Rhône-Alpes : Eric le Jaouen : " Je veux incarner l'unité du Medef Rhône-Alpes"

Rhône-Alpes : Eric le Jaouen : " Je veux incarner l'unité du Medef Rhône-Alpes"

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Face à Patrick Martin (lire son interview ici), le Stéphanois Eric le Jaouen, fondateur et dirigeant du cabinet de recrutement Ginkgo (5 salariés), veut incarner un autre style dans la course à la succession de Bernard Gaud, pour la présidence du Medef Rhône-Alpes. Dans un contexte de probable fusion avec le Medef Auvergne, il entend fédérer les troupes pour donner une nouvelle envergure à l'organisation régionale. Les élections devant les 28 représentants des branches professionnelles et les huit électeurs des Medef de territoire (plus éventuellement les quatre territoires et les 6 branches auvergnates) se tiendront le 21 juin prochain.
— Photo : Le Journal des Entreprises

Patrick Martin, votre concurrent, s’est attaqué récemment, dans nos colonnes, à votre candidature en mettant notamment en exergue la taille et le développement de votre entreprise. Que répondez-vous ?
Je ne souhaite pas entrer dans ce débat. On ne demande pas au président du Medef d’être un expert en développement d’entreprise. On lui demande d’avoir suffisamment de sens politique pour fédérer. Au Medef, la taille moyenne des entreprises adhérentes est de douze salariés ! En enlevant l’Ile-de-France de ces statistiques, on tombe même peut-être à 8 ou 9 …

Pour ma part, je crois aux vertus des équipes. On ne peut pas tout faire seul. Je dispose de compétences sur un certain nombre de domaines, notamment sur la vie des TPE et PME. J’en ai moins, c’est vrai, sur la vie des ETI et grands groupes, même si je compte des entreprises de cette taille parmi mes clients. Un président ne peut ni tout savoir, ni tout maitriser. Avec une bonne équipe, l’ensemble des besoins peut être couvert. Le Medef Auvergne Rhône-Alpes, sera constitué d’un bureau de 10 personnes tout de même !

Il me semble que la situation du pays et de la région appelle à l’unité et au rassemblement, plutôt qu’aux divisions. Un certain nombre d’indicateurs sont plus mauvais en France que dans les autres grands pays européens : le chômage, les exportations… A un niveau plus local, nous sommes en train de fusionner deux régions, deux politiques, deux Medef régionaux… Tout cela me conforte dans l’idée que nous avons besoin d’ unité. Je souhaite incarner cette vision-là du Medef. Je reconnais humblement qu’il y a des choses que je ne sais pas faire. Mais je sais parfaitement rassembler les individus.


Quels sont vos points de divergences avec Patrick Martin ?
Je vous le dirai quand j’aurai vu son programme.

Depuis combien de temps songez-vous à vous présenter à ce titre de Président ?
Bernard Gaud (président sortant du Medef Rhône-Alpes NDLR) m’en a parlé cet automne, à la Toussaint. Après réflexion, j’ai décidé de construire une candidature plus axée sur un programme que sur ma personne moi. Et sur la base de contacts pris très tôt avec les Auvergnats. Mon programme est le résultat d’une co-construction avec plusieurs branches et plusieurs territoires. Je l’ai diffusé, depuis plusieurs mois déjà, aux personnes qui vont voter le 21 juin prochain. Chaque semaine, depuis deux mois, je leur fais des piqures de rappel avec des zooms sur des points précis du programme.


Le fait de ne pas être Lyonnais est-il un handicap pour votre élection ?
Lyon, qui représente 20% du poids économique de la région, doit donner l’exemple, être une locomotive. J’ai toujours œuvré à trouver des collaborations avec le territoire lyonnais mais Lyon doit accepter de ne pas être seul décisionnaire. En Auvergne Rhône-Alpes, il y a aussi Clermont-Ferrand, Grenoble, Saint-Etienne, Annecy, Oyonnax… Il est vrai que ce serait une première, je pense, que le président du Medef Rhône-Alpes ne soit pas un représentant du monde lyonnais.


Est-ce que les instances nationales du Medef interviennent dans cette élection ?
Non certainement pas. Dans la mesure où les fondamentaux éthiques et moraux sont respectés, il n’y aura aucune interférence.


Vous étiez seul en lice depuis plusieurs mois, Patrick Martin s’est déclaré fin mars. Que pensez-vous de cette concurrence tardive?
Effectivement, Patrick s’est déclaré en avril et m’a appelé pour me prévenir. En tant que chef d’entreprise, je ne suis pas gêné par la concurrence. C’est stimulant dans la mesure où le débat repose sur les idées et non sur les personnes. Avec Patrick, nous incarnons deux visions différentes qui existent au Medef. Cette diversité de points de vue, d’expériences est une réalité au sein de notre organisation. Nous devons débattre des idées, du programme et ne pas porter de jugement personnel l’un sur l’autre car toutes les expériences entrepreneuriales sont respectables.


Quel regard portez-vous sur le président sortant, Bernard Gaud ?
Comme vice-président et trésorier j’ai participé activement à cette mandature. Je pense que le Medef Rhône-Alpes, sous sa présidence, a assis sa place au niveau national. Nous sommes présents dans les réunions nationales et avons fait progresser la prise en compte des voix des Medef territoriaux. Nous occupons aussi plusieurs mandats nationaux, qui nous apportent une forte crédibilité.


Le Medef Rhône-Alpes a néanmoins perdu son siège au conseil exécutif du Medef national…
Le conseil exécutif est constitué de 46 personnes dont 12 représentants des territoires. Jusqu’à peu, la direction nationale choisissait ces représentants de façon unilatérale et sans contrainte. Aujourd’hui, le cadre a été resserré : il faut quatre présidents de Medef régionaux, quatre présidents de Medef métropolitains et quatre présidents de Medef locaux. Dans ce nouveau cadre-là, il semblait absolument logique que Lyon, première métropole, soit représentée. Le Medef Rhône-Alpes y était d’ailleurs totalement favorable. Pour préserver les équilibres, le Medef national nous a fait comprendre que ce serait bien que le Medef Rhône-Alpes se retire. Nous n’avons donc plus notre siège.

Je considère néanmoins que la place du Medef Rhône-Alpes est au conseil exécutif. Nous sommes parfaitement légitimes. Nous devons travailler, mériter cette place et incarner une région sur laquelle le Medef national peut s’appuyer.


Quelles sont vos ambitions, quels seront vos axes de travail si vous êtes élu ?
Le Medef Auvergne Rhône-Alpes doit être exemplaire dans l’incarnation de la représentation des entreprises. Cela signifie que notre gouvernance et notre fonctionnement sur notre cœur de métier c’est-à-dire le lobbying politique et la gestion des mandats, doit être irréprochable. Nous devons par exemple mieux accompagner nos mandataires, avoir plus de liens avec eux. Nous devons également améliorer notre process de désignation des mandataires

Au niveau national comme au niveau local, nous avons perdu des militants. C’est vrai aussi dans les autres organisations syndicales. Nous avons une du mal à développer le militantisme patronal mais nous ne devons pas abandonner. Je suis toujours étonné de voir à quel point les chefs d’entreprise ont une connaissance assez faible du corpus idéologique doctrinal de la maison, de l’histoire du patronat… Si nous voulons peser sur des décisions politiques nationales, il faut que nous ayons en région suffisamment d’expertise.
Aujourd’hui, qui a lu Schumpeter parmi nos adhérents ? Pas beaucoup… Qui a lu Marx à la CGT ? Beaucoup… Nous ne luttons pas à armes égales là-dessus. Bien sûr, nous avons tous envie de tourner la page sur ces doctrines anciennes mais je crois que nous avons besoin d’un minimum d’idéologie pour penser l’avenir. Je souhaite que l’on recherche collectivement des moyens pour ressemer collectivement ces graines-là.


Quelles seraient vos actions plus concrêtes ?
Nous avons besoin que le Medef Auvergne Rhône-Alpes soit une plateforme de services. Il faut réaliser pleinement notre transformation numérique dans les trois ans. C’est désormais indispensable vu la taille de cette nouvelle grande région.
Je veux construire un bouquet de services en direction des branches et des territoires afin que chaque entreprise puisse avoir le même niveau de services, quel que soit le lieu où elle est implantée.


Quel serait le rôle du Medef Rhône-Alpes-Auvergne sur le territoire ?
Notre Medef doit être un territoire d’expérimentation compte tenu de notre taille importante. L’échelon national doit pouvoir s’appuyer sur nous pour faire ensuite des propositions. Le Medef Rhône-Alpes doit être en première ligne, par exemple sur des expérimentations concernant l’apprentissage ou l’international. Avec la disparition d’ERAI, les cartes ont été rebattues. C’est peut-être le moment d’expérimenter de nouvelles formes d’accompagnement de nos entreprises à l’international.


Sur quels soutiens pouvez-vous comptez ?
Je ne peux pas vous donner de noms mais j’ai des soutiens importants aussi bien dans les territoires que dans les branches.

Le Medef Rhône-Alpes a validé récemment la fusion avec l’Auvergne. L’Auvergne doit se prononcer à son tour le 30 mai.Comment s’annonce ce vote ? Le résultat est stratégique dans l’élection du nouveau président…
Il faudra attendre la fumée blanche pour connaître le choix des Auvergnats ! Ils sont souverains. Tout ce que je sais, c’est que Pierre Gattaz a demandé à ce que les Medef territoriaux s’organisent pour avoir 13 Medef régionaux seulement au 15 juillet. Nous sommes dans le bon timing.


La fusion avec l’Auvergne devrait vous permettre de bénéficier de soutiens supplémentaires …
Je ne sais pas… J’ai construit un projet Auvergne Rhône-Alpes, mon projet leur convient puisque des Auvergnats y ont travaillé.


Etes-vous confiant concernant cette élection à la présidence du Medef Rhône-Alpes ou Auvergne Rhône-Alpes ?
Il s’agit d’une élection, donc rien n’est joué, mais je ne suis pas inquiet.