Connu comme marque de mode et de jeans haut de gamme, le fabricant lozérien Atelier Tuffery (31 salariés, CA 2022 : 3,6 M€) enchaîne les initiatives, depuis 2016, pour ancrer toujours plus sa production dans le territoire. Après la mise en point, en collaboration avec la société coopérative lotoise VirgoCoop, d’un denim (toile de jean) intégrant la production de chanvre textile, il franchit un nouveau cap dans sa stratégie de sourcing tournée vers des alternatives durables au coton de l’industrie textile.
Ressusciter la fibre française
Dans une démarche complémentaire à son partenariat avec les éleveurs de brebis de race Lacaune, Atelier Tuffery veut "ouvrir un nouveau gisement de laine" en Lozère. À cette fin, la PME investit 200 000 euros pour reprendre la ferme familiale Tuffery (surface : 400 ha), restée en gérance depuis plus de 30 ans. L’investissement permettra d’y installer une exploitation qui devrait à terme compter environ 400 brebis de race Mérinos et produire 2 tonnes de laine brute. "La France a perdu son rang de leader mondial de la laine depuis les années 1970. Le lobbying de la fibre coton et de la fibre synthétique a conduit à l’abandon d’une fibre locale. Nous voulons être les reconstructeurs de cette filière. Avec l’installation de ce troupe, la production de laine sera, plus que la viande, la principale source de valorisation de la ferme", se projette Julien Tuffery, PDG de la PME familiale.
Un type de laine très qualitatif
Ce projet s’inscrit dans la démarche territoriale d’Atelier Tuffery d’intégrer, depuis des décennies, toutes les étapes de la fabrication textile en France. À la filière déjà formée avec des partenaires référents sur le territoire national, le fabricant veut donc rajouter une nouvelle filière appelée à grandir en agrégeant d’autres élevages ovins locaux, et en les incitant à se tourner à nouveau vers la race Mérinos. De la même façon, la laine issue de ce nouveau "gisement" sera tissée en intégralité en Occitanie. "La laine Mérinos, plus soyeuse, permettra par exemple à Atelier Tuffery d’étoffer sa gamme de produits, en lançant des T-shirts, des petits pulls, des châles ou des tissus d’ameublement", imagine le dirigeant.
Un projet à forte densité écologique
Pour faire vivre ce nouveau circuit court, Atelier Tuffery mise également sur la dimension agropastorale. La PME s’associe à Xavier Julien, agriculteur vigneron du Mas de Janiny basé à Saint-Bauzille-de-la-Sylve (Hérault), pour organiser la future transhumance de son troupeau. Plutôt que de rester enfermées en hiver comme le veut la pratique, les brebis pourront venir pâturer dans cette exploitation bio, couverte d’herbe à l’année. Deuxième avantage du projet : plutôt que de mobiliser des terres pour produire le fourrage nutritionnel des brebis en hiver, la démarche d’Atelier Tuffery libérera ces surfaces pour lancer également, sur la ferme, une production céréalière. "L’urgence économique est partout. Demain, nous aurons des tensions mondiales sur le coton. Il faut donc trouver des alternatives et construire à long terme. De sorte que la mode la plus esthétique soit aussi la plus écologique", espère Julien Tuffery.
