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Olivier Dhez (HRS) : "Devenir leader européen de la station hydrogène"
Interview Grenoble # Industrie

Olivier Dhez directeur général délégué d’HRS "Devenir leader européen de la station hydrogène"

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Quelques mois après avoir réalisé la plus grosse introduction en Bourse sur Euronext Growth, le fabricant isérois de stations de recharge à hydrogène, HRS, veut devenir le leader européen d’un marché porté par des plans de relance nationaux colossaux.

Olivier Dhez, directeur général délégué d’HRS, prévoit de poser la première pierre du futur site de production d’ici à la fin de l’année — Photo : Samuel Moraud

HRS (Champ-sur-Drac en Isère ; 41 salariés) a publié mi-juillet des résultats annuels prometteurs (CA en hausse de 309 % à 10,5 M€), cinq mois après son entrée en Bourse sur Euronext Growth grâce à laquelle vous avez levé 73,6 millions d’euros. Quel bilan tirez-vous de cet exercice ?

C’est une année record pour HRS. Nous atteignons l’objectif de revenus annoncé au moment de l’IPO (en février 2021). Les plus de 73 millions d’euros levés vont nous permettre de financer nos projets de développement dans les prochaines années.

À horizon 2025, vous visez les 85 millions d’euros de chiffre d’affaires. Comment comptez-vous y parvenir ?

Nous avons les quatre ingrédients pour atteindre cet objectif. Le premier est de recruter, d’ici 2025, plus d’une centaine de personnes. Le deuxième élément est de continuer à développer des produits performants comme notre station H200 qui peut délivrer 200 kg d’hydrogène par 24 heures et correspond aux besoins actuels des véhicules utilitaires légers, taxis et bus. Nous développons également de nouvelles stations de hautes capacités capables de délivrer une à deux tonnes d’hydrogène par 24 heures afin d’adresser les camions.

En plus de la station H200 qui adresse la mobilité légère (photo), HRS travaille au développement de stations cinq à dix fois plus importantes destinées aux camions — Photo : Samuel Moraud

HRS porte aussi le projet d’un site de production à Champagnier (Isère) ? Quel est le but ?

Développer nos capacités de production ! Il s’agit du troisième levier d’action. L’objectif de ce futur site, avec une pose de la première pierre en fin d’année, est simple : tripler notre capacité de production de stations. Aujourd’hui, nous pouvons en fabriquer 60 par an. Dès la fin 2022, nous atteindrons une capacité de 180 unités à l’année. Il s’agit aussi de disposer d’un environnement de travail adapté à la fabrication de ces stations de hautes capacités. Cela correspond à un investissement de 15 millions d’euros pour l’entreprise.

L’innovation est également un des autres leviers pour poursuivre votre développement ?

En effet, l’innovation est notre quatrième levier. Nous allons construire un centre de R & D unique en son genre. D’abord parce qu’il sera le premier entièrement dédié aux stations de recharge. Les travaux que nous allons y mener serviront à la montée en performance de nos stations de forte capacité. Ensuite, parce qu’il comprendra une zone d’essais et de tests de près de 2 000 m², ainsi qu’une station de recharge ouverte au public. Ce dispositif est idéal pour appréhender en direct les problématiques d’usage client et y répondre de manière efficace.

D’ici 2023, HRS se dotera d’une usine en Isère lui permettant de tripler ses capacités de production — Photo : ARA Architectes / HRS

Vous adressez aujourd’hui la mobilité routière. Quid des autres types de mobilité (ferroviaire, aérien) ?

Aujourd’hui, notre station H200 répond aux besoins du marché des véhicules légers. En parallèle, nous travaillons déjà sur les stations de forte capacité pour anticiper effectivement les usages que vous citez.

Les stations de forte capacité sur lesquels vous planchez visent-elles à répondre à la massification du marché de l’hydrogène dans les années à venir ?

Ces stations répondent à l’évolution du marché de la mobilité hydrogène. Les premiers véhicules (utilitaires, taxis, …) embarquent 5 kg d’hydrogène tandis qu’un car ou un camion peut en transporter six à dix fois plus. Le développement des véhicules lourds dans la mobilité hydrogène nécessite donc des stations de recharge d’une tonne au moins afin de remplir jusqu’à une trentaine de véhicules par 24 heures.

