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Fabien Carpentier (Enduiest) : "Mon entourage me permet d’avancer, dans l’entreprise comme dans le sport"
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Fabien Carpentier dirigeant d’Enduiest "Mon entourage me permet d’avancer, dans l’entreprise comme dans le sport"

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Coureur d’ultra-fond, 15e meilleur mondial dans sa discipline, capable de courir 258 kilomètres en 24 heures, Fabien Carpentier réussit à conjuguer la rigueur des entraînements quotidiens et la direction de son entreprise, Enduiest, à Pulnoy.

En parcourant 256,9 kilomètres en 24 heures, lors des Championnats du monde de Taïpei en 2023, Fabien Carpentier a décroché une 15e place mondiale — Photo : DR

Comment faut-il vous présenter ? Comme un coureur d’ultra-fond qui dirige une entreprise ou un dirigeant d’entreprise qui a une passion dévorante pour le sport ?

Ni l’un ni l’autre. Je suis passionné par mon métier comme par mon sport. Et c’est pour cela que j’arrive à équilibrer les choses. J’ai besoin de mon travail pour pouvoir me consacrer au sport et j’ai besoin de faire du sport pour pouvoir travailler. C’est un équilibre, délicat, mais qui me permet d’avancer.

À quel âge avez-vous commencé le sport ?

Mon père m’a donné le goût du sport quand j’étais tout petit. À l’âge de 12 ans, j’ai décidé de faire mes premières compétitions dans le vélo. Je suis arrivé à un très bon niveau dans le cyclisme mais au bout d’un moment, le mélange entre le travail et le vélo ne fonctionnait plus. J’ai dû arrêter le vélo vers 25 ans, et je me suis mis au triathlon, jusqu’à 35 ans. J’ai été jusqu’au championnat du monde de triathlon, à Hawaï. J’ai fait beaucoup d’Iron Man, une épreuve dans laquelle on nage 3,8 kilomètres, on fait 180 km de vélo et on enchaîne avec un marathon.

Comment arrive-t-on à cette discipline de l’ultra-fond ?

J’ai toujours eu un rêve, depuis que je suis tout petit, c’était d’être champion de France. À 40 ans, j’ai regardé mes possibilités d’être encore champion de France et il n’y en avait plus qu’une seule : dans l’ultra-fond, sur les 24 heures. Deux ans après avoir commencé les 24 heures, j’étais champion de France en 2020. C’est une épreuve où tout se joue dans la tête.

L’enjeu, c’est de trouver les ressources mentales pour aller au bout ?

Oui, les médecins de l’équipe de France nous prennent pour des malades. C’est dire que l’épreuve est extrême ! Nous sommes suivis médicalement avant, pendant et après la course, car ils ont vraiment peur de l’accident. Pour me préparer, j’ai plusieurs coachs : sportif, physique et mental. Le coach mental est là pour m’orienter positivement et m’apprendre à me faire mal. Parce qu’on a très mal… Pour récupérer d’une course de 24 heures, je mets quasiment un voire deux mois. Je suis vidé, je perds quasiment entre 4 et 5 kilos. À Taïpei (Taïwan), au championnat du monde, j’ai fait plus de 125 tours sur une boucle de 2 km pour courir un total de 258 km. C’est la première année où je ressens le besoin d’une préparation mentale. J’ai eu besoin de ce coach qui m’a fait énormément de bien pour arriver à ma 15e place mondiale. D’autant plus qu’un mois et demi avant, je me suis cassé la clavicule à vélo lors de l’entraînement. Les médecins m’ont mis une plaque et deux jours après, je suis allé recourir. J’ai réussi à reprendre mon cycle d’entraînement et malgré ma chute, et la facture qui m’a handicapé pendant deux semaines, j’ai réussi, grâce au coach mental, grâce à la famille, grâce à toutes les personnes qui sont autour de moi, à surmonter cette épreuve.

Avez-vous songé à devenir professionnel, à vivre du sport ?

Je n’ai jamais eu la prétention d’en vivre. Et je ne me suis jamais vendu pour pouvoir passer professionnel. Ça ne m’intéressait pas, surtout qu’à ce moment-là, j’ai été rattrapé par l’entreprise familiale. J’ai repris la société à 31 ans.

Donc l’entreprise a toujours été là, dans un coin de votre tête ?

Enduiest est une entreprise familiale, créée par mon père dans les années 80. Dans nos discussions, à la maison, l’entreprise n’était pas souvent présente, mais peu à peu, elle est arrivée dans mes centres d’intérêt. C’est arrivé progressivement, avec la maturité. À 25 ans, lorsque j’ai commencé le triathlon, j’ai aussi commencé comme conducteur de travaux. Et avant, dans ma jeunesse, j’ai toujours été sur les chantiers.

Comment parvenez-vous à conjuguer l’agenda d’un sportif et celui d’un dirigeant ?

Je fais quasiment 15 heures d’entraînement par semaine, soit deux heures par jour au minimum. La gestion de mon agenda est particulière : je commence par poser l’organisation de mes entraînements, chaque jour, et je positionne mes rendez-vous professionnels autour. Cela m’oblige à m’entraîner et tous les clients ou mes fournisseurs, toutes les personnes qui travaillent avec moi savent que je ne déplacerais jamais un entraînement.

Quel regard les collaborateurs portent-ils sur votre engagement dans le sport ?

Dans l’entreprise, certains me connaissent depuis que je suis tout petit. D’autres m’ont connu quand j’avais 15 ans, sur l’échafaudage, donc ils connaissent mon passé et mon présent. Et il y a toujours des questions, des encouragements, des félicitations. Que ce soit dans les bureaux ou sur les chantiers, tout le monde me suit. Et je ne me cache pas. Au repas de fin d’année, quinze jours après les championnats du monde à Taïpei, j’ai présenté ce que j’ai réalisé. L’idée, c’était de dire : "Vous avez un patron qui n’est pas comme les autres". Si vous ne me voyez pas, c’est sûrement que je suis en train de m’entraîner, en train de souffrir sur mes petites jambes.

Peut-on vraiment comparer l’engagement mis dans le pilotage d’une entreprise et celui qu’on peut mettre dans le sport ?

Complètement. La clé, c’est d’être bien entouré. C’est mon entourage qui me permet d’avancer, dans l’entreprise comme dans le sport. Il y a des personnes compétentes autour de moi, qui me permettent de monter en gamme et d’atteindre mes objectifs. Il y a encore quelques années en arrière, j’avais du mal à déléguer. Je faisais tout et je ne le faisais pas forcément toujours très bien. Maintenant, plus je fais du sport, plus je délègue, donc je donne des tâches aux personnes qui ont les capacités, et ils m’en rendent dix fois plus. Ça fait 5 ans que je travaille avec mon coach et ça fait 5 ans que je progresse d’année en année. Et je suis en train de faire la même chose au sein de mon entreprise. Je suis le coach et je fais progresser les gens qui sont autour de moi.

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