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Benoît Van Ossel (Les Côteaux Nantais) : « Notre levée de fonds s'appuie sur des critères RSE »
Interview Loire-Atlantique # Agroalimentaire # Levée de fonds

Benoît Van Ossel PDG des Côteaux Nantais Benoît Van Ossel (Les Côteaux Nantais) : « Notre levée de fonds s'appuie sur des critères RSE »

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Acteur majeur de l’arboriculture en biodynamie, l’entreprise Les Côteaux Nantais (130 salariés, 19,8 M€ de CA en 2017) a récemment finalisé une levée de fonds de 5 millions d’euros. À cette occasion, le PDG Benoît Van Ossel a souhaité se faire accompagner par des fonds intégrant les critères RSE ou spécialisés dans les investissements à impact social.

Benoît Van Ossel, PDG des Coteaux Nantais, a levé 5 millions d'euros auprès de fonds intégrant des critères sociaux et environnementaux — Photo : Les Coteaux Nantais

Le Journal des Entreprises : Pourquoi avez-vous ouvert le capital de votre entreprise ?

Benoît Van Ossel : Avec mes associés Michel Delhommeau et Robert Dugast, nous avons levé 5 M€. Cette opération est destinée à renforcer nos fonds propres après que nous avons investi 9 M€ dans notre nouveau site de transformation à Remouillé (Loire-Atlantique). Ces fonds doivent nous permettre de terminer les aménagements de l’usine et, notamment, de finaliser l’investissement informatique dans une logistique 4.0. Cela va également nous permettre d’envisager la création d’un nouveau verger de 30 hectares pour renforcer notre approvisionnement en matières premières. La levée de fonds doit aussi nous donner la possibilité de réaliser une petite opération de croissance externe dans une activité complémentaire à nos produits d’épicerie. Enfin, nous voulons renforcer notre présence sur nos différents canaux de distribution bio, le circuit court local et la vente en BtoC.

Qui sont les investisseurs ?

B. V. O. : J’ai cédé 35 % du capital de l’entreprise à trois investisseurs. Unexo Capital Investissement, filiale du Crédit Agricole, et Océan Participations, filiale du Crédit Mutuel Océan, ont apporté chacun 1 M€. Les deux banques que je viens de citer sont des partenaires historiques.

« Je voulais accueillir à notre tour de table des investisseurs locaux, en mettant en avant auprès d’eux des critères RSE. Car je pense que c’est l’avenir. »

Je voulais en effet accueillir à notre tour de table des investisseurs locaux, qui plus est spécialisés dans l’économie agricole, en mettant en avant auprès d’eux des critères RSE. Car je pense que c’est l’avenir. C’est pourquoi j’ai également souhaité être accompagné par l'un des deux ou trois acteurs européens qui interviennent dans le monde du bio et sont spécialisés dans les investissements à impact social. Ils s’inscrivent dans une démarche régénératrice et permaculturelle de l’économie, qui réconcilie économie, écologie et sens.

Je suis ainsi allé chercher le fonds suisse Quadia, qui est mené par des gens ayant envie de donner du sens à leurs investissements et qui ne raisonnent pas uniquement en termes de TRI (taux de rentabilité interne, NDLR). Quadia a investi 3 M€, dont 1 M€ en obligations convertibles. En préalable à cette levée de fonds, nous avons été soumis à une analyse financière mais aussi à une étude extrêmement détaillée de notre impact social et environnemental.

Quels sont ces critères sociaux et environnementaux évalués par les investisseurs ?

B. V. O. : Ils ont d’abord vérifié que nous étions bio-inspirés. C’est le cœur même de notre modèle. Nous nous sommes convertis au bio dès les années 1970 et à la biodynamie en 1995. À l’époque, c’était précurseur. Les Côteaux Nantais est aujourd’hui devenu un acteur majeur des fruits produits sous le label Demeter, un label bio exigeant. Nous cultivons 40 variétés différentes de pommes, sept de poires. C’est unique en Europe. Nous respectons la biodiversité dans nos pratiques culturales.

« Nous sommes très vigilants à n’embaucher que des saisonniers locaux. Nous préférons faire vivre les personnes qui achètent et consomment nos produits localement. »

Un autre critère important est notre contribution au développement de l’économie locale. À cet égard, nous avons mis en avant notre production locale : nous exploitons 103 hectares de vergers en biodynamie, répartis dans six exploitations autour de Nantes. Ils nous permettent de récolter 2 500 tonnes de fruits par an. Nous en calibrons 6 000 tonnes. Un complément provient de huit producteurs, situés à moins de 150 km de Nantes et rassemblés dans l’association Les Vergers d’avenir. Nous nous sommes engagés à acheter 80 % de leur production de pommes et à les former à l'agriculture en biodynamie. Nous avons, par ailleurs, créé Kerbio, une filiale qui commercialise nos produits en circuit court.

Nous sommes également très vigilants à n’embaucher que des saisonniers locaux. Des sociétés me proposent régulièrement de recruter des saisonniers venant d’Europe de l’Est. Ce serait beaucoup moins cher, mais nous préférons faire vivre les personnes qui achètent et consomment nos produits localement.

Quels sont les autres critères pris en compte ?

B. V. O. : Un autre item important a été notre approche circulaire de l’économie. Nous sommes très attentifs à ne pas gaspiller. Par exemple, nous utilisons le fruit dans son entier. Les pommes de premier choix sont commercialisées comme fruits. Le deuxième choix est transformé en produits pâteux. Le troisième choix est employé dans les liquides et le quatrième choix transformé en vinaigre. Les déchets partent en compost et servent à alimenter notre centrale bioénergétique Naoden. Celle-ci produit, sur notre station fruitière de Vertou, de l’énergie et de la chaleur qui sont récupérées pour chauffer les bâtiments et faire fonctionner les chaînes de calibrage des fruits. Rien ne se perd.

« Le facteur humain impacte nos choix industriels. »

Dans le même esprit, nous avons optimisé nos nouvelles installations avec pour résultat une économie de 80 % de l’eau que nous utilisons, par rapport à nos équipements précédents. Nous faisons également beaucoup de R&D sur le packaging pour parvenir à le recycler. Nos sachets de pommes sont ainsi complètement compostables. Notre mode de travail collaboratif a aussi été pris en compte, tant dans notre gestion de projet en interne, que dans