C’est l’histoire d’un projet mené au pas de charge. En moins de deux ans, Dickson Constant (600 salariés, CA : NC) s’est doté d’un nouveau site de production, complété depuis par un outil logistique de pointe. Officiellement inauguré début avril 2023, ce nouvel ensemble, complémentaire du site historique de Wasquehal, vient augmenter de 80 % les capacités de production du spécialiste de la toile de store. De quoi pousser les feux, alors que la demande est au plus haut depuis le premier confinement. C’est d’ailleurs face à l’afflux de commandes, en 2020, que le fabricant de toiles de store, toiles marines, tissus d’ameublement et de revêtements de sols lance la mise en œuvre du projet, dans les cartons depuis quelque temps. "Nous enregistrions déjà 7 % de croissance par an depuis plusieurs années, et le site de Wasquehal était à saturation quand on a vu arriver la demande pendant le premier confinement. Il a fallu suivre", résume Eugène Deleplanque, le dirigeant de Dickson Constant. Le groupe américain Glen Raven, propriétaire depuis 25 ans de l’entreprise familiale, se range aux arguments des nordistes quant au choix de l’implantation de son deuxième site européen, imaginé un temps au Portugal. C’est bien à Hordain, entre Valenciennes et Cambrai, que l’usine voit le jour, sur une friche vacante depuis une douzaine d’années. "Au-delà de notre attachement très fort au territoire, l’avantage du site d’Hordain, c’est qu’il nous place au centre de l’Europe. Nous pouvons livrer tous nos clients en 24 ou 48 heures. Nous avons trouvé le site idéal, à proximité de deux autoroutes, et du site historique de Wasquehal, où les nouvelles recrues ont pu être formées", retrace le dirigeant de l’entreprise, qui réalise 80 % de son chiffre d’affaires, non communiqué, à l’export (50 % en Europe, 30 % au grand export). "Et la réhabilitation représentait un gain de temps par rapport à une construction neuve au Portugal". Trouvée en deux mois en 2020 grâce à Nord France Invest, l’usine démarre en mai 2021 ses premiers métiers à tisser. Ils sont alors une quinzaine, un peu perdus dans les salles immenses.
70 millions d’euros investis
En cours de route, le projet change de dimension. Devant la croissance qui ne ralentit pas, Dickson Constant décide d’aller plus vite que prévu. "Au départ, nous devions investir 40 millions d’euros, pour un gain de productivité de l’ordre de 50 %. Finalement, on est à 70 millions investis, l’augmentation de capacité est plus importante, et nous avons accéléré le calendrier entre les différentes phases. L’entrepôt, par exemple, était prévu pour plus tard", se félicite Eugène Deleplanque. Le nouveau site porte donc à 120 000 m² de toile la capacité de production journalière de Dickson Constant. 130 emplois ont été créés à Hordain, et les effectifs devraient atteindre 150 salariés à terme. Dans la région, l’entreprise emploie en tout 600 personnes.
Concrètement, 21 500 m² de bâtiments neufs sont donc venus s’adjoindre aux 17 000 m² de l’usine d’origine. La production, qui s’étend sur 20 000 m², comprend quatre ourdissoirs, soixante métiers à tisser à jet d’air et à lance, et une imposante rame d’ennoblissement en continu. Cette dernière permet, en bout de chaîne, de laver le tissu et surtout, d’y ajouter les apprêts nécessaires selon son usage. Pour les toiles d’extérieur, c’est ce traitement qui assure leur imperméabilisation et leur résistance aux UV. Dans l’entrepôt flambant neuf de 18 000 m², sont ensuite emmagasinées les productions d’Hordain et de Wasquehal, avant leur expédition. "Notre nouvel entrepôt vient remplacer ceux de Lesquin et de Cambrai. Il nous fait gagner en surface de stockage, tout en limitant les kilomètres parcourus entre nos différents sites", pointe Jean-François Dehouck, le directeur opérationnel de Dickson Constant. Cet entrepôt accueille notamment une solution de stockage robotisée pouvant accueillir 20 000 rouleaux de toile, qui permet d’alléger la manutention de 90 % pour les préparateurs de commandes qui, sans cela, manipulent des rouleaux d’une vingtaine de kg chacun. L’installation de carrousels verticaux automatisés permet également d’accélérer la préparation et l’expédition des échantillons, précieux outils d’aide à la vente.
"Nous allons finir d’aménager l’existant, et attendre notamment que soit pleinement opérationnel notre système de stockage automatisé. Mais nous avons prévu grand à l’achat, avec cette parcelle de 105 000 m² en tout, et nous nous en félicitons : nous avons encore de l’espace pour grandir," souligne Jean-François Dehouck.
Diversifier, recycler
C’est que Dickson Constant enregistre un fort dynamisme sur tous ses marchés, de plus en plus diversifiés. À 20 % par an ces dernières années, sa croissance lui a offert des chiffres d’affaires "historiques" en 2021 et 2022. "Le marché de la protection solaire est mature, mais nous progressons toujours fortement sur ceux de l’ameublement extérieur et intérieur, ainsi que sur les toiles marines et les revêtements de sol, la dernière gamme de produits que nous avons lancée, en 2021." Si 98 % du chiffre d’affaires de Dickson Constant étaient tirés de la toile de store il y a 25 ans, ce segment ne représente plus que 45 % de son chiffre aujourd’hui, alors même que les volumes ont fortement augmenté.
Alors que le site de Wasquehal conserve la production de toile de store et de toiles marines, le site d’Hordain se tourne plutôt vers les nouvelles productions du groupe, les tissus d’ameublement et les revêtements de sols. "Nous avons de nouveaux développements à l’étude, comme des gammes de coussins et de rideaux", présente Jean-François Dehouck. "Nous travaillons aussi sur de nouveaux procédés de fabrication, pour réduire l’empreinte de nos productions. Nous lançons ainsi, ce printemps, une toute nouvelle gamme de tissus d’ameublement, avec une trentaine de références intégrant 50 % de fibres recyclées, issues de nos chutes de production." Dans la même optique, le site d’Hordain est doté d’un poste de rebobinage, qui permet de recréer des bobines de fil complètes à partir des fins de bobines issues de la production.
Reste à voir si la belle croissance de Dickson Constant, résiste aux difficultés liées aux coûts de l’énergie (lire par ailleurs). Un point de forte inquiétude pour Eugène Deleplanque, qui a profité de l’inauguration du site pour appeler à une solution politique pour une sortie de crise rapide.