HRS prévoit d’ouvrir des bureaux en Allemagne, en Espagne et au Portugal. Quelles sont vos ambitions à l’international ?

Notre ambition est de devenir leader européen. Nous souhaitons procéder par ordre pour maximiser la rentabilité de nos investissements. Nous recevons déjà des demandes de Pologne, de Hongrie, d’Allemagne, d’Espagne et du Portugal. L’Italie, la Suisse, les Pays-Bas et la Belgique sont également intéressés. Nous étudierons ensuite l’opportunité de nous concentrer sur d’autres pays.

"Il nous semble préférable d’adresser la Chine après avoir construit un projet et défini les moyens associés."

Et concernant les marchés plus éloignés ?

Nous avons déjà des contacts pour adresser le marché asiatique. Aujourd’hui, nous concentrons notre développement commercial sur le marché européen mais nous ne nous interdisons pas d’étudier un élargissement à d’autres zones du monde. On s’interroge sur le timing pour y répondre.

Installé au sud de Grenoble à Champ-sur-Drac, HRS conforte son implantation iséroise en faisant construire sa future usine à Champagnier, à proximité de son siège social actuel — Photo : Samuel Moraud

Sur quoi votre hésitation porte-t-elle ?

Compte tenu des demandes et de notre outil de production, nous aurions la capacité d’y répondre. Il nous semble préférable d’adresser la Chine après avoir construit un projet et défini les moyens associés. Nous menons actuellement cette réflexion.

Vous prévoyez d’allouer 20 % de la levée de fonds à des projets d’acquisitions. Quels types de projets sont ciblés ?

Notre stratégie de croissance externe est double. Nous souhaitons d’une part acquérir des savoir-faire complémentaires afin de renforcer les barrières à l’entrée et sécuriser de nouvelles technologies de compression ou de froid, par exemple. D’autre part, le but est de déployer un réseau de maintenance avec des acteurs déjà implantés sur de nouvelles zones. Cela nous permettrait d’arriver plus efficacement sur ces nouveaux marchés.

"Il n’y a pas de bulle spéculative sur l’hydrogène, mais il y a une appétence très forte. Les valeurs en Bourse en profitent."

Vous êtes positionnés sur le programme ZEV au sein d’un groupement avec Atawey et McPhy. Ce type de projet est-il une manière de montrer votre savoir-faire ?

Le projet Zero Emission Valley est clé dans l’histoire d’HRS : c’est en partie pour lui que l’on a développé notre première station et constitué un groupement avec deux entreprises régionales. Ensemble, nous proposons une offre globale puisque Atawey a la charge des stations de petites capacités, McPhy des stations dotées d’électrolyseurs et HRS des autres stations hydrogène.

Face à des capitalisations qui s’envolent pour certaines sociétés de l’hydrogène cotées, d’aucuns évoquent une bulle spéculative autour de l’hydrogène. Qu’en pensez-vous ?

Il n’y a pas de bulle spéculative sur l’hydrogène, mais il y a une appétence très forte. Les valeurs en Bourse en profitent. Les fondements de la croissance du marché sont présents. La France met sur la table 7 milliards d’euros avec une stratégie très équilibrée de soutien à l’industrialisation et aux déploiements d’écosystèmes hydrogène complets. L’Allemagne (9 Md€ d’investissement d’ici à 2030, NDLR) a fait un choix beaucoup plus global, celui de répondre au "verdissement" de leur production électrique. À plus long terme, le développement des énergies renouvelables, indispensable pour atteindre l’objectif de neutralité carbone, implique de recourir à l’hydrogène comme moyen de stockage de ces énergies par nature intermittentes.

Qu’apportent ces plans massifs annoncés en France et en Allemagne pour la filière ?

Ces plans accélèrent énormément la demande mais également la visibilité auprès du grand public. À l’inverse des plans précédents, comme le "Plan Hulot" de 2018 par exemple, qui ne finançaient que les déploiements, quel que soit le lieu de production des véhicules notamment, les stratégies françaises et allemandes actuelles sont équilibrées. Elles prévoient de soutenir aussi bien la montée en puissance industrielle des acteurs que leur développement commercial grâce à la constitution d’écosystèmes territoriaux complets, qui mêlent parfois mobilité et décarbonation de l’industrie. La combinaison de ces deux piliers est la clé de la compétitivité européenne sur la scène mondiale, et de la réussite des acteurs de la filière, comme HRS.

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