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Sylvain Méharèche (Partners Finances) : « Avec la remontée des taux, nos marges seront moins compressées »
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Sylvain Méharèche (Partners Finances) : « Avec la remontée des taux, nos marges seront moins compressées »

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Avec une part de marché de 21 %, un chiffre d’affaires de plus de 50 M€ et un effectif dépassant les 500 personnes, Partners Finances s’affiche comme un poids lourd du regroupement de crédit. Mais le directeur général de la société Sylvain Méharèche ne veut pas s’arrêter là : en 2020, le volume financé doit dépasser le milliard d’euros.

Sylvain Méharèche est le directeur général de Partners Finances — Photo : © Groupe Mentor

Au sein du groupe nancéien Mentor (CA : 152 M€ ; effectif : 1 000) les activités finance et assurance sont regroupées sous l’entité Spartfin, qui pèse aujourd’hui 87,5 millions d’euros. Comment s’est déroulé l’exercice 2019 pour Partners Finances, qui réalisé la moitié de cette activité ?

Sylvain Méharèche : Plutôt bien. Le marché du regroupement de crédits en France est stable. Il représente entre 16 et 17 milliards d’euros par an. Le marché intermédié, c’est-à-dire le marché réalisé par des cabinets de courtage en crédits, fait cette année un peu plus de 4 milliards. Sur la part des 4 milliards, Partners Finances a réalisé 850 millions d’euros. Nous avons donc pris une part significative du marché intermédié en France, avec 21 %. De plus, il s’opère un déplacement du marché vers le marché intermédié : la raison principale, c’est que les banques préfèrent faire réaliser des opérations par des intermédiaires.

La situation est donc favorable au marché intermédié ?

Oui, surtout sur le marché de la consolidation de crédits, le métier de Partners Finances. C’est un marché qui nécessite de l’expertise, les travaux que nous réalisons sont assez manuels. Pour l’étude d’un dossier, il faut reprendre chaque bulletin de salaire, chaque compte bancaire, chaque crédit du client, étudier le titre de propriété… Aujourd’hui, ce métier coûte très cher, car le traitement d’un dossier coûte cher. Nous réalisons en moyenne quatre dossiers par collaborateur et par mois, quand un courtier en prêt immobilier va réaliser entre 8 et 10 dossiers.

Quelles sont vos prévisions pour 2020 ?

Le marché intermédié va encore augmenter sur le marché de la consolidation. Il va reprendre entre 8 et 12 points sur 2020. Pour Partners Finances, nous visons entre 1,1 et 1,2 milliard d’euros de réalisation en 2020. Cela représente un volume financé supplémentaire de 250 millions, soit une croissance annuelle d’environ 25 %. Depuis le début de l’année, nous sommes sur cette tendance.

Quelle est votre stratégie pour développer votre position ?

Les clients ne viennent pas tout seuls. Nous déployons beaucoup d’énergie pour conquérir des prospects. Dans le groupe Spartfin, nous avons fait l’acquisition d’une plateforme d’affiliation, c’est-à-dire un grossiste qui vend des prospects. Aujourd’hui, le web pèse 70 % des volumes de notre sourcing. Concrètement, les clients vont sur des comparateurs, sur Google, effectuent des recherches en utilisant des mots-clés comme crédit, rachat de crédit, consolidation de crédit. C’est là où il nous faut être. Les moyens financiers engagés sont considérables : on parle en millions d’euros… Je ne vais pas vous révéler ce que nous dépensons chaque année. Mais je peux vous dire que pour le mois de janvier 2020, nous avons dépensé 1,1 million d’euros.

Le durcissement des conditions d’accès au crédit peut-il vous toucher ?

Non, ça va bousculer une partie du prêt immobilier. Aujourd’hui, l’État interdit d’endetter les ménages au-delà de 33 % et considère qu’il ne faut pas emprunter au-delà de 25 ans. Concrètement, ce durcissement risque de restreindre l’accès aux primo-accédants, des jeunes couples par exemple, qui veulent acheter leur maison. L’enjeu n’est pas d’enrayer le dynamisme de la distribution du crédit, mais de le canaliser pour éviter la surchauffe.

Parce qu’il y a un risque d’entrer en surchauffe sur la distribution de crédit ?

Non, pas du tout. En 2019, sur l’immobilier, on a battu des records, soit 1,1 million de transactions, et on pourrait avoir l’impression que tout va s’emballer. Sauf que la situation est différente : le législateur a pris des mesures qui sont importantes, pour réguler la distribution et imposer des niveaux de fonds propres que les banques n’avaient pas avant la crise. Donc la distribution du crédit est aujourd’hui vraiment contrôlée.

Quand est-ce que les taux vont remonter ?

Il est temps qu’ils remontent un peu. Les taux bas fragilisent le secteur bancaire. Le modèle économique des banques est périlleux, notamment dans la distribution du crédit immobilier. Aujourd’hui, une banque ne gagne pas un seul centime sur un prêt immobilier. Elle gagne de l’argent, parce que vous devenez client de la banque et qu’autour, elle peut proposer des services. J’estime qu’à partir du troisième trimestre 2020, les taux vont remonter.

Cette remontée va-t-elle avoir un impact sur Partners Finances ?

L’impact pour nous, c’est que nos marges seront moins compressées. Aujourd’hui, nos marges sont compressées du fait que le taux d’usure est relativement bas. Le taux d’usure, c’est le taux maximum. Dans ce taux maximum, vous devez intégrer le taux nominal, le taux que le client va payer. À côté de cela, la banque va facturer des frais de dossier. Nous, Partners Finances, nous prenons des honoraires qu’on va intégrer. On va aussi rajouter les frais de notaires, les frais de garantie. Avec tout ça, on fait un package, ça fait un taux et ce taux ne doit pas dépasser le taux d’usure. Donc plus le taux d’usure descend, plus le prêteur va compresser son taux débiteur, en jouant un peu sur les frais de dossier. Tout le monde va faire un effort, sauf le notaire, sauf l’État. Le prêteur a des limites : quand il achète l’argent à 1, il ne peut pas le revendre à 0,90. Donc c’est le courtier qui va encore faire un effort. Et l’impact est quand même énorme… Donc le fait que les taux augmentent, oui, enfin, on va retrouver un peu plus de marge. Par contre, sur les volumes, ça n’aura pas d’incidence.

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