Meurthe-et-Moselle
Valérie Creusot-Rivière : « Les commissaires aux comptes sont des créateurs de confiance »
Interview Meurthe-et-Moselle # Juridique

Valérie Creusot-Rivière présidente de l'Ordre des experts-comptables de Lorraine Valérie Creusot-Rivière : « Les commissaires aux comptes sont des créateurs de confiance »

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La présidente de l'Ordre des experts-comptables de Lorraine, Valérie Creusot-Rivière, est mobilisée à côté des commissaires aux comptes contre le relèvement des seuils d'audit légal prévu par la loi Pacte.

Valérie Creusot-Rivière est la présidente de l'Ordre des experts-comptables de Lorraine — Photo : OEC Lorraine

Le Journal des Entreprises : Présidente de l'Ordre des experts-comptables de Lorraine, vous soutenez les commissaires aux comptes mobilisés contre le relèvement des seuils d'audit légal de 3 à 8 M€ de chiffre d'affaires prévu dans la loi Pacte, le Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises préparé par Bercy. Pourquoi ?

Valérie Creusot-Rivière : En appliquant les seuils européens, ce sont plus de 190 000 entreprises, sur tout le territoire français, qui n'auront plus aucun contrôle externe indépendant. Les commissaires aux comptes sont des créateurs de confiance et le rapport sur lequel s'appuie le gouvernement pour relever les seuils oublie l'ensemble du travail qui est mené en amont, pour arriver à certifier les comptes d'une entreprise. Les PME ont actuellement besoin de sécurité, notamment financière, et les commissaires aux comptes en sont un des garants.

Appliquer des seuils européens en France n'a aucun sens : les Allemands n'ont pas le même tissu économique que nous, avec des entreprises de taille bien supérieure, et les Italiens sont allés au contraire vers une diminution des seuils pour gagner en sécurité en lutter contre la fraude. En Suède, par exemple, l'audit a été supprimé pour les petites entités dans un premier temps, avant d'être réintroduit. La France n'a aucune obligation d'appliquer ces seuils.

Pourtant, en supprimant 80 % des mandats des commissaires aux comptes, on permet aux PME d'économiser 880 millions d'euros...

V.C-R : C'est un chiffre qui n'a pas de sens. Il vaut mieux comprendre que l'économie moyenne par entreprise est d'environ 5 000 €. Et là, le jeu n'en vaut plus la chandelle. D'autant que cette mesure déboucherait sur le licenciement de plus de 7 000 collaborateurs.

« Les PME ont actuellement besoin de sécurité, notamment financière, et les commissaires aux comptes en sont un des garants. »

L'impression que ce projet laisse, c'est que le gouvernement souhaite enlever tous les garde-fous en pensant qu'ainsi, tout le monde sera content. Évidemment, nos clients ne vont pas faire des pétitions pour rester aux seuils actuels... Mais tout le monde peut comprendre qu'il faut de la confiance dans la vie économique des entreprises.

C'est dans ce contexte que vous avez pris connaissance de la position de Gérald Darmanin, le ministre de l'Action et des Comptes publics, qui a déclaré qu'il serait attentif à ce que les experts-comptables n'appliquent pas de surcoûts, lors de la mise en place du prélèvement à la source. Comment allez-vous réagir ?

V.C-R : C'est une situation inacceptable, ces propos sont scandaleux ! De plus, cette déclaration vient s'ajouter à celle de Christian Eckert, alors secrétaire d'État chargé des Comptes publics, il y a un peu plus d'un an, qui nous avait qualifiés d'escrocs. À travers de tels propos, notre tutelle cherche à nous discréditer et à nous stigmatiser. C'est inadmissible !

Dans un premier temps, nous avons donc décidé de suspendre l'opération Allo-Impôts en Lorraine. Il faut comprendre que la profession d'expert-comptable est en révolution. Nous demander de ne pas facturer nos services, c'est tout simplement nier l'intérêt de notre travail, qui est d'accompagner les entreprises. N'en déplaise à M. Darmanin, le travail supplémentaire imposé par l'administration fiscale sera facturé.

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