Le fabricant d’instruments de chirurgie pour l’orthopédie à destination des grands laboratoires internationaux Intech Medical (155 M€ de chiffre d'affaires, 1 050 salariés) va bientôt changer de dimension. D’ici 2024, l'ETI de Rang-du-Fliers (Pas-de-Calais) disposera d’un tout nouvel outil industriel pour produire poignées, compresseurs, cutters, entre autres plateaux modulaires passant entre les mains des chirurgiens. “Nous revendiquons des pièces très complexes dans une logique de 'high mix, low volume' (disposer d'une grande variété de références mais produites en petites quantités, NDLR)", défend Laurent Pruvost, l’un des cofondateurs d’Intech il y a 22 ans et aujourd’hui président.
Muscler l'outil industriel
À un peu plus d’un kilomètre des locaux actuels, son usine, qui est aussi le siège monde, déménagera dans un équipement dernier cri. “Notre site est très ancien, nous souhaitions nous redéployer. Nous construisons une usine dernière technologie avec un outil industriel puissant”, explique le dirigeant. Freiné par l’épidémie de Covid, il voit désormais son projet prendre forme. “Sur une parcelle de 30 000 m2, nous passons d’une construction de 4 700 m2 à 11 000 m2, détaille Gauthier Vannelle, directeur de l’usine de Rang-du-Fliers et pilote du projet. Nous avons travaillé sur l’intégration paysagère pour limiter l’impact visuel.”
Suivant une volonté affichée de faire travailler les entreprises régionales, les travaux sont réalisés par Ramery avec des partenaires locaux. Consultés lors de la conception, les 265 collaborateurs régionaux bénéficieront de lumière du jour directe dans leurs espaces de travail, d’un showroom et autres salles de réunion, ainsi que d’une terrasse panoramique donnant à voir l’intérieur de l’usine et ses îlots de fabrication.
Investir pour mieux innover
Un investissement de 17 millions d’euros, pilier de la croissance future de l’ETI nordiste. Il s’accompagne d’un renouvellement du parc machine cette année, pour 5,4 millions d’euros supplémentaires. De quoi améliorer les conditions de travail et anticiper de nouveaux procédés liés à la robotisation de l’industrie ou au surmoulage de manches en silicone, un concept déjà existant aux États-Unis qui a vocation à être déployé à Rang-du-Fliers. Leader dans l’instrumentation de la colonne vertébrale, selon son président, Intech Medical “fonde de très gros espoirs sur une nouvelle technologie embarquant de l’électronique”. En partenariat avec la start-up Smade (Chicago et Lyon), Laurent Pruvost compte bien avoir un coup d’avance. “Beaucoup de brevets” ont déjà été déposés pour protéger un procédé permettant de connecter les instruments d'Intech au cloud. Objectif : compter le nombre de stérilisations ou encore les géolocaliser, ce qui représente un vrai challenge technique en raison d’usages intenses. Mais surtout un marché d’avenir sur le créneau de la traçabilité et des objets connectés.
Cette diversification vient compléter une gamme de produits qui s’est étoffée au fil des années. Si Intech Medical a d’abord grandi en s’implantant aux États-Unis et en Asie, elle a ensuite consolidé son éventail de références, comme dernièrement en 2021 avec l’acquisition du fabricant d’implant Coulot Decolletage à Châtellerault (Vienne).
Pour l’heure, il faut traverser une conjoncture des plus complexes. "Bien que nous ayons des fondamentaux solides et un carnet de commandes plein, il est difficile de gérer l’inflation. Dans ce climat macroéconomique anxiogène, nous sommes dans un brouillard total", concède Laurent Pruvost. Il peut néanmoins s’appuyer sur Montagu Investment, partenaire historique qui détient 75 % du capital, le reste revenant à une centaine de collaborateurs.
La formation comme levier de recrutement
Un autre défi de taille mobilise les dirigeants d'Intech : celui du recrutement. “Nos métiers ne plaisent pas”, se désole Gauthier Vannelle. Participation, intéressement, hausse des salaires pour contrer l’inflation, promotion interne, projet d’actionnariat salarié… les arguments pour séduire de nouveaux talents ne manquent pas. Pourtant, l’entreprise peine régulièrement à recruter, elle qui recherche des profils formés à la maîtrise de machines à commande numérique et autres spécialistes en mécanismes et automatismes industriels. Pour faire face à cette pénurie de main-d’œuvre, le patron de l’usine de Rang-du-Fliers a signé un partenariat avec le Pôle emploi local. Avec “Intech Academy”, il propose un enseignement intégré, conçu directement par les salariés, pour former des demandeurs d’emploi. 26 personnes ont déjà profité de ce cursus conduisant, après CDD, à un CDI. Puis, pourquoi pas à des évolutions internes.
