Cixten a mis au point une machine utilisant les propriétés du CO2 supercritique : amené à une pression de plus de 75 bars, ce gaz est en effet très réactif aux variations de températures. Le différentiel entre la température ambiante et la chaleur dégagée par une installation industrielle est ainsi mis à profit pour actionner un circuit hydraulique et faire fonctionner un générateur ou produire de l’air comprimé.
Le concept a été breveté fin 2021. Depuis, la jeune pousse de sept salariés multiplie les succès, décrochant un premier soutien de la Région Grand Est et de la BPI (bourses start-up et French tech émergence), plusieurs concours d’innovation régionaux (dont le programme EDF Pulse Grand Est) puis nationaux, avec le concours I Lab de France 2030 et l’appel à projets "industrie bas carbone" de l’Ademe. Elle a obtenu un prêt d’amorçage du groupe Crédit Mutuel - CIC et prépare désormais une première levée de fonds auprès d’investisseurs privés pour financer le déploiement de son projet pilote, d’une capacité de 30 kW, prévu début 2025.
Un projet passé sous les radars
C’est pourtant dans un garage que tout a commencé. Pendant deux ans, les trois fondateurs de Cixten, Philippe Wagner et Pierre-Yves et Alexia Berthélémy, ont financé leur preuve de concept sur leurs fonds propres. Pendant toute cette période de validation technique, leur projet est passé sous les radars de l’écosystème alsacien d’accompagnement des start-up, avant d’intégrer le Semia fin 2021, brevets en poche. "C’est une stratégie totalement assumée. L’expérience nous a donné raison : en 2022, nous avons passé beaucoup de temps à structurer l’entreprise ; il aurait été impossible de réaliser simultanément notre preuve de concept", indique Pierre Berthélémy, directeur général de Cixten.
Utiliser l’énergie existante plutôt que d’en produire davantage
Cet ingénieur en R & D s’est lancé dans le projet par esprit d’engagement. Comme son ami Philippe Wagner, il travaillait auparavant chez l’équipementier allemand Schaeffler, spécialisé dans les transmissions. Mais l’un et l’autre voulaient mettre leurs compétences au service d’objectifs plus significatifs que le secteur automobile. "On cherche beaucoup à produire de l’énergie verte, mais il faudrait avant cela mieux utiliser celle qui est déjà produite. Il existe des solutions de récupération de chaleur s’appliquant aux gros écarts de température, mais elles ne sont pas adaptées aux températures plus basses. En employant du CO2 pour valoriser de la chaleur fatale, on utilise deux déchets industriels pour produire de l’énergie ; c’est un concept qui fait vraiment sens", explique-t-il.
De l’industrie agroalimentaire à la chimie, des applications multiples
Industrie agroalimentaire, filière bois et papier, chimie : le gisement d’énergie fatale restant à valoriser est aussi important pour les températures inférieures à 100 °C que pour les températures plus élevées. Cixten fait le pari d’une solution simple d’utilisation, qui ne modifie pas les process industriels de ses clients puisqu’elle se greffe sur les rejets d’effluents et peut être modulée selon la puissance souhaitée. Des discussions sont en cours avec une boulangerie industrielle et une papeterie pour l’installation d’une première machine pilote. La start-up a intégré en début d’année les locaux du groupe Pfister (CA 2020 : 7 M€) à Hoerdt, qui réalise l’usinage de certains composants de son prototype. Elle vise un retour sur investissement de 3 à 5 ans, hors subventions.
