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La saga gardoise de St Mamet ouvre un nouveau chapitre
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La saga gardoise de St Mamet ouvre un nouveau chapitre

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Leader du fruit en morceaux, St Mamet se donne de nouvelles ambitions industrielles et commerciales. En pleine crise de l’agriculture, la marque gardoise réaffirme son partenariat avec la filière arboricole, qu’elle a tissé des origines à nos jours.

L’entrée du site industriel de St Mamet, fondé à Vauvert dans les années 1960 — Photo : St Mamet

La crise agricole de 2024, nourrie par l’inquiétude d’une filière pour son avenir, trouve un écho lointain dans l’histoire de St Mamet. La marque gardoise, qui a plusieurs fois changé de main dans son histoire, a parfois frôlé le pire. Quand la conserverie naît en 1953, près de Perpignan (Pyrénées-Orientales), à l’initiative d’une poignée d’arboriculteurs, l’ambition des fondateurs est de sécuriser l’intégralité des fruits issus de leurs vergers : certains fruits frais comme la pêche ou la poire n’ayant qu’une disponibilité saisonnière, il fallait trouver un procédé pour les conserver et les vendre toute l’année. "Les fruits ayant des états qualitatifs différents selon leur taux de croissance, la température et les aléas auxquels ils peuvent être exposés, cela permet aussi de les valoriser sur d'autres marchés que le frais", raconte Grégory Degorre, directeur de Solarys, site de production de la marque.

La relocalisation dans le Gard

En 1963, l’activité est transférée sur le site industriel actuel de Vauvert (Gard), par volonté de positionner la nouvelle usine au cœur des vergers. St Mamet s’alimente auprès de bassins de production situés dans un rayon de 60 km (Costières de Nîmes, Pont-Saint-Esprit, Cavaillon). La coopérative agricole Conserve Gard, à l'origine de la création de la marque, reste son principal partenaire depuis plus de 60 ans. Couvrant 370 hectares, elle produit principalement des cerises (500 tonnes par an), des pêches (1 200 tonnes) et des poires (6 500 tonnes). En comptant les autres fournisseurs localisés ailleurs dans le Sud-Est et en Rhône-Alpes, St Mamet collabore à ce jour avec 130 arboriculteurs, soit 1 200 emplois directs et indirects.

Une phase de turbulences économiques

À partir des années 1990 s’ouvre une période d’instabilité pour la marque. En 1997, elle est reprise par le groupe italien Conserve Italia, qui va contribuer à élargir la gamme de produits : si l’essentiel de la production concerne toujours les cocktails de fruits et les oreillons de pêche, des produits dérivés (pâtes de fruits, confitures en pots, compotes en gourdes, etc.) font leur apparition. "La société s’appuyant sur une coopérative côté italien aussi, elle disposait d’un vrai soutien financier. Les difficultés économiques sont apparues quand Conserve Italia a choisi de se recentrer sur son cœur de métier", poursuit Grégory Degorre.

Les difficultés vont apparaître quand le family office Florac signe l’acquisition de St Mamet en 2015. De mauvaises décisions dans des choix technologiques inadaptés aux standards d'une conserverie vont conduire la marque à changer de propriétaire au profit d'Hivest Capital Partners en 2018. Si bien que les nouveaux équipements achetés sont abandonnés au bout de 2 ans, afin de les remplacer par des machines référentes sur ce domaine d'activités.

L'alliance avec les Mousquetaires

Quand Hivest Capital reprend St Mamet en 2018, la société est proche de la faillite, mais le fonds s’emploie à redynamiser la marque. "Hivest a tenu son rôle d'investisseur, en accompagnant la restauration de la performance industrielle retournement industriel de St Mamet afin de nous permettre un adossement à un nouveau groupe industriel de premier plan", souligne Grégory Degorre. En 2022, c’est en effet Agromousquetaires, le pôle agroalimentaire du Groupement Les Mousquetaires, qui rachète la société en totalité. La situation est inédite, mais l’opération est validée par l’Autorité de la concurrence, qui note que "la nouvelle entité ne serait pas incitée à limiter la commercialisation des fruits au sirop produits par St Mamet auprès des distributeurs concurrents d’Intermarché".

Pour sécuriser l’ensemble des clients, la société est néanmoins scindée, en janvier 2023, en deux entités : d’une part, Solarys, qui pilote l’outil industriel de Vauvert ; d’autre part, Saint Mamet Distribution (28 salariés), basée à Nîmes (Gard), qui gère la marque sur les plans commercial, marketing et administratif. Si Système U a choisi de déréférencer St Mamet depuis le 1er mars, tous les autres grands distributeurs ont soutenu l’opération. "St Mamet est un fleuron du Gard. Plus qu’une marque, c’est la dernière grande conserverie de fruits. Le passé récent de l’entreprise a montré qu’elle aurait pu disparaître. On doit se féliciter que les Mousquetaires, fidèles à leur stratégie industrielle depuis 70 ans, viennent revitaliser la marque mais aussi protéger toute une filière", commente Gérard Gillet, directeur commercial et marketing de St Mamet Distribution.

Changer dans un nouvel environnement

Agromousquetaires a déclenché un plan d’investissement de 16 millions d’euros sur le long terme. Une moitié porte sur la modernisation du site de Vauvert, afin de le mettre en conformité avec les standards du groupement. L’autre moitié vise le renforcement de l’outil industriel, avec de nouvelles lignes pour le conditionnement de fruits et de cubes de fruit. Sur le plan commercial, la marque va se diversifier dans des familles de produits comme les confitures, et lancer de nouvelles recettes dans les fruits en morceaux. Une campagne de communication nationale est programmée, au premier semestre 2024, pour faire connaître ces gammes. "La crise agricole a favorisé la prise de conscience sur la difficulté de vendre, sur la nécessité d’acheter ou pas en Europe. Notre projet vise à faire vivre la marque dans un environnement très différent, en insistant sur la production nationale de nos fruits", note Gérard Gillet. Du côté des arboriculteurs, les Mousquetaires restent engagés par la contractualisation en cours avec Conserve Gard, valable jusqu'en 2036 (et planchent déjà sur son renouvellement). Elle porte sur les pêches et les poires, "y compris les fruits trop petits ou trop gros, ce qui contribue à toujours mieux valoriser les vergers", conclut Grégory Degorre.

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