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Yves Sutter (PDG de la Soredic) : « On affiche nos ambitions »
Interview Rennes # Tourisme # Investissement

Yves Sutter PDG de la Soredic Yves Sutter (PDG de la Soredic) : « On affiche nos ambitions »

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Le groupe breton Soredic (220 salariés, 45 M€ de CA en 2018), qui exploite l’enseigne Cinéville, 5e réseau de cinéma français, veut reconquérir le public rennais, après l’arrêt du Cinéville Colombier. Deux salles de cinéma high tech sont lancées au sud de Rennes, qui s’inscrivent dans un plan global de 22 M€ d’investissements.

Yves Sutter, PDG de la Soredic, veut reconquérir le cœur des Rennais, grâce à deux nouveaux complexes Cinéville high-tech, au sud de Rennes. Le plan d'investissement global pour le groupe est de 22 M€ — Photo : © Baptiste Coupin

La Soredic - Société rennaise de diffusion cinématographique - ouvre deux salles de cinéma Cinéville au sud de Rennes (Bruz et Vern-sur-Seiche, NDLR). Elle déménage aussi son siège social à Vern et inaugure une plaine de jeux pour enfants, sur le même site. Quel message le groupe envoie-t-il à travers ce vaste projet ?

Yves Sutter : Il n’y a pas beaucoup de monde qui investit 22 millions d’euros cette année sur le territoire rennais… Le message que l’on veut faire passer, c’est que nous sommes un groupe local, que l’on croit en notre territoire, à son potentiel et à son développement. Quand on crée des cinémas, on sait qu’on a des montées en puissance qui se font sur trois à cinq ans. On ne vient pas en donneur de leçons, mais on affiche nos ambitions !

Le Cinéville Colombier a cessé son exploitation à la fin septembre. Pourquoi quittez-vous le centre-ville de Rennes où vous étiez historiquement implanté depuis 2005 ?

Y. S. : Notre réimplantation répond avant tout à des questions économiques. Nous avons perdu 50 % de spectateurs à Rennes entre 2003 et 2018 en raison d’une concurrence sévère. Il y a d’abord eu l’ouverture d’un CGR à Cap Malo, en 2003. Puis, l’implantation d’un Gaumont en 2008, tout près du Cinéville. La pérennité économique de l’activité était clairement questionnée. On a vu que le sud de Rennes n’était pas encore exploité, et, après une rude bataille, nous avons obtenu le droit d’exploiter deux cinémas à Bruz et Vern. En tant qu’acteur local, on ne concevait pas d’être sorti du bassin rennais, ce qui a failli se produire…

« En tant qu’acteur local, on ne concevait pas d’être sorti du bassin rennais, ce qui a failli se produire… »

Le Cinéville Colombier est situé à un endroit stratégique du centre-ville (sur la dalle du Colombier, NDLR). Le bâtiment est-il en vente ?

Y. S. : Oui, l’actif sera vendu. Nous en espérons plusieurs millions d’euros. Mais sur un délai que l’on ne connaît pas et à un acheteur que l’on ne connaît pas. Il y a des discussions. L’actif appartient à la Soredic. Il y a six salles de cinéma et une salle de discothèque, que nous louons actuellement. L’endroit est stratégique parce qu’il est situé au cœur d’une zone urbaine qui sera requalifiée, ce qui pose la question de sa valeur. Et les projets ne se font pas indépendamment des choix de la Ville… C’est un sujet complexe. Je pense que le bâtiment mettra plusieurs années avant de changer de main mais ça ne nous pose pas de problèmes.

Quelles sont vos nouvelles ambitions sur le territoire rennais, avec vos deux nouveaux cinémas ?

Y. S. : On sait qu’on aura deux-trois ans de reconstruction d’image. Le Cinéville Colombier ne reflétait plus ce que nous sommes aujourd’hui. On avait cette image un peu bas de gamme, un peu low cost, parce qu’on était en « mode » survie. Aujourd’hui, dans toutes nos villes, on a des cinémas récents, modernes, avec des grandes salles et une politique tarifaire modérée. Notre métier, c’est de nous projeter sur l’avenir et d’être sur des équipements pérennes et performants pour être compétitifs. Nos nouveaux cinémas de Bruz et de Vern sont deux très beaux cinémas avec de belles prestations offertes aux spectateurs. L’objectif c’est de faire 600 000 entrées annuelles sur ces nouvelles installations, quand on en faisait entre 250 000 et 300 000 pour le Colombier.

L'établissement Cinéville de Bruz a été inauguré en mai 2019. Le complexe cumule 6 salles et près de 1000 places — Photo : © Cinéville

Combien de cinémas Cinéville la Soredic exploite-t-elle aujourd’hui et comment anticipe-t-elle son avenir ?

Y. S. : Nous exploitons un réseau de 16 cinémas. Neuf en Bretagne et six en Pays de la Loire, nos deux régions historiques, et un dans les Hauts de France (Hénin-Beaumont, NDLR). Nous faisons 45 M€ de chiffre d’affaires en 2018 et employons 220 salariés. Nous sommes sur un schéma croissant, avec un périmètre de salles qui augmente. Nous visons 6 millions de spectateurs à horizon 2022 contre 5 millions aujourd’hui. Nous avons vocation à nous développer, plus par de la création, même si nous ne sommes pas fermés à de l’acquisition. Nous venons d’ailleurs de prendre 100 % du capital de la SA Les Cinémas de l’Odet, à Quimper (29), ce qui nous permet d’avoir le monopole d’exploitation dans la ville. On construit par ailleurs un cinéma de quatre salles à Pont-l’Abbé (29), qui va ouvrir en décembre.

« L’expérience qu’on offre reste unique. »

Que peuvent proposer vos salles de cinéma aujourd’hui en plus face à la concurrence, et notamment les plateformes vidéo comme Netflix ou OCS ?

Y. S. : Nous ne cherchons pas forcément à nous différencier de la concurrence en termes d’opérateur de cinéma. Ce qui fait que les gens choisissent d’aller voir tel film dans telle enseigne, ça va être la proximité avant tout. Maintenant, on travaille pour que les gens soient le mieux accueillis possible. Par rapport aux plateformes, le cinéma conserve une exclusivité de quatre mois à la sortie d’un film. Ça reste une expérience technique qu’on ne peut pas avoir chez soi, d’où l’intérêt aussi de monter en qualité dans l’offre. Il y a aussi la dimension collective. Quand on va au cinéma, il y a un partage d’émotions. Ça reste un moment fort. L’expérience qu’on offre reste unique.

Dans votre plan d’investissement en région rennaise, vous ouvrez également une plaine de jeux pour enfants à Vern-sur-Seiche. C’est un nouveau métier pour le groupe ?

Y. S. : Ça a été une aventure qu’on a commencée en 2015 dans la région d’Angers, à côté d’un cinéma. On s’est dit que c’était un marché assez éloigné du cinéma au niveau de la culture mais assez proche en même temps, car étant un divertissement familial. Il y a des fondamentaux que l’on connaît : construire des bâtiments, accueillir des publics, gérer un établissement… Le projet de Vern (1 400 m² de surfaces exploitées, NDLR), est plus costaud et plus structuré, grâce notamment à la création d’une filiale à part entière (Loopiland, NDLR). On implante aussi une crêperie qui sera un vrai restaurant autonome. C’est un pari auquel on croit. Le Val d’Orson va être d’ici la fin de l’année la plus grosse zone de loisirs en région rennaise, après Cap Malo, mais avec une proximité de Rennes beaucoup plus forte !

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