C’est un fameux trois-mâts, actuellement en grand carénage (10 M€ de budget) dans le port de Bayonne à Anglet (Pyrénées-Atlantiques). L’Hermione, réplique du navire de guerre français, reconstruite par l’association Hermione-La Fayette y est depuis septembre 2021 pour, notamment, des problèmes de champignons. À son chevet, on trouve l’entreprise bretonne le Chantier du Guip (30 salariés, 3 M€ de CA), spécialisée dans la restauration et la construction de bateaux en bois : bateaux du patrimoine, bateaux de travail, yachts de belle plaisance.
Ouvrage complexe
Le Chantier du Guip a été choisi aux côtés de l’entreprise de Thouars (Deux-Sèvres) Asselin (120 salariés, 20 M€ de CA), également spécialiste de la rénovation du patrimoine. "Nous étions concurrents sur ce dossier et l’association a finalement décidé de partager le travail", indique Yann Mauffret, qui dirige le Chantier du Guip avec son fils Tegwen et Louis Mauffret. "C’est une bonne chose car il y a énormément de boulot. L’Hermione est, selon moi, l’ouvrage en bois le plus complexe qui existe en France. C’est un bateau extraordinaire sur lequel nous sommes très attentifs. Nous nous occupons plutôt de l’avant et Asselin de l’arrière du navire", poursuit-il.
Rénover un tel bateau demande des compétences particulières, que possèdent les deux concurrents. "Les charpentiers de nos deux sociétés, Asselin et Guip, qui se retrouvent sur le chantier ont un respect mutuel, donc cela fonctionne", assurent les dirigeants des deux entreprises, Yann Mauffret et François Asselin. Ce chantier hors normes a cependant demandé à la société bretonne d’adapter ses méthodes de travail. "D’habitude, nous travaillons sur nos sites à Brest, Lorient et l’Île aux Moines. Là, il a fallu constituer une équipe pour se rendre à Anglet. Nous avons choisi de créer une équipe dédiée de 6 à 8 personnes, car il faut un bon suivi sur un chantier avec des techniques complexes et anciennes de construction navale."
Des pièces de 900 kg
En effet, pas question de faire n’importe quoi sur l’Hermione. Si des concessions sont faites sur certains aspects, l’association tient au côté historique du bateau. "Pour une question de temps, nous n’avons pas pu rechercher toutes les pièces de bois en un seul tenant en forêt. En effet, on ne peut pas couper des arbres à n’importe quel moment de l’année. Il aurait fallu attendre de longs mois. Nous avons donc opté pour le lamellé-collé en accord avec l’association, c’est-à-dire coller des lamelles de bois ensemble pour réaliser les courbes. Certaines pièces, sur la trentaine à réaliser, font jusqu’à 900 kg. Elles sont construites en atelier à Brest où nous disposant d’un pont roulant pour les transporter. Elles devront être montées en septembre 2023 à Anglet, sans cet équipement. Il faudra donc trouver une solution."
Le travail a démarré à l’automne 2022 pour le Chantier du Guip avec le démontage des pièces. "De décembre 2022 à janvier 2023, nous avons cherché les bois nécessaires et commencé à réaliser les pièces en avril." Le travail se poursuivra cet été alors qu’ils font une pause habituellement. "L’Hermione fait partie du patrimoine français et permet aussi la formation de charpentiers autant que de marins. C’est très important pour nous !", conclut Yann Mauffret.
