En novembre 2012, après avoir exercé différents métiers dans la filière du vin, Christophe Guicheteau lance la société Mon caviste à la maison, un concept de vente de vins en réunion à domicile. Novatrice, l’idée séduit et l’entreprise, en mode start-up, connaît une forte croissance, avec rapidement 23 salariés et quelque 380 vendeurs indépendants dans 70 départements. « Le concept était idéal, avec un taux de conversions de 85 à 90 % des invités en clients, affirme l’entrepreneur angevin. Nous avions même lancé pour l’été 2016 « Mon caviste au camping ». Mais nous sommes allés trop vite et la masse salariale était trop importante. Nous aurions aussi dû embaucher des professionnels du vin plutôt que des spécialistes de la vente directe. »
Quand la solitude veille...
Une première levée de fonds de 1,5 M€ est réussie en 2015, et une seconde est prévue l’année suivante, de 2,5 M€ cette fois. Mais la machine s’enraie. Mon caviste à la maison n’obtient que 1,2 M€, un actionnaire se retire et, rapidement, c’est la dégringolade : mise en redressement judiciaire en juillet 2016 après cessation de paiements, l’entreprise est liquidée en septembre. Christophe Guicheteau accompagne pendant moins de trois mois les repreneurs des actifs puis démissionne en janvier 2017 : « Les dégâts collatéraux arrivent alors, confie-t-il : plus de revenu, le RSI qui vous rattrape, pas de droit au chômage, expulsion, demande de RSA… Les réseaux aussi se coupent puisque l’on n’a plus le statut de dirigeant, et ça, c’est une claque supplémentaire ! Si les amis sont là, la solitude veille et on peut facilement plonger avec un profond sentiment de honte et la sensation d’être un loser. »
Repartir d’une page blanche
Début 2017, pendant deux mois, l’ancien dirigeant se replie un peu sur lui-même, lit, écrit, réfléchit, « bouffe » des séries télévisées, aussi… Une de ses relations lui parle alors de l’antenne nantaise de 60 000 Rebonds. Il prend contact, passe un entretien et entame un accompagnement de six mois en avril 2017. Épaulé par un parrain, Yves Krotoff, ancien président du directoire du groupe nantais Lacroix, il alterne alors rendez-vous individuels et rencontres collectives aux côtés d’autres personnes comme lui, « en rebond » : « Cela permet de rompre l’isolement, de partager les expériences. Souvent, les problèmes rencontrés par les gens sont les mêmes, quelles que soient les circonstances et les parcours. J’ai pu reconstruire le socle, assumer mes responsabilités en découvrant que si j’avais l’impression d’avoir tout perdu, j’avais quand même conservé mes compétences. À 45 ans, il fallait repartir d’une page blanche, certes avec mes dettes mais aussi avec mon expérience. » Au cours de cette période, l’ancien dirigeant reprend confiance, clarifie et peaufine son projet de reconversion, le challenge aussi auprès de bénévoles de l’association, « bienveillants mais sans complaisance », reconnait-il.
« J’ai reçu, donc je donne »
Depuis juin 2018, Christophe Guicheteau est maintenant consultant en mécénat. Il accompagne dans toute la France des associations et des fondations pour qu’elles mettent en place des collectes de fonds durables. De même, il aide des entreprises à définir les sujets d’intérêt général qu’elles pourraient accompagner dans le cadre du mécénat. Lui qui a été courtier en vin est devenu courtier en intérêt général. « Consultant junior expérimenté », comme il se définit avec humour. Il s’est même inscrit à l’Essec de Paris pour y obtenir le Certificat français du fundraising. Une formation dans le secteur de la collecte de fonds qu’il a financé avec sa première mission… Fort de son histoire, il a souhaité lancer en Maine-et-Loire une antenne de 60 000 Rebonds, qui a vu le jour en novembre dernier. Elle accompagne déjà une demi-douzaine d’entrepreneurs qui ont connu la liquidation. L’ancien dirigeant de Mon caviste à la maison y consacre une demie à une journée par semaine. « J’ai reçu, donc je donne, résume-t-il. Sans ce soutien, j’aurais eu beaucoup plus de difficultés à me reconstruire. »
60 000 Rebonds s’implante dans le Maine-et-Loire
En 2018, 33 000 liquidations judiciaires ont été prononcées en France, dont 294 dans le Maine-et-Loire. Née en 2012, l’association 60 000 Rebonds a été créée à la fois pour accompagner les dirigeants après liquidation de leur société mais aussi pour faire évoluer le regard porté sur l’échec. En Maine-et-Loire, le 6 novembre 2019, sous l’impulsion de Christophe Guicheteau, est née l’antenne angevine de l’association 60 000 Rebonds Grand Ouest, basée à Nantes.
« Pour ma part, j’ai suivi cet accompagnement à Nantes, précise Christophe Guicheteau, ce qui peut s’avérer un frein pour un dirigeant en rebond. Les déplacements ont un coût et cela demande également du temps. Une antenne dans le Maine-et-Loire était très attendue car il est important que le dirigeant puisse rebondir dans son propre écosystème ». Soutenue par la CCI, des fédérations professionnelles, des banques et de nombreux réseaux locaux, elle est composée d’un bureau de 10 personnes, toutes bénévoles. Elle s’appuie sur les trois salariés de l’antenne régionale basée à Nantes et sur un réseau de coachs, de parrains et d’experts. 60 000 Rebonds Grand Ouest a signé une convention avec la CCI du Maine-et-Loire, qui lui apporte entre autres un soutien logistique avec la mise à disposition d’un bureau et de salles de réunion. présente dans 30 départements, l’association a accompagné l’an passé en France 700 chefs d’entreprise.
Contact : @email
Régine Rouillon : 02 51 17 43 72 @email
