La crise viticole et la baisse de la consommation de vin semblent, paradoxalement, profiter au logisticien girondin Dartess (30 M€ de CA en 2023, 290 salariés). Spécialiste du conditionnement, du stockage et du transport de bouteilles de vin et spiritueux, la société, filiale du groupe Tesson, est en train de construire un gigantesque entrepôt climatisé de 18 000 m2 dont elle sera locataire pour conserver de grands crus et spiritueux dans la zone d’activité de Blanquefort, où se situe déjà son siège social.
Deux de ces trois cellules, qui abriteront 12 millions de bouteilles sur cinq étages, sont déjà remplies - en prévisionnel - avant même l’ouverture en juin. En parallèle, Dartess fait aussi bâtir une autre plateforme logistique de 12 000 m2 à Izon, dans le Libournais (Gironde), d’une capacité de 10 millions de bouteilles et attendue pour janvier 2025.
Croissance effrénée
"Depuis quatre ans, nous avons investi quasiment 20 millions d’euros dans les nouvelles plateformes (Les Artigues-de-Lussac, Bruges 4, Blanquefort) pour atteindre aujourd’hui 130 000 m2 de surface logistique", souligne Frédéric Lanteri, directeur général de Dartess. "La logistique en général reste un secteur porteur, c’est le premier employeur en France. Nous faisons partie des niches à forts volumes" ajoute-t-il, révélant que l’inflation a été répercutée sur les prix des services proposés, sans dire à quelle hauteur.
Au moment même où les ventes s’affaissent dans un vignoble bordelais en surproduction faisant face à une crise profonde et souhaitant arracher près de 10 000 hectares, Dartess table ainsi sur une croissance de son activité de 50 % pour atteindre un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros dans cinq ans.
Solution de substitution
Pourquoi ? La réponse semble tenir en un mot : l’externalisation. "Lorsqu’une filière est en difficulté, les opérateurs souhaitent déléguer et réduire leurs charges fixes. Nous proposons des tarifs segmentés qui permettent à nos clients de payer pour ce qu’ils consomment", explique le dirigeant.
Dartess gagne ainsi de nouveaux clients "de crise" soucieux de réduire leurs coûts fixes, qui restent élevés peu importe leurs volumes de ventes. "Ils préfèrent investir dans le produit, le marketing et la vente et sous-traitent la logistique", ajoute Alvaro Betanzos, directeur commercial.
Ainsi, La Compagnie Médocaine des Grands Crus (27 collaborateurs, 53 M€ de CA), négociant et filiale d’Axa Millésimes, opère un regroupement logistique et va occuper un tiers du nouvel entrepôt de Dartess à Blanquefort. La logique a cependant ses limites : "Si nos clients ne vendent plus, ce n’est pas bon non plus pour nous à moyen terme. On a besoin d’avoir des mouvements pour garder un bon équilibre".
Déploiements territoriaux
Bilan : avec 292 millions de bouteilles traitées en 2023, Dartess a doublé ses volumes en cinq ans, tout comme ses effectifs. Si l’entrepôt de Blanquefort doit regrouper 25 à 30 personnes en vitesse de croisière, la société, aussi présente à Paris et qui développe ses activités en Bourgogne, Auvergne-Rhône-Alpes, Pays de Savoie et Côte d’Azur, espère investir de nouveaux territoires. "Nous étudions le Languedoc, la demande est aussi importante dans le Sud de la Vallée du Rhône, un site de distribution lillois pourrait également nous aider à couvrir le Lyonnais. À l’export, nous pourrions nous développer en Espagne", termine Frédéric Lanteri.
