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International Women’s Forum AURA : "La parité est bénéfique pour la performance de l’entreprise"
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Vanessa Girardet présidente d’International Women’s Forum Aura "La parité est bénéfique pour la performance de l’entreprise"

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À la tête d’International Women’s Forum AURA depuis mai 2023, Vanessa Girardet milite pour la féminisation des instances de direction. Convaincue que la parité est un élément clé pour la bonne marche des entreprises, la commissaire aux comptes associée de Deloitte AURA veut encourager les femmes à oser.

Vanessa Girardet, présidente d’IWF AURA et associée Deloitte AURA — Photo : Olivier Ramonteu - olivier ramonteu

Quel a été votre parcours jusqu’à présent ?

Je suis expert-comptable, commissaire aux comptes et associée du cabinet de conseil et d’audit Deloitte AURA ainsi que membre du comité de direction Deloitte France. Je suis également leader parité au sein de l’entreprise où j’ai créé un club Women & Leadership en 2015. Nous avons notamment mis en place en 2022 un programme de mentoring baptisé Womantoring qui associe des cadres expérimentées et des femmes plus jeunes pour les aider à accéder à des postes clés sans renoncer à leur vie personnelle.

Avez-vous dû vous battre pour en arriver là ?

Je suis ambitieuse, mais pas prête à écraser les autres. Je n’ai jamais demandé quoi que ce soit pour mes promotions. Nommée associée en AURA quatre mois après mon retour de congé maternité, j’ai même ressenti un petit sentiment d’imposture. Mais j’ai de la chance car mon patron chez Deloitte a fait de la parité un des 3 piliers stratégiques de l’entreprise. Pour lui, une équipe diversifiée nourrit la performance.

Quelles sont vos ambitions à la tête d’IWF AURA ?

Membre fondatrice d’IWF AURA à l’été 2018, en charge de l’événementiel et de l’organisation d’événements, j’ai pris la succession de Valérie Lorentz-Poinsot, présidente de Boiron au printemps 2023. Je souhaite accueillir de nouveaux membres pour représenter un plus grand nombre de secteurs d’activité. Nous comptons déjà parmi nos membres la footballeuse Wendy Renard, la présidente de l’ASVEL féminin Marie-Sophie Obama, Aziza Gril-Mariotte, directrice du musée des Tissus, Aline Sam-Giao, directrice générale de l’Orchestre National de Lyon et de l’Auditorium, l’avocate Marie Josèphe Laurent, bâtonnière du Barreau Lyon, Virginie Boissimon-Smolders, CEO de MyFormality, Céline Gascon-Guénault, directrice de participations au sein du fonds Eximium, etc. Je souhaite renforcer les liens entre nos membres via notamment le partage d’expériences où l’on réfléchit ensemble sur une situation vécue en entreprise. Je crois aussi beaucoup au mentoring de femmes plus jeunes, nous "marrainons" des étudiantes de l’emLyon.

Quels sont les besoins spécifiques des femmes managers et dirigeantes ?

IWF AURA rassemble un panel de 250 femmes dirigeantes en AURA, qui se rencontrent lors de notre événement annuel. Nous organisons également une fois par mois des réunions de partage d’expérience. Nous avons besoin d’échanger nos bonnes pratiques pour nous entraider. Nous sommes confrontées aux mêmes freins pour nous affirmer en entreprise, avec souvent un sentiment d’imposture et du coup, nous avons les mêmes besoins de développement personnel pour nous sentir légitimes. Cela peut commencer par des actes apparemment anodins comme prendre la parole en public. De façon générale, nous cherchons à donner de la consistance au leadership féminin. 9 fois sur 10, quand on demande de citer un dirigeant charismatique, la personne citée est un homme. Nous travaillons aussi sur le management dit "agile", qui privilégie la réactivité, l’adaptabilité, l’intelligence collective des équipes, ainsi que le travail collaboratif et l’interaction.

En 2023, comment les femmes sont-elles considérées en entreprise ?

Chez Deloitte, jusqu’au grade de senior manager, la parité hommes/femmes est respectée mais seulement un quart des associés sont de sexe féminin. Je suis moi-même la seule femme associée en AURA, entourée de 7 collègues hommes. En réalité, les femmes décrochent souvent vers 33-35 ans à cause de leurs responsabilités familiales. Elles ont l’impression qu’elles ne peuvent pas tout gérer de front ; ce qui peut aussi être un choix. Et d’ailleurs, même si vous êtes dans un schéma d’épanouissement professionnel, d’aucuns pourront penser que vous négligez votre famille.

Dans l’entreprise, les stéréotypes sur les femmes ont la vie dure. Qu’il s’agisse des sautes d’humeur des femmes lorsqu’elles ont leurs règles, de la soi-disant moindre implication d’une femme lorsqu’elle devient mère ou encore sur le fait qu’une tenue féminine est provocante.

Selon vos observations, qu’apportent les femmes dans les gouvernances ?

Il est prouvé que les gouvernances hybrides, équilibrées en termes de genres, sont plus innovantes et performantes. Cela apporte de la richesse. Ceci dit, je n’adhère pas du tout au mythe de la superwoman et ne pense pas qu’il existe des "modes" de management féminin et masculin.

Quels sont les freins à l’instauration de la parité homme femme dans les entreprises ?

Nous avons beaucoup été aidées par la loi " Copé-Zimmermann " du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance, qui impose un quota minimal de 40 pour cent de femmes dans les conseils d’administration et de surveillance ainsi que par la loi Rixain du 24 décembre 2021 pour la parité "représentation équilibrée" dans les comités de direction. Mais il faut aller au-delà, notamment convaincre les hommes, à tous les niveaux de l’entreprise, de la nécessité de la parité. Il est souvent plus facile de nommer un homme à un poste de responsabilité ne serait-ce que parce que les filles, dès leur plus jeune âge, entre 5 à 8 ans, intègrent le fait qu’elles sont moins douées et ne peuvent pas être chefs d’entreprise. Il faut briser le plafond de verre. Le plus dangereux, ce sont les limites que l’on se pose à soi-même.

À votre niveau, comment réussissez-vous à garder un équilibre entre votre vie familiale et vos fonctions de dirigeante ?

Le plus difficile est d’apprendre à dire non, surtout quand on est passionnée par son travail comme moi. Mais je compartimente très bien ma vie. À 19 heures, je coupe tout et consacre 1 heure 30 à mes trois enfants, quitte à reprendre mes dossiers à 20 h 30. J’ai grandi avec le modèle de mes parents qui travaillaient beaucoup tout en s’occupant de nous.

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