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José Burgos, président de Stif: "Aller en Bourse, c'est rester libre et indépendant"
Témoignage Maine-et-Loire # Industrie # Introduction en Bourse

José Burgos, président de Stif: "Aller en Bourse, c'est rester libre et indépendant"

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En décembre 2023, le groupe angevin Stif levait 10,35 millions d’euros lors de son introduction en Bourse sur le marché Euronext Growth. Résultat d’une démarche entamée moins d’un an plus tôt par José Burgos, son dirigeant, qui fait entrer l’entreprise industrielle de Saint-Georges-sur-Loire dans une autre dimension.

20 décembre 2023 : José Burgos et son père Manuel Burgos sonne la traditionnelle cloche qui officialise l'entrée en Bourse de Stif — Photo : CYVES

Une recherche sur internet, un coup de téléphone et le processus était lancé. Le raccourci est certes osé, car l’entrée en Bourse de l’entreprise industrielle Stif le 20 décembre 2023 ne tient en rien de l’approximation et de l’empressement. Elle est le résultat de la volonté de José Burgos, le président de cette PME de Saint-Georges-sur-Loire (Maine-et-Loire), qui cherchait début 2023 une réponse à un besoin de financement : une dizaine de millions d’euros pour se développer dans les équipements de protection contre l’explosion des BESS, ces systèmes de stockage d’énergie par batterie. Stif a conçu une solution avec un système d’échappement des gaz pour soulager la surpression en cas d’explosion de ces centrales utilisant un groupe de batteries pour stocker l’énergie électrique. Ce marché complète les activités historiques de l’entreprise : la fabrication de composants pour le transport de vrac, majoritairement dans l’industrie agroalimentaire ; et le développement d’équipements de protection contre les risques d’explosion en milieu industriel.

Faire décoller le chiffre d’affaires

Novatrice sur ce marché des BESS très prometteur, Stif, début 2023, veut aller vite et garder sa longueur d’avance. Pour cela, l’entreprise a besoin d’argent : "Nous avions déjà emprunté 2,5 millions d’euros récemment pour réhabiliter notre deuxième usine, raconte le président de Stif José Burgos, et je ne souhaitais pas aller voir les banques. Faire entrer des actionnaires pour disposer d’argent frais non plus." Stif a fait par le passé l’expérience d’un LBO. Le modèle ne lui convenant pas, le groupe avait racheté les parts de l’actionnaire partenaire. "Nous avons découvert le marché des BESS qui présente un très fort potentiel, argumente le dirigeant. Depuis 40 ans, Stif se développe et depuis 3 ans, la croissance est de 10 à 15 % chaque année. Elle devrait être encore beaucoup plus forte dans les années à venir." Avec le développement du marché des BESS, Stif table sur un chiffre d’affaires de 80 millions d’euros en 2027, contre 35,5 millions d'euros en 2023, avec l’ambition de réaliser 80 % de son activité avec les systèmes anti-explosion.

IPO dans le moteur de recherche

Dans la tête du dirigeant angevin, trottait début 2023 le souvenir d’une entreprise bretonne qui avait réalisé en 2021 une entrée en Bourse. Il est vrai que hors banque ou LBO, les solutions de levée de fonds sont limitées. "L’idée a fait son chemin, explique José Burgos, mais je n’avais aucun contact dans ce milieu. Je n’y connaissais rien et je ne suis pas boursicoteur. J’ai donc tapé IPO (Initial Public Offering, traduction anglaise de l’expression introduction en Bourse, NDLR) sur mon moteur de recherche." Dès les premiers résultats apparaît le nom de Louis Thannberger, président d’IPO N°1. José Burgos l’appelle, les deux hommes conviennent d’un rendez-vous dans les deux jours et la machine est lancée. Spécialiste des introductions en Bourse des PME, Louis Thannberger perçoit le potentiel de l’entreprise industrielle angevine et fait une proposition d’accompagnement à ses dirigeants, José Burgos et son père Manuel Burgos, fondateur de Stif en 1984. "Il nous a aidés dès le démarrage puis a mené un travail de mise en relation et de conseil tout au long du process", relate le président du groupe angevin.

Ce que coûte une introduction en Bourse

On est alors en mars 2023 et la machine est lancée. L’introduction en Bourse est envisagée quelques mois plus tard, dans le courant de l’été, sur le marché Euronext Growth. La première étape consiste à trouver un "listing sponsor", une banque qui va aider à la rédaction du document d’enregistrement, nécessaire à la demande d’introduction. "Nous en avons rencontré trois et choisi de travailler avec la banque Delubac, explique José Burgos. Nous avons aussi créé un groupe de travail extérieur à l’entreprise, qui s’est réuni à raison d’une fois par semaine, dans lequel nous avons intégré nos avocats, un expert-comptable, un commissaire aux comptes et une agence de communication financière, car nous avons maintenant obligation de communiquer nos résultats et notre chiffre d’affaires chaque trimestre."

Selon José Burgos, le coût de l'introduction en Bourse représente 8 à 10% du montant de la levée — Photo : STIF

Parallèlement, José Burgos a aussi suivi des formation auprès d’Euronext, pour préparer l’entrée en Bourse. Tout le processus de préparation, durant lequel le projet est présenté à des investisseurs, permet de sécuriser un pourcentage nécessaire de futurs actionnaires avant l’introduction en Bourse. Dans le cas de Stif, il était supérieur à 60 % des actions mises sur le marché. Au final, toutes ces prestations et ces accompagnements ont un coût : entre 8 et 10 % des fonds levés, selon le président de Stif.

Gagner la confiance des investisseurs

Envisagée pour l’été 2023, l’introduction en Bourse de Stif n’a eu lieu qu’en décembre, la période estivale n’étant pas la plus favorable à ce type d’opération. De plus, le groupe comptant plusieurs filiales, l’Autorité des marchés financiers (AMF) souhaitait une consolidation des comptes, ce que Stif n’a pu présenter qu’à l’automne. Enfin, il fallait choisir une fenêtre de tir, car les introductions en Bourse en 2023 n’ont pas été légion. Fin décembre, l’entreprise angevine n’était que la sixième à entrer sur les marchés en 2023. Autant dire que son arrivée était attendue : de sa réussite ou de son échec allaient dépendre la mise en avant ou en attente d’autres projets…

L’entreprise a dépassé ses propres espérances : "Je n’ai jamais douté de l’introduction, confie José Burgos, mais durant les 15 derniers jours, j’ai eu des craintes sur le prix de la valorisation." En novembre, le dirigeant envisageait une levée de 10 millions d’euros, puis a revu ses prétentions à la baisse pour descendre à 9 millions d’euros. Finalement, ce sont 10,35 millions d’euros qui ont été levés : les 9 millions envisagés et 1,35 million dans le cadre de l’exercice de la clause dite d’extension, qui permet de céder des parts supplémentaires. La demande totale d’achat d’action a atteint 15,3 millions d’euros.

Un staff étoffé

La part cotée de Stif s’élève désormais à 31 %, la famille Burgos restant majoritaire avec 69 % des parts. "On ne se sent pas du tout dépossédé, confie José Burgos. On ouvre certes ses comptes mais les actionnaires ne mettent pas le nez dans la gestion de l’entreprise. Aller en Bourse, c’est rester libre et indépendant. Cela nous a permis d’augmenter le capital, mais pas la dette de l’entreprise. Ce que nous pourrons aller chercher s’il le faut."

En interne, l’introduction en Bourse a aussi changé la donne. Le staff de Stif s’est étoffé, avec entre autres l’arrivée d’un DAF, Christophe Canal, et l’entreprise de 190 salariés, qui n’a aucune peine à recruter, a réalisé une AGA (attribution gratuite d’actions), en distribuant 1 % de celles-ci. Certains salariés étant allés au-delà en acquérant eux-mêmes des parts lors de l’introduction. "Nous avions déjà une politique sociale forte, avec une mutuelle, un intéressement et une participation, précise José Burgos. L’AGA va être le ciment de tout cela. Les gens sont fiers de travailler dans une entreprise qui marche bien." Stif a recruté 19 personnes en 2023 et 6 ont déjà rejoint le groupe en janvier 2024.

Soudaine notoriété

Le groupe "marche" si bien qu’il a annoncé récemment un contrat signé avec le géant américain Tesla, d’un montant de 10 millions d’euros, pour fournir des systèmes anti-explosion. Le chiffre d’affaires de Stif France atteint 75 % à l’international. Et les projets ne manquent pas : le développement de Stif Plastic, activité d’injection reprise en 2023, l’implantation prochaine d’un site industriel aux États-Unis, le doublement de la capacité industrielle de sa filiale en Chine. Deux pays cible pour le groupe qui envisage aussi de créer une unité de production en Corée pour le marché local.

Reste un aspect sur lequel le groupe Stif n’était pas préparé : la notoriété. Créée il y a quarante ans, l’entreprise a fait son chemin discrètement, loin des médias. Depuis l’annonce de la volonté d’entrer en Bourse, José Burgos est très sollicité, et l’on a découvert en Anjou cette société industrielle qui cartonne et va de l’avant. La rançon du succès, en quelque sorte. Et cette notoriété n’est pas que locale : selon le président de Stif, le statut d’entreprise cotée en Bourse est aussi un gage supplémentaire de sérieux pour les prospects et les clients, en France comme à l’international.

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