement les plus innovants du groupe européen, on trouve ZEROe, un avion propulsé à l’hydrogène bas carbone. À Nantes, un bâtiment accueille le ZEDC (ZEROe Development Centre) d’Airbus, un centre de recherche et de développement qui met au point le futur réservoir d’hydrogène liquide de cet avion et dont les activités sont réalisées par les équipes d’Airbus Atlantic Nantes.

Loïc Buffet, responsable Airbus Atlantic du ZEDC (ZEROe Development Centre) de Nantes — Photo : David Pouilloux

Dans l’industrie, en particulier, la décarbonation est un enjeu stratégique. Quelles sont les grandes lignes de la feuille de route du constructeur d’avion Airbus en la matière ?

Airbus investit entre 2 et 3 milliards d’euros par an en R & D, principalement dans la décarbonation. L’amélioration continue de nos avions, l’optimisation du trafic aérien, l’utilisation de SAF (Sustainable Aviation Fuels ou carburants d’aviation durables) et à moyen terme l’utilisation d’hydrogène bas carbone sont parmi les axes principaux de cette feuille de route. Pour comprendre quels sont les leviers qui nous permettent de décarboner l’aviation commerciale, il faut avoir en tête quelques chiffres. Un avion de ligne a une durée de vie de 30 ans. Lorsque l’on mesure son empreinte carbone totale, 1 % de ses émissions de CO2 sont liées à sa production industrielle, 2 % à ses opérations au sol et 97 % à ses vols.

Quelle place le projet que vous conduisez à Nantes occupe dans le futur avion propulsé à l’hydrogène bas carbone ?

Au sein du site Airbus Atlantic de Nantes, je suis responsable du ZEDC (ZEROe Development Centre) d’Airbus, un centre de recherche et de développement qui met au point le futur réservoir d’hydrogène liquide de l’avion ZEROe. Airbus travaille sur trois concepts d’avion propulsé à l’hydrogène embarquant à leur bord deux réservoirs d’hydrogène cryogénique, c’est-à-dire maintenu à - 253 °C. Nous travaillons actuellement sur un prototype, avant de passer à une autre échelle. L’un des enjeux majeurs est d’isoler le réservoir pour conserver l’hydrogène à une température aussi froide. Il faut créer du vide entre les parois et apporter des isolants à l’intérieur. Une fois les technologies arrivées à maturité nous démarrerons la phase de test au sol et en vol sur un A380 d’essai. Cet avion démonstrateur conservera ses moteurs à kérosène, mais il aura aussi un moteur à hydrogène. La puissance et le comportement en vol seront testés.

À quelle échéance ce type d’avion est prévu pour un vol commercial et à quoi ressemblera-t-il ?

Le premier avion à hydrogène devrait voir le jour en 2035. Trois concepts d’avions à hydrogène sont envisagés. Le premier concept est équipé d’un turboréacteur qui brûle l’hydrogène. Il aurait une autonomie jusqu’à 2000 nautiques, soit 3 700 km, et embarquerait jusqu’à 200 passagers. Il pourrait ainsi couvrir plus de la moitié des vols commerciaux actuels dans le monde. Le second concept est quant à lui équipé d’une pile à combustible et d’un moteur électrique. C’est un avion à hélices, comme un ATR. Il aurait jusqu’à 1 000 nautiques d’autonomie (1 850 km) et jusqu’à 100 passagers à son bord. Le troisième concept est une aile volante : intégrer les ailes au fuselage permettrait d’améliorer la portance tout en réduisant la traînée de l’appareil. Ce volume à l’intérieur de la structure est aussi une excellente opportunité pour optimiser le stockage de l’hydrogène et l’espace en cabine réservé aux passagers.

Comment s’intègre le projet que vous dirigez dans l’écosystème local ?

Mon équipe compte une vingtaine de collaborateurs. Elle travaille au maximum avec des partenaires des Pays de la Loire. La Région nous a accordé une subvention qui nous a permis d’accélérer notre installation. Le Cetim (Centre technique des industries mécaniques), à Nantes, a conduit des tests de pression et des inspections matériaux. L’IRT Jules Verne, quant à lui, travaille sur l’isolation du réservoir et les process industriels. Parmi les partenaires privés, la société nantaise Polysoude vient de développer une station de soudage automatique alors que Lemer Pax, basé à La Chapelle-sur-Erdre, installe en ce moment même une cabine d’inspection du réservoir assemblé. Enfin, nous collaborons étroitement avec les autres pôles de R & D d’Airbus en Europe, en particulier avec celui de Brême, en Allemagne.

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