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Le beau potentiel des drones nantais
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Le beau potentiel des drones nantais

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Les drones de Pilgrim Technology, Dronelis, Helicéo ou Aléo Intervention prennent de plus en plus de hauteur. Nantes est, après Bordeaux, l’une des régions les plus actives sur le marché des drones, dont l’usage s’impose de plus en plus dans les secteurs professionnels. Les 80 acteurs réunis au sein d'un même cluster militent pour la création d’un centre d’essai de drones, une infrastructure qui serait inédite.

De plus en plus d'acteurs du BTP utilisent des drones pour surveiller la bonne réalisation des travaux. — Photo : Pilgrim Technology

Et si un jour les facteurs de l’Île d’Yeu étaient remplacés par des drones ? C’est ce qui avait poussé La Poste à se lancer dans le cluster drone créé par la CCI Nantes-St-Nazaire il y a près de 3 ans. Depuis, l’idée est un peu restée en sommeil, à l’image de beaucoup d’acteurs qui s’étaient précipités en 2012 vers les drones pensant à un décollage en flèche de son usage. « On a vu à l’époque beaucoup de gens qui étaient en totale reconversion professionnelle qui voulaient devenir pilote de drone », se souvient Anne-Marie Haute, PDG de Pilgrim Technology, une PME nantaise spécialisée dans l’inspection de sites industriels avec des drones. Ces centaines d’apprentis pilotes sont, depuis, redescendus sur terre, ou ont tout simplement déposé le bilan.

« À Nantes, entre les écoles et universités, et les sous-traitants d’Airbus, on a tout ce qu’il faut à disposition. »

Le marché n’était pas encore mature. Si le drone utilisé comme un jouet attire le grand public, il a mis plus de temps à être considéré comme outil de travail pour les professionnels. C’est sur ce marché-là que les perspectives sont désormais les plus prometteuses pour les « dronistes », comme ils se surnomment. Et sur ce terrain-là, les Nantais sont en train de prendre de la hauteur par rapport aux autres régions.

Quand les Bordelais envient le matériel nantais

Ils arrivent même à faire déplacer des acteurs de Bordeaux, qui reste, en France, la région la plus avancée dans le domaine des drones, grâce notamment aux subventions accordées par le Conseil régional et les investissements des acteurs de la défense tels que Thalès et Dassault. Les Bordelais viennent ainsi tester leur drone, dans les souffleries du Centre Scientifique et technique du Bâtiment (CSTB), dans le nord de Nantes.

C’est l’un des seuls sites en France à mettre à disposition des dronistes une soufflerie qui permet de tester en condition réelle, selon le vent et les températures, l’utilisation des drones. « Beaucoup nous l’envient », explique Anne-Marie Haute, PDG de Pilgrim Technology. C’est dans ce centre qu’elle a testé les drones qu’elles fabriquent. « À Nantes, entre les écoles et universités, et les sous-traitants d’Airbus, on a tout ce qu’il faut à disposition », explique-t-elle. C’est en partie grâce à cet écosystème vertueux que Pilgrim Technology a décroché en février l’appel d’offres lancé par EDF pour le démantèlement de centrales nucléaires à l’international. Ce contrat devrait faire atteindre le million d’euros de CA à la fin de l’année à cette PME créée en 2012 qui emploie 8 salariés.

Un centre d’essai en négociation

Comme les 80 acteurs réunis au sein du Cluster Drones Atlantique, Anne-Marie Haute milite pour la création d’un centre d’essai de drones. Aujourd’hui les opérateurs ou constructeurs sont obligés de négocier avec des aéroclubs ou des clusters, ce qui pèse dans leurs projets de R&D. « Des discussions sont en cours avec le Conseil national pour les drones civils », indique Didier Virot, animateur du cluster au sein de la CCI Nantes St-Nazaire. Il pourrait être l’un des seuls centres d’essai de drones en France. Cela représenterait alors un point d’attractivité supplémentaire pour Nantes au niveau européen. La région a une belle carte à jouer dans le secteur, alors que la réglementation européenne devrait évoluer d’ici un an et homogénéiser les pratiques. « La France est pionnière dans le domaine des drones en Europe », confirme Anne-Marie Haute. Pour conserver sa place, les entreprises commencent à jouer collectif en nouant des partenariats et en se structurant.

