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Quand les territoires ruraux innovent pour aider les entreprises à recruter
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Quand les territoires ruraux innovent pour aider les entreprises à recruter

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Dans de nombreux secteurs, des entreprises peinent à recruter, et parfois, l’éloignement des grandes métropoles ajoute à la difficulté. Dans les territoires plus ruraux, des collectivités mettent alors en place des actions pour améliorer leur attractivité et capter une nouvelle population.

Dans les territoires ruraux, collectivités et entreprises travaillent souvent main dans la main pour développer l'attractivité — Photo : Bénédicte Hascouet

Pour les entreprises en milieu rural, l’implantation géographique est parfois une difficulté supplémentaire pour le recrutement. Laurent Marbach, le président de l’entreprise Grolleau, qui emploie 180 salariés à Montilliers, à une demi-heure d’Angers et de Cholet, le reconnait presque comme un facteur aggravant. « L'une des causes de ces difficultés est l'éloignement, déplore-t-il. Il n’y a par exemple pas de transport en commun pour desservir la commune. » L’an passé le dirigeant a même proposé une forme de parrainage : une prime de 300€ offerte au salarié qui convainc une personne de rejoindre l’entreprise…. Mais au-delà de ce type d’initiative individuelle, certaines collectivités s’engagent elles aussi aux côtés des entreprises pour les soutenir dans leurs recrutements.

Habitat jeune et collocation

« Sur le territoire, confie Philippe Chalopin, maire de Baugé-en-Anjou et président de la communauté de communes Baugeois-Vallée, nous évaluons à une centaine les emplois vacants et nous avons identifié le logement comme l’une des raisons de ces difficultés de recrutement des entreprises. » La commune de Baugé-en-Anjou a donc ouvert il y a moins de deux ans une résidence jeunes travailleurs pour les 16-25 ans, avec 15 logements, tous occupés. « Et la liste d’attente est importante, affirme Philippe Chalopin.

Cela reste un hébergement temporaire mais c’est une première étape pour que ces jeunes se fixent ensuite sur le territoire. Nous avons aussi une autre offre de logement, en partenariat avec le bailleur Maine-et-Loire Habitat : 5 chambres en colocation pour des adultes, réservées aux entreprises. Nous en aurons 7 autres dans les prochains mois. » Avec un taux de vacances proche de zéro dans l’habitat social, la collectivité vient aussi de réengager un programme de construction de grande ampleur, pour renforcer son parc avec les deux bailleurs Maine-et-Loire Habitat et Podeliha.

Six mois de loyers offerts

Toujours en Maine-et-Loire, Anjou Bleu Communauté, qui regroupe les communes des cantons de Segré, de Pouancé et de Candé, s’est elle aussi penchée sur cette question du logement. Avec une initiative originale : « Quand une entreprise recrute à l’extérieur du territoire, explique Gilles Grimaud, le président de la collectivité et maire de Segré en-Anjou-Bleu, nous finançons les six premiers mois de loyer puis il s’effectue directement un glissement du bail au nom du locataire. Nous avons élaboré ce projet avec Podeliha et Maine-et-Loire Habitat qui mettent une soixantaine de logements à disposition sur l’ensemble du territoire. L’opération démarre en cette fin d’année pour trois ans et les entreprises peuvent le mettre en avant dans leurs offres de recrutement. » Des PME qui sont pleinement investies dans ce projet, via l’association Asdepic, le réseau des dirigeants du Segréen : « Tout seul, l’emploi proposé ne suffit plus, assure Arnaud Payen, le président d’Asdepic et dirigeant de l’entreprise de communication et de marquage publicitaire Empreinte, à Segré. Nous travaillons ensemble pour que nos entreprises et le territoire soient attrayants, et cette initiative sur le logement est encore un atout supplémentaire. Au sein du réseau, nous mettons aussi nos offres d’emploi en commun, pour proposer des postes aux éventuels conjoints des candidats qui envisagent de venir s’installer sur le territoire. C’est un moyen de les rassurer. »

Permis de conduire et covoiturage

Outre le logement, la mobilité est aussi l’une des clés du recrutement dans les territoires ruraux. Là aussi, des initiatives sont mises en place pour favoriser les déplacements des salariés. Pour exemple, en Sarthe, le Fonds d’action sociale du travail temporaire (Fastt) et l’association mancelle Carbur’Péra ont lancé un dispositif d’accompagnement au passage du permis de conduire à destination des intérimaires. Baptisé « Atouts permis », il est censé aider les salariés inscrits dans les agences d’intérim sarthoises à financer et à aller au bout de l’examen de conduite. Et lorsque les salariés disposent de leur propre moyen de locomotion, ici et là, on tend à encourager le covoiturage. De nombreuses aires ont été aménagées dans les départements, et leur fréquentation s’accroît. En Baugeois-Vallée, la collectivité veut même aller plus loin : « Nous allons croiser les informations des différentes entreprises pour savoir d’où viennent les salariés, précise Philippe Chalopin, établir une carte et pourquoi pas créer notre propre plateforme de covoiturage. »

Si les territoires plus ruraux innovent pour se rendre séduisants et attirer de nouveaux habitants mais également de nouvelles entreprises, ils peinent parfois à le faire savoir, et à valoriser leurs atouts face à la toute puissance des métropoles et à leur force de communication. A eux aussi d'inventer et pourquoi pas de développer collectivement de nouvelles synergies.


A Ruillé-sur-Loir, le coworking à la campagne

Et si le coworking n’était pas un concept citadin ? C’est ce que veut démontrer la communauté de communes Loir-Lucé-Bercé, dans le sud de la Sarthe, à près d’une heure du Mans, avec l’ouverture à Ruillé-sur-Loir au printemps dernier de Loircowork, un espace de coworking auquel sont inscrites aujourd’hui 35 personnes :

Dans le sud de la Sarthe, Loircowork accueille 35 coworkers dans son espace dédié — Photo : Cédric Menuet - Le Journal des entreprises

« Ce sont des gens qualifiés, cherchant à lier qualité de vie et conditions de travail, explique Ronan Kerisit, responsable du pôle développement économique et aménagement numérique de la communauté de communes Loir-Lucé-Bercé. Ils ont en général des attaches familiales ou une résidence secondaire sur le territoire ». Parmi eux, des entrepreneurs locaux, des « nomades digitaux » (des personnes de passage cherchant une connexion internet pour travailler) et même des profils internationaux comme ce cadre de Scandinavian Airlines qui fréquente régulièrement les lieux. « Avec le développement du travail à distance, ajoute Denis Turin, vice-président de la communauté de communes, en charge du développement économique, nous captons aujourd’hui des gens en week-end, susceptibles de venir ici dès le jeudi pour repartir le lundi. Nous avons même sensibilisé les notaires à notre espace de coworking. Pour eux, c’est un argument de vente de maisons secondaires. » Loircowork s’insère dans le développement de la filière numérique locale. Baptisée Loir Tech, celle-ci s’articule autour de l’espace de coworking et de l’Enssop, école de formation aux métiers du numérique. Créée à l’initiative des entreprises locales Microtec, AP & SI et PMB Services, elle a vocation à répondre aux problématiques de recrutement en développeurs informatiques sur le territoire.

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