« Diriger la société », mais aussi « établir un diagnostic indépendant portant notamment sur la situation financière et juridique de la société, afin de faire le point complet sur la situation entre ses actionnaires de contrôle et leurs créanciers » : c’est une lourde tâche qui attend les deux administrateurs provisoires de la société Baccarat qui viennent d’être nommés. Le 7 septembre, le tribunal de commerce de Nancy a en effet désigné Frédéric Abitbol pour la SCP Abitbol & Rousselet et Christophe Gelis de la SELARL Krebs-Suty-Gelis pour lever le voile sur la situation du fabricant d’objet de luxe en cristal, plongé désormais en pleine tourmente.
Situation suivie depuis Bercy
Les administrateurs ont quatre mois pour faire un premier rapport au président du tribunal de commerce : l’assemblée générale du 17 septembre, au cours de laquelle les créanciers chinois de la maison-mère de Baccarat, Fortune Fountain Capital, voulaient reprendre le contrôle de la gouvernance, est annulée. Sur les 164 millions d’euros mis sur la table par les dirigeants de la société Fortune Fountain Capital - la famille Chu - pour racheter Baccarat en 2018, près de 80 millions avaient été empruntés auprès de deux fonds, basés à Hong Kong, Tor Investment Management et Sammasan Capital. Les échéances du prêt n’ont pas été honorées et les 20 à 30 millions d’euros d’investissement promis pour rénover l’outil industriel de Baccarat ne se sont jamais concrétisés.
La situation au sein de la manufacture de Baccarat est suivie au plus haut niveau de l’État : une délégation composée du député Thibault Bazin (LR), le maire de Baccarat Christian Gex, ainsi que les représentants de l’intersyndicale, est allée rencontrer le délégué interministériel Marc Glita à Bercy. La date du 17 septembre, attendue comme un moment clé pour déverrouiller la situation, a été annulée par l’ordonnance du tribunal : il faudra désormais attendre que les administrateurs provisoires rendent leur rapport. Ou que la dirigeante du « family office » Fortune Fountain Capital, la chinoise Coco Chu, refasse surface et s’explique sur sa gestion. Les comptes de l’entreprise montrent notamment que la famille Chu a fait remonter 10 millions d’euros de Baccarat vers leur « family office ». De même, tous les observateurs du dossier s’inquiètent des agissements du mari de Coco Chu, Zhen Sun, ou Jack Sun, président et directeur général par intérim de la société depuis le départ de Daniela Riccardi.