Dans la Plastics Vallée, les entreprises prises en tenaille entre rebond et contraction de la matière première
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Dans la Plastics Vallée, les entreprises prises en tenaille entre rebond et contraction de la matière première

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Dans la Plastics Vallée, dans l’Ain, qui rassemble quelque 3 200 entreprises du secteur de la plasturgie, les tensions sur les matières mettent en difficultés des entreprises déjà fortement impactées par le ralentissement de l’activité en 2020. Certaines, dans les secteurs de l’emballage et du médical parviennent tout de même à tirer leur épingle du jeu.

88 % des plasturgistes sont confrontés à au moins un problème d’approvisionnement — Photo : MIHB

La première pierre a été posée début janvier. Bientôt, un nouveau bâtiment de 1 000 m² verra le jour à Val-Revermont, dans l’Ain. Pour cela, Rovipharm, une PME de 77 salariés qui réalise 15 millions d’euros de chiffre d’affaires, a injecté six millions d’euros. Un investissement qui va permettre à l’entreprise spécialisée dans la fabrication de dispositifs médicaux et de packagings pharmaceutiques à base de polymères, de lancer la production de pointes en plastique jetables, servant notamment dans la réalisation des tests PCR. Des pointes actuellement en rupture de stock en France et en Europe. Pour ce projet, Rovipharm a fait partie des premiers lauréats du plan de relance.

Emballage et médical en plein essor

À une trentaine de kilomètres de là, au cœur de la Plastic Vallée, Infiplast, spécialisée dans les dispositifs médicaux, a elle aussi été soutenue dans le cadre du plan de relance, pour son projet de pérennisation de production de filtres pour respirateurs, lancée il y a un an.

Depuis le début de la crise sanitaire, les entreprises de la plasturgie ont été fortement sollicitées. "Les deux grands vainqueurs sont le secteur de l’emballage et du médical, où l’on a redécouvert les vertus hygiéniques du plastique, salue Simon Gourgaud, délégué régional du syndicat professionnel Polyvia. Mais paradoxalement, au lieu de valoriser la capacité de ces industriels à faire face à la crise et à mettre au point des solutions utiles, on leur reproche de profiter de la crise pour remettre le plastique sur le devant de la scène", regrette-t-il.

Si certaines entreprises tirent profit des effets de la pandémie de coronavirus, le monde du plastique a été fortement impacté par la crise sanitaire. Dans la Plastics Vallée, - le plus gros groupement du secteur en Europe qui rassemble environ 3 200 entreprises de la plasturgie pour 10 000 emplois et un chiffre d’affaires de 20 milliards d’euros selon l’interprofession -, le chiffre d’affaires a chuté de 15 à 20 % en 2020. "Selon les secteurs, les disparités sont énormes, souligne Simon Gourgaud. Dans l’aéronautique, l’effondrement est total. Dans l’automobile, on dépasse aussi souvent -20 %."

Confirmation de Bénédicte Palisse, directrice générale Europe d’Adduxi, spécialisée dans la réalisation de pièces plastiques, principalement pour le secteur automobile (300 salariés, 50 M€ de CA en 2020). "Nous avons enregistré une baisse d’environ 20 % et nous avons dû mettre à l’arrêt pendant deux mois l’activité de notre filiale aux États-Unis", explique la dirigeante de la société basée à Belignat qui a congédié cinq personnes en France et a rapatrié sa filiale suisse dans l’Ain. Heureusement, en 2021, l’activité repart à la hausse pour Adduxi. "Nous avons beaucoup de commandes. Le premier trimestre 2021 s’annonce bon", se réjouit la dirigeante.

Une pénurie de matières premières

Une ombre vient toutefois assombrir les perspectives des plasturgistes. Depuis quelques semaines, les pénuries de matières menacent la production. "Le mois de mars et d'avril ont été très tendus", indique Bénédicte Palisse. Même crainte pour Frédéric Jullien, dirigeant de MIHB (190 salariés, 34 M€ de CA en 2020), également plasturgiste dans l’automobile. "C’est tendu sur toutes les matières, pas seulement le plastique, mais aussi les composants électroniques et métalliques dont nous avons besoin", explique-t-il.

"Les délais de livraison de l’une des matières que nous utilisons viennent de passer de 7 à 37 semaines avec des conditions d’achats très fluctuantes et à la hausse. Conséquence, nous devrons acheter au prix du moment." Une situation complexe. "Pour l’instant, nous sommes dans une souffrance absolue. Nous nous dépannons un peu entre confrères, jusqu’au moment où nous serons en rupture", explique le dirigeant, qui dispose en moyenne de six semaines de stock.

"Avec le ralentissement de l’activité dû à la crise sanitaire, certaines unités de production de matière ont été mises à l’arrêt. Maintenant que l’activité repart, il faut les relancer, mais ce n’est pas si facile. Cela crée une inertie qui désorganise toute la chaîne", explique Simon Gourgaud. Une enquête réalisée au niveau national, "assez représentative de la situation au niveau local", montre que 88 % des plasturgistes sont confrontés à au moins un problème d’approvisionnement et 47 % se sont vus notifier un ou plusieurs cas de force majeure. Pour 12 % des entreprises sondées, cette pénurie a des impacts graves sur l’activité. "Cette crise de matières premières intervient alors que les industriels sont déjà fragilisés par la crise de 2020, ajoute Simon Gourgaud. Dans la Plastics Vallée, on trouve surtout des sous-traitants, dont la production répond à un cahier des charges précis et une marge de manœuvre étroite". Pour l’heure, les donneurs d’ordres, qui rencontrent souvent les mêmes difficultés, se montrent plutôt compréhensifs. Mais reste à savoir jusqu’à quand.

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