Pyrénées-Atlantiques
Patxi Elissalde (Estia) : "Notre école est un gros générateur de flux dans l’écosystème territorial"
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Patxi Elissalde directeur de l’École supérieure des technologies industrielles avancées (Estia) "Notre école est un gros générateur de flux dans l’écosystème territorial"

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Créée en 1996 à Bidart par la CCI, l’École supérieure des technologies industrielles avancées (Estia), dont Patxi Elissalde est le directeur, est aussi une pépinière d’entreprises fructueuse et un partenaire de choix pour les sociétés du territoire en quête de R & D. Elle vient d’inaugurer un dispositif spécifique en Europe dédié au recyclage des textiles et s’apprête à lancer un laboratoire sur les motorisations hybrides.

Patxi Elissalde est le directeur de l’ESTIA — Photo : Estia

Est-il important pour vous de travailler en lien avec les acteurs du territoire ?

Nous avons été créés par la CCI Bayonne Pays basque en 1996, avec la conviction que l’enseignement supérieur et la recherche sont des leviers pour favoriser le développement économique et la compétitivité des entreprises. C’est notre ADN, notre raison d’être. Nous gardons un ancrage fort au Pays basque, en Nouvelle-Aquitaine, dans l’Euro-région. Aujourd’hui, nous sommes dans une zone d’activités (à Bidart) où, 25 ans après la création de l’Estia, il y a 1 200 salariés. Sur le site, il y a plus de 100 entreprises, dont beaucoup sont nées dans la pépinière d’entreprises de l’Estia. La technopole de Bidart est une illustration d’un écosystème que l’Estia a largement favorisé. Nous travaillons aussi avec des réseaux nationaux et régionaux (Aerospace Valley, Digital Aquitaine…), recevons des étudiants internationaux (15 %) et comptons une quinzaine de nationalités parmi nos salariés.

L’Estia accueille plus de 1 000 élèves en 2023-2024, et est donc très impliquée dans le domaine de la recherche…

L’adossement à la recherche est une condition essentielle d’accréditation des écoles d’ingénieur. Dès l’origine, il y a donc eu la volonté de développer in situ de la recherche à finalité industrielle. Nos centres d’intérêt touchent plusieurs champs disciplinaires : la mécanique, l’électronique, l’automatique, la gestion et l’informatique. Nous avons aujourd’hui une équipe de 160 salariés dont la moitié sont affectés directement à des programmes de recherche, financés pour moitié sur les fonds propres de l’école. L’autre moitié des financements est à trouver. Cela oriente les activités vers des sujets plus proches des besoins des services de R & D des entreprises ou des organisations avec qui nous souhaitons mettre en place des partenariats (contrats de recherche, projets collaboratifs à plusieurs entreprises et laboratoires, chaires d’enseignement et de recherche.).

"L’école est un gros générateur de flux d’opportunités et de rencontres"

On travaille essentiellement autour de cinq axes : les logiciels et interfaces tangibles, où on s’intéresse aux technologies de la réalité augmentée, de la réalité virtuelle, de l’ergonomie des interfaces ; l’écoconception ; l’intégration des énergies renouvelables dans les systèmes de distribution d’énergie électrique ; les systèmes cyber-physiques, c’est-à-dire à l’intégration de l’humain dans les systèmes industriels ; puis les procédés de fabrication du futur, donc la modélisation, la simulation, la robotisation des opérations.

L’Estia a développé quatre plateformes d’innovation au service des entreprises (Energea sur les énergies renouvelables, Pepps sur le prototypage, Compositadour pour les matériaux composites et Addimadour pour la fabrication additive métallique). Une autre, le Datalab, est en préparation sur les usages de l’intelligence artificielle, et deux voient le jour. Pouvez-vous en dire plus ?

Nous venons d’inaugurer le Cetia, à Hendaye, une première européenne dans le domaine de l’économie circulaire. Le dispositif regroupe des technologies industrielles permettant d’expérimenter des procédés de recyclage des matériaux textiles pour en refaire de la matière première. Pour cela, nous avons créé une filiale avec le Centre européen des textiles innovants (Ceti), qui est à Lille.

Nous avons aussi TurboLab, un laboratoire commun avec l’entreprise bayonnaise Akira (50 salariés, 9 M€ CA 2022, NDLR) qui sera inauguré en janvier 2024 visant à développer des technologies de motorisation hybride et de turbomachines. C’est un investissement assez lourd (dont le montant n’est pas encore communiqué, NDLR) qui consiste essentiellement en un centre d’essais de turbines pour plusieurs entreprises du secteur de l’aéronautique concernés par l’évolution des systèmes de motorisation, tels qu’Akira ou Safran. Je ne pense pas qu’il existe un autre centre comme celui-là en France.

Ces plateformes s’ajoutent aux existantes, dont Energea, à travers laquelle nous avons investi dans un réseau de production et de stockage d’électricité à l’échelle de notre campus. Ce réseau en autoconsommation est aussi un outil d’expérimentation et de recherche pour développer, avec des entreprises ou d’autres laboratoires, des dispositifs visant à favoriser l’autoconsommation d’électricité produite notamment par le photovoltaïque ou l’éolien.

L’école, située à Bidart, accueille plus de 1 000 étudiants — Photo : Estia

Quels autres acteurs du territoire se servent de cette plateforme ?

Il n’y a pas de frontière, nous travaillons avec des acteurs du territoire et d’ailleurs : des fournisseurs d’énergie comme INR et Enargia, qui sont locaux, ou avec EDF, l’installateur SOLTeA ou Optera.

Qu’en est-il des chaires d’enseignement et de recherche ?

Les chaires sont des programmes d’une durée limitée de trois ou quatre ans, financés ou cofinancés par une ou des entreprises mécènes et qui encouragent l’école à développer des enseignements et des travaux de recherche dans un domaine qui les intéresse. Nous avons la chaire BALI, dans le domaine du textile avec sept ou huit entreprises concernées, qui a conduit à la création du Cetia, ou encore la chaire FlexTech dans le domaine des systèmes autonomes et de l’ingénierie système. Cela concerne plutôt les grands opérateurs du transport ou du militaire : Thalès, Dassault, l’Armée de l’air, Ingenuity à Toulouse ou SCS, à Toulouse aussi.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la pépinière de l’Estia ?

Elle existe depuis la création de l’école et n’est pas réservée aux élèves. Aujourd’hui elle regroupe 55 entreprises. Nous avons des infrastructures qui permettent d’accueillir des entrepreneurs qui cherchent des locaux et du support. L’école est un gros générateur de flux et d’opportunités de rencontres, et en même temps les entreprises nous apportent beaucoup en nous alimentant en stages et emplois. Elles nous permettent aussi d’intégrer leurs besoins et influent sur le contenu de l’enseignement. C’est vraiment représentatif de la notion d’écosystème.

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