Les dronistes se structurent

Ce sont des PME qui ont pour la plupart 5 ans à peine d’existence et qui comptent une dizaine de salariés. Elles travaillent pour l’industrie, le BTP ou les médias. Ainsi, Pilgrim Technology, pour qui l’activité drone représente 40 % de l’activité, travaille en partenariat avec des acteurs locaux tels que la toute jeune start-up Novyspec qui édite un logiciel d’analyse de la donnée récoltée par objets connectés, mais aussi avec le Nantais Roboplanet, qui conçoit et commercialise des robots pour assister les humains dans leurs interventions sur des sites industriels. Partenariat et rapprochement aussi pour Pixiel (25 salariés, 2M€ CA en 2017) la PME qui s’est associée au Puy du Fou pour présenter un spectacle, un ballet de drones. Elle vient de passer sous le contrôle du lyonnais Delta Drone.

Prestataire pour des chaînes de télévision, Dronelis (12 salariés), dirigé par Guillaume Richard, a, lui, noué un partenariat avec le groupe angevin Larivière, distributeur national spécialiste des matériaux pour la toiture, pour que ses drones inspectent les toitures. L’opérateur qui a ouvert un bureau à Lyon et Bordeaux a reçu le soutien financier de Charles Beigbeder, de Philippe de Portzamparc, et de Jean-Pierre Benque, ancien dg adjoint d’EDF. Dronelis propose aussi ses services aux acteurs du BTP.

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C’est aussi ce que fait Aléo Intervention. La PME dirigée par Philippe Guerlot qui s’était déjà spécialisée
dans les travaux sur cordes propose désormais à ses clients d’utiliser des drones pour inspecter leurs
ouvrages
. Elle s’est associée avec le groupe de BTP Lang (250 salariés, 30 M€ de CA) pour proposer aux bailleurs sociaux d’analyser l’état des façades avec ses drones. Elle a décroché un premier contrat avec la SNCF pour inspecter ses ponts. Hélicéo, la PME de Jean-François Baudet qui conçoit, développe et réalise des drones civils professionnels pour les métiers de la géomatique, et qui vole aussi du côté de San Francisco (20 salariés, 3 M€ de CA) a même créé son propre réseau de 300 géomètres experts et topographes pour répondre à la demande croissante du secteur des TP et BTP.

Drone solaire ou à hydrogène

Reste encore quelques verrous à faire sauter pour faire décoller la filière. Et le plus important concerne la durée de temps de vol qui aujourd’hui est limitée à 15 minutes. Sur ce sujet, la région a aussi tous les atouts de son côté. Un drone solaire autonome est en cours de développement à Guérande. Le projet, baptisé X Sun, est piloté par Benjamin David, un ingénieur qui compte 15 ans d’expérience dans l’aérospatial. Il envisage de tenter le record du monde de distance en continu cette année. « Nous souhaitons nous développer à l’international dès que possible. Et nous envisageons d’atteindre 3 M€ de chiffre d’affaires ainsi qu’une vingtaine de collaborateurs dès 2020 », explique le chef d’entreprise.

Il serait donc possible de distribuer le courrier sur l’Île d’Yeu en drone solaire, ou en drone fonctionnant à l’hydrogène. C’est l’un des scénarios évoqués l’an dernier aux journées de l’hydrogène de Nantes. Le CEA Tech y a présenté un drone à hydrogène expérimental capable de voler jusqu’à 40 km. Le CEA Tech explore en effet plusieurs pistes, suite à des demandes de divers clients.

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