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Weleda France adapte sa production au déremboursement de l'homéopathie
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Weleda France adapte sa production au déremboursement de l'homéopathie

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Avec le déremboursement de l'homéopathie par la Sécurité sociale depuis 2021, Weleda accuse une chute des ventes sur son segment santé. La marque suisse de cosmétiques bio et d'homéopathie, implantée dans le Haut-Rhin, s'adapte en réorganisant son site de production et en revoyant sa stratégie marketing.

Le laboratoire Weleda investit trois millions d'euros à Huningue pour réorganiser son site de production dans un contexte de déremboursement de l'homéopathie — Photo : Weleda

Le laboratoire Weleda fait partie du paysage pharmaceutique alsacien depuis près de cent ans. La marque suisse (CA groupe 2020 : 429 M€ ; 2 500 collaborateurs), qui fête cette année son centenaire, a implanté sa filiale française à Huningue (Haut-Rhin), à quelques encablures des frontières helvétique et allemande, en 1924.

Au sein du siège France, qui emploie 250 salariés en Alsace (320 au total dans l'Hexagone), le site de production fabrique 850 références de produits finis, principalement des médicaments homéopathiques (granules, globules, pommades et poudres orales) et des compléments alimentaires pour les réseaux de pharmacies. Les produits cosmétiques de la marque sont fabriqués en Allemagne et en Suisse, dans deux sites de production qui fournissent l’ensemble de la firme au niveau mondial.

En raison du déremboursement partiel de l’homéopathie en 2020, puis total en 2021, par la Sécurité sociale, la filiale française de Weleda a dû revoir sa stratégie. Elle chamboule ainsi son organisation productive et redéploie ses orientations marketing.

"Dans la lignée de la première phase de déremboursement de l’homéopathie par l’assurance maladie, passant de 30 à 15 % en 2020, nous avons perdu 20 % sur le segment santé. Avec le déremboursement total, nous accusons une chute de 50 % cette année", évalue Ludovic Rassat, directeur de la filiale France de Weleda, en poste depuis le début d’année. Weleda France réalise son chiffre d’affaires sur le marché tricolore à 70 % avec la distribution de produits cosmétiques (CA 2020 : 53 millions d’euros) et à 30 % avec l’homéopathie (CA 2020 : 24 millions d’euros).

Réorganiser la production à Huningue

"En raison du déremboursement de l’homéopathie, nous devons adapter l’outil industriel à de nouvelles productions. Nous allons ainsi fabriquer des pommades homéopathiques de gros volumes", précise Jean-Yves Saffroy, directeur général et pharmacien responsable chez Weleda France. D’ici 2023, le site haut-rhinois compte produire 1,5 million d’unités. L'entreprise investit trois millions d’euros dans ce projet, dont la demande de modification de locaux est actuellement examinée par l’Agence nationale de sécurité du médicament. Des autorisations de mise sur le marché devront également être délivrées.

Pour mettre en place ce projet sur le site de production d'Huningue, le groupe applique le principe des vases communicants à ces usines. Les pommades homéopathiques étant jusque-là produites en Suisse, le transfert de leur production en Alsace libère de l’espace dans le pays de la maison mère, qui sera réalloué à la production de cosmétiques supplémentaires. Et l’activité d’ampoules stériles injectables pour laquelle Huningue avait investi trois millions d’euros au début des années 2010 est transférée en Allemagne et redonne de la superficie au sein du site français.

Internalisation

En parallèle, pour amortir la baisse des volumes en homéopathie et pour absorber les coûts fixes et les frais de structure, Weleda internalise des activités auparavant sous-traitées. L’emballage des produits cosmétiques est désormais réalisé à Huningue depuis quelques mois. Tout comme la distribution depuis que Weleda a fermé, en mars, son site de distribution qui employait 11 salariés à Villeneuve-le-Roi (Val-de-Marne). Jean-Yves Saffroy le confesse : "par chance, l’activité cosmétique soutient l’ensemble pour passer le cap" de la baisse des ventes des produits homéopathiques.

À cette réorganisation productive s’est adjointe une gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) pour réallouer des tâches, accompagner le personnel et ne pas remplacer les départs. "Ce plan a été initié par mes prédécesseurs et le siège suisse joue le jeu pour soutenir sa filiale française", souligne Ludovic Rassat, qui reconnaît également des coûts de production en France plus avantageux qu’en Suisse. Le dirigeant prévoit désormais une "transformation en profondeur du marketing".

Le bio, marque de fabrique des cosmétiques

Avec les confinements induits par la pandémie de Covid-19 et la baisse de fréquentation des commerces, Weleda a perdu 5 % sur le segment des produits cosmétiques en 2020. Ils sont vendus pour moitié en pharmacies et, pour l’autre moitié, à parts égales entre les parapharmacies et les magasins bio. En 2021, Weleda France prévoit un gain sur les cosmétiques de l’ordre de 5 à 10 % et mise aussi sur le développement de son site marchand. "Pendant la crise sanitaire, nous avons été plus visibles en ligne par obligation et nous voulons développer ce canal de vente d’ici 2022", souligne Ludovic Rassat, dont la marque a enregistré, en 2020, 5 % de ses ventes en ligne, réalisées aussi bien sur son propre site que sur des places de marché.

Weleda est un acteur historique du bio. "Sur le segment des produits certifiés bio, nous réalisons 35 % des parts de marché en France et 11 % si ce segment est élargi aux produits naturels", décrit Françoise Kessler, directrice commerciale et marketing de Weleda France. Pour elle, la vision aux origines de la marque est holistique (*), "la santé et la beauté étant pensées comme un tout". La dirigeante remarque aussi "une grande loyauté à la marque de la part de la clientèle". Et puisque le discours est à "la cosmétique propre, écoresponsable et aux emballages écologiques, Weleda s’inscrit en réponse à ces attentes". La marque travaille en effet à l’augmentation de la part des matières recyclées dans ces emballages pour atteindre 65 %.

Nouvelles formulations

Enfin, Weleda veut s’appuyer sur la notoriété de son offre cosmétique pour devenir une "marque ombrelle", présente Ludovic Rassat. Le directeur de la filiale France explique que "certaines formulations homéopathiques prescrites par les médecins et réalisées à la commande sont sous-exploitées". Dans cette optique, les formules qui fonctionnent bien ont vocation à être produites pour alimenter les rayons d’automédication des pharmacies avec lesquelles "Weleda établit des relations". Des demandes d’autorisation de mise sur le marché ont déjà été enregistrées. Au dire de Ludovic Rassat, Huningue pourrait "monter en puissance" à l’horizon 2023-2024 pour produire ces formulations pour le compte de l’ensemble du groupe.

(*) 34 % du capital et 76,9 % des droits de vote de Weleda AG sont détenus par deux actionnaires principaux basés en Suisse : la Société anthroposophique universelle (association internationale qui se charge de faire la promotion de l'anthroposophie) et la Clinique Arlesheim (qui pratique la médecine anthroposophique).

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