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Le laboratoire Gattefossé parie sur les États-Unis pour tirer sa croissance à l’international
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Le laboratoire Gattefossé parie sur les États-Unis pour tirer sa croissance à l’international

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Le laboratoire lyonnais familial Gattefossé, fabricant d'actifs issus de la chimie végétale pour la pharmacie et la cosmétique, a su faire de l’internationalisation le moteur de sa croissance. Le réseau mondial de l'ETI, bientôt complété par une nouvelle usine aux États-Unis, intègre aujourd'hui recherche, production et distribution.

Ségolène Moyrand-Gros a pris en 2021 la présidence et la direction générale de Gattefossé à Lyon — Photo : Véronique Védrenne

Certifiée LEED (Leadership in Energy and Environmental Design), l’usine de 2 000 m² des laboratoires lyonnais Gattefossé à Lufkin, au Texas (États-Unis), dont la première pierre a été posée en juin 2022, devrait être opérationnelle fin 2023-début 2024. Perturbé par la crise sanitaire, ce chantier de longue haleine représente le plus gros investissement de l'histoire du fabricant lyonnais d'ingrédients cosmétiques et d'excipients pharmaceutiques (360 salariés ; 140,6 M€ de chiffre d'affaires en 2022). "En 2022, l’investissement initial avait été chiffré à 50 millions de dollars, mais il s’élèvera finalement à 80 millions de dollars à cause de la hausse des prix des matériaux et équipements", raconte Ségolène Moyrand-Gros, présidente du groupe Gattefossé, créé en 1880.

Ce qui a contraint l’entreprise sise à Saint-Priest (Rhône) à réemprunter. Heureusement, sa solidité financière lui a permis de garder une part majoritaire d’autofinancement (près de 60 %). Et elle peut compter sur la croissance du marché américain, qui représente pour l’heure "seulement" 20 % de son chiffre d’affaires.

Tout a commencé par l’achat d’un terrain de 6 hectares pour la construction d’une nouvelle usine au Texas. Une superficie "symbolique", puisqu’elle égale celle du siège de Gattefossé. "C’est la première fois que l’on crée une usine axée sur un seul métier, la chimie des lipides. À la fois très automatisée et capable de fabriquer des petits volumes, l’usine va servir d’abord le marché et le continent américains et sera un point d’ancrage pour d’autres marchés, comme l’Inde", décrit la dirigeante. Aux commandes depuis 2021, la jeune femme de 41 ans représente la 5e génération à la tête de l’entreprise familiale.

Présence commerciale dans 80 pays

Ce n’est pas la première fois que Gattefossé, qui réalise 77 % de ses ventes à l’export en 2022, s’aventure à l’international. L'ETI en a même fait un modèle de développement avec ses quatre centres techniques (ou laboratoires d’application) : France, Chine, Inde et États-Unis. Elle distribue dans 80 pays dans le monde, via 12 filiales et une cinquantaine de distributeurs.

Moteur de sa croissance, l’internationalisation lui permet d’accompagner ses clients sur leurs marchés et de développer une R & D performante. "Innover est de plus en plus compliqué aujourd’hui. On doit en permanence aller chercher des technologies, des process, des méthodes pour améliorer nos produits", confie Ségolène Moyrand-Gros. La recherche, qui emploie 25 % des effectifs (6 % du chiffre d'affaires) est organisée autour des laboratoires d’applications qui innovent main dans la main avec leurs clients.

De surcroît, Gattefossé a construit tout un écosystème avec des start-up et des centres de recherche. "Cela nous permet de mener une grande variété de travaux simultanément, pour nourrir un portefeuille de nouveaux développements et répondre rapidement aux besoins du marché", explique-t-elle.

Innover avec les universités chinoises et indiennes

À côté des développements spécifiques pour leurs clients, ce réseau alimente des travaux transversaux, sources d’innovation grâce à des partenariats avec des universités de haut niveau en Chine et en Inde. Le groupe travaille notamment sur les problématiques spécifiques de formulation de la médecine traditionnelle chinoise, avec le projet prometteur de développer des patchs, une forme galénique qui intéresse ses unités de recherche. En Inde, où le marché connaît une forte croissance (+ 45 % en 2022), le potentiel en matière de R & D laisse espérer un fort essor du secteur pharmaceutique. "Les structures indiennes de recherche sont audacieuses et efficaces, grâce à des temps de développement plus courts", fait-elle observer. Issues de cette recherche, de nouvelles solutions en injectable pourraient être prochainement fabriquées aux États-Unis. Cette belle machine à innover a permis à Gattefossé de bâtir un portefeuille de brevets constitué de 195 marques pour ses deux marchés (cosmétique et pharmacie). À ce titre, elle a été récompensée par les trophées INPI en 2022.

Spécialisé dans la chimie du végétal, Gattefossé adresse le marché de la cosmétique (50 % des ventes) avec ses actifs issus de végétaux et de la chimie des lipides, dotés d’un positionnement sur la sensorialité et le soin. Elle fournit également les entreprises pharmaceutiques (50 % des ventes), sans oublier son incursion récente sur le marché exponentiel des compléments alimentaires (nutraceutique).

En croissance de 17 % comparé à 2021, son chiffre d’affaires 2022 a atteint 140,6 millions d’euros, tiré par la croissance des marchés indien, espagnol, français et du Sud-Est asiatique. "Mais la croissance effective des ventes (sans l’inflation et les variations de taux de change) s’élève à 5 %", nuance-t-elle.

Barrières réglementaires en Chine

L’internationalisation du chiffre d’affaires a été portée dès la première moitié du XXe siècle par des distributeurs puis des filiales en Europe, avant de prendre une dimension mondiale à partir des années 1980, notamment pour accompagner des clients sur place. "Nous sommes allés aux États-Unis à la demande de Johnson & Johnson pour la pharmacie et L’Oréal en cosmétique", illustre Ségolène Moyrand-Gros. Puis, c’est à la demande de Janssen en 2007 que l’entreprise s'installe en Chine, notamment à Shanghai depuis 2016. De fil en aiguille, elle construit un réseau commercial de 12 filiales (Brésil, Tunis, Shanghai, Singapour, États-Unis, etc.) et d’unités de production à Singapour, en Espagne, aux États-Unis (en construction), sans oublier le site lyonnais.

Aujourd’hui, en dehors des États-Unis, l’épicentre de sa croissance se situe en Inde, en Asie du Sud-Est et en Chine, qu’elle s’emploie à faire redémarrer. L’ensemble génère 20 % du chiffre d’affaires. "Isolé du réseau Gattefossé lors de la crise sanitaire, le potentiel chinois est aussi élevé que le sont ses barrières réglementaires, notamment pour la pharmacie", confie la jeune présidente. Le challenge reste motivant car l’appel du marché chinois est universel : "tous les fabricants veulent aller en Chine", estime-t-elle. Les entreprises chinoises elles-mêmes plébiscitent la cosmétique française.

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