Pays de la Loire
Lhyfe passe la vitesse supérieure avec son entrée en Bourse
Pays de la Loire # Industrie # Capital

Lhyfe passe la vitesse supérieure avec son entrée en Bourse

S'abonner

L'entreprise nantaise Lhyfe a lancé le 9 mai son introduction en Bourse sur le marché réglementé d’Euronext Paris pour devenir un leader européen de la production d’hydrogène vert. À la clé : une augmentation de capital qui pourrait aller jusqu’à 145 millions d’euros. De quoi accélérer le déploiement des usines et renforcer le secteur commercial avec un doublement des effectifs.

Matthieu Guesné, président directeur général de Lhyfe, lors du lancement en Bourse de cette société de production d’hydrogène vert — Photo : David Pouilloux

Il est rare qu’une société qui annonce 197 000 euros de chiffre d’affaires pèse entre 300 et 380 millions d’euros en capitalisation. C’est pourtant le cas de la start-up industrielle nantaise Lhyfe, seul et unique producteur d’hydrogène vert en France, qui ambitionne de devenir le leader européen de ce secteur. Nouvelle étape pour concrétiser son ambition : quelques jours après avoir obtenu le feu vert de l'Autorité des marchés financiers, elle a fait son entrée à la Bourse de Paris le 9 mai, sur le marché Euronext.

Cette société est un géant en devenir sur un marché de l’hydrogène absolument "cyclopéen", comme aime à le souligner Matthieu Guesné, le PDG de l'entreprise créée en 2017. "Nous ne sommes pas une start-up du numérique, nous ne vendons pas de technologie, aime à rappeler le patron de 41 ans, ancien ingénieur en électronique et ex-directeur du CEA Tech Pays de la Loire et Bretagne. Nous construisons des usines et nous vendons de l’hydrogène à nos clients."

93 projets dont 20 très avancés

Expédition du premier conteneur d'hydrogène vert depuis l'usine Lhyfe de Bouin (Vendée) — Photo : © OHÉ ! - William JEZEQUEL - William JEZEQUEL

La première unité de production d’hydrogène vert de Lhyfe est déjà sur pied à Bouin (Vendée). Elle produit 300 kg d’hydrogène par jour à partir de la dissociation de l’eau en hydrogène et oxygène par électrolyse. L’électricité verte est fournie par le parc éolien de Bouin, à quelques encablures de l’usine. Mais les choses vont s’accélérer. Lhyfe est engagé sur 93 projets d’usines, dont 85 % à l'international (principalement en Europe), dont une vingtaine très avancée. Pour accompagner son développement, l'entreprise, qui compte aujourd'hui 82 salariés, va doubler, d'ici à fin 2022, le nombre de ses commerciaux (de 30 à 60). L'effectif sera aussi renforcé dans le secteur de l'ingénierie pour bâtir les prochaines usines.

"Nous avions de quoi voir venir pendant dix-huit mois avec 55 millions d’euros de cash disponible, précise Matthieu Guesné, qui a mené à bien une série de levées de fonds d’un montant total de 85 millions d’euros. Mais nous pensons que c’est le moment d’accélérer. Le passage en Bourse va nous permettre de récupérer entre 110 et 145 millions d’euros de cash."

Entre 32 et 39 millions d'euros déjà sont déjà sécurisés sous la forme d’engagements de souscription : 25 millions d'euros de la part du portugais EDP Renováveis (EDPR) dans le cadre de la conclusion d’un accord de collaboration pour le développement de projets de production d’hydrogène vert, et entre 7 et 14 millions d'euros de la part des investisseurs financiers CDC Croissance et Amundsen Investment Management. La fourchette indicative de prix pour une action se situe entre 8,75 et 11,75 euros.

Rendre la production d'énergie aux territoires

Au moment où l’industrie et les mobilités se décarbonent, et où l’Europe revendique une indépendance énergétique à l'aune du conflit en Ukraine, la proposition de Lhyfe tombe à pic : un hydrogène décarboné car non issu des énergies fossiles mais de l’eau et de l’électricité renouvelable produite par les éoliennes, et bientôt par "les panneaux photovoltaïques dans les pays du Sud", prophétise Matthieu Guesné. "Notre hydrogène est une énergie produite localement, au plus près des territoires et de nos clients, que ce soit des collectivités qui ont des flottes de véhicules ou des industriels qui ont besoin d’hydrogène pour produire de l’ammoniac ou de l’éthanol. On ne livrera pas notre hydrogène à l’autre bout de la France. On rend aux territoires leur capacité à produire leur propre énergie."

Lhyfe adresse deux marchés clés : les mobilités et l’industrie. Pour l’heure, 50 % des projets concernent le premier et l’autre moitié le second. Mais en volume, l’industrie absorbe "80 % de notre hydrogène." Les clients se situent dans un rayon d’environ 150 km. Dernièrement, Lhyfe a décroché un contrat avec Lidl, pour alimenter en hydrogène les engins de manutention qui opèrent dans sa plateforme logistique de 52 000 m2 en périphérie de Nantes. "Nous allons aussi fournir l’énergie pour le premier train à hydrogène allemand, construit par Siemens, qui était en concurrence avec nous pour l’appel d’offres, s’amuse Matthieu Guesné. En Loire-Atlantique, Lhyfe est également partenaire de Manitou ou de Fétis Group.

Une "licorne verte"

Matthieu Guesné, dirigeant de Lhyfe, a pris possession de la voiture hydrogène livré par le groupe DMD — Photo : Groupe DMD

La première usine avait nécessité 10 millions d’euros d’investissement et peut produire un mégawatt d’énergie par an. "Il y avait dans ce coût notre centre de recherche et de développement, précise Maria Pardo Saleme, directrice financière de Lhyfe. L’un de nos projets consistera à construire une usine de 5 mégawatts et l’investissement sera de l’ordre de 7 millions d’euros, 14 millions si on la pousse à 10 mégawatts." Soit une réduction d’investissement d’un facteur 15 au mégawatt produit. L’objectif à horizon 2026 est fixé à 200 mégawatts pour un chiffre d’affaires de 200 millions d’euros. L'entreprise sera alors à l'équilibre financier. "Chacune de nos usines sera rentable dès la première année, assure Matthieu Guesné. Et pour le consommateur, le coût de l’énergie sera comparable à celui de l’essence ou du diesel, sauf qu’il utilisera une énergie décarbonée."

Pour l'essentiel, l'électricité aura dans les premières années une origine terrestre (onshore), mais rapidement l'électricité offshore devrait prendre une part équivalente d'ici à 2035. Un premier prototype d'usine à hydrogène flottante sera connecté à la première éolienne offshore du parc situé au large du Croisic en septembre 2022. Lorsque les 93 projets engagés seront devenus réalité, en 2030, Lhyfe devrait produire plus de 4,8 gigawatts, soit une production d’hydrogène vert de plus de 1 620 tonnes par jour. Cela ne représentera que 0,8 % du marché mondial de l’hydrogène, évalué à 20 millions de tonnes par an. "On souhaite être une licorne verte, conclut le dirigeant. Pas une entreprise qui pèse un milliard de dollars, mais une entreprise qui permet d’économiser un milliard de tonnes de CO2 d’ici à 2035."

Pays de la Loire # Industrie # Production et distribution d'énergie # Capital # Levée de fonds # International
Fiche entreprise
Retrouvez toutes les informations sur l’entreprise LHYFE