2007-2017 : après dix ans de crise, où en est-on ?
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2007-2017 : après dix ans de crise, où en est-on ?

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Que reste-t-il de la crise économique mondiale née pendant l'été 2007 ? Chômage, investissement, production, défaillances : la France a-t-elle retrouvé son niveau d'avant-crise ? Décryptage en chiffres et témoignages d'entrepreneurs.

Photo : Joshua Ness - CC Unsplash

Elle a d'abord été financière, entraînée par le blocage du marché interbancaire en juillet 2007 et l'éclatement de bulles spéculatives (les « subprimes » aux États-Unis, le marché immobilier espagnol). Au fil des mois, la crise a gangréné l'ensemble de l'économie américaine pour finalement se muer en phénomène mondial impactant durablement la plupart des secteurs d'activité. Dix ans plus tard, quelles conséquences la crise a-t-elle eu sur l'économie française ? Les entreprises hexagonales se sont-elles relevé de dix années d'atonie économique ?

Une production toujours en berne

Le BTP et l'industrie ont payé et payent encore le plus lourd tribut à la crise. Les derniers chiffres de la production française publiés par l'Insee mi-août parlent d'eux-mêmes. Si sur un an, entre le deuxième trimestre 2016 et le deuxième trimestre 2017, la production industrielle augmente de près de 2 %, le constat sur dix ans est bien plus noir. Entre juin 2007 et juin 2017, l'indice de production industrielle a chuté de 10,6 % dans l'industrie en général, de 11,5 % dans l'industrie manufacturière et de 19 % dans la construction. Il faut remonter au milieu des années 1990 pour retrouver des niveaux de production aussi bas... « La chute de la construction a fortement affecté négativement l'emploi et la croissance du PIB », alertait en janvier la Banque de France. En effet, l'investissement en construction est à son plus bas niveau depuis trente ans (11 % du PIB), même s'il arrête enfin de dégringoler depuis 2016.

Un taux de chômage toujours haut

Une situation qui a évidemment des incidences sur l'emploi. En dix ans, le taux de chômage en France (chiffres Insee), qui atteignait 7,3% de la population active au début de l'année 2008, n'a cessé d'augmenter, grimpant à 9,5 % fin 2009 pour battre le « record » de 10,5 % en 2013 et à nouveau en 2015. Depuis deux ans, l'amorce de la reprise a permis de retrouver un niveau plus « raisonnable » : 9,5 % de la population active au deuxième trimestre 2017, soit son niveau de début 2012.

Moins de défaillances d'entreprises

Malgré ce sombre tableau, poignent quand même à l'horizon des signaux forts, qui laissent entrevoir une sortie de crise, lente mais indéniable. En 2016, le nombre de défaillances d'entreprises (ouvertures de procédures de type sauvegarde, redressement ou liquidation) est retombé sous le plancher des 60 000 pour la première fois depuis début 2009 (58 000 en 2016). La croissance du PIB retrouve des couleurs et devrait dépasser les prévisions cette année. La création d'emplois dans le secteur privé atteint des records : 292 000 emplois créés sur les douze derniers mois - ce qui n'était pas arrivé depuis fin 2011 - dont 91 700 nouveaux postes rien que pour le deuxième trimestre 2017. Des signes positifs qui ont un effet sur le climat des affaires, cet indicateur que les chefs d'entreprise scrutent à la loupe pour sentir la tendance et anticiper leurs investissements. Cet indicateur avait par exemple chuté de 115 à 69 entre mi-2007 et début 2009, en pleine crise économique. Depuis, il remonte peu à peu et vient d'atteindre en août un niveau inédit depuis avril 2011 (109 points).

Des investissements qui redémarrent

Les investissements des entreprises ont eux aussi repris du poil de la bête depuis quelques années : malgré l'arrêt en avril dernier de la mesure de suramortissement (déduction fiscale accordée aux entreprises en cas d'investissement productif), les industriels prévoient en 2017 d'augmenter leurs dépenses d'investissement de 7 % par rapport à 2016, selon les estimations de l'Insee. Les prévisions d'investissement atteignent leur plus haut niveau depuis 2003.

Des embauches en hausse dans les PME

Si l'on s'attarde en particulier sur les PME, la situation semble aujourd'hui s'améliorer durablement. Selon Bpifrance, qui analyse la santé économique des petites et moyennes entreprises, l'activité ne cesse d'accélérer depuis cinq semestres. Elle dépasse pour la première fois depuis 2011 son rythme de long terme. Les PME accélèrent même le rythme des embauches, revenant sur des niveaux d'avant-crise. « La France redémarre », s'enthousiasmait le ministre de l'Economie Bruno Le Maire sur Twitter le 20 août. Mais même au sommet de l'Etat, on sait rester prudent : « Les indicateurs sont positifs mais notre économie reste trop fragile pour affronter un éventuel retournement de conjoncture mondiale », a-t-il ensuite concédé dans un entretien le 25 août. Si le « colosse » France recommence à pouvoir marcher sur ses deux pieds, la convalescence prendra encore quelques années.

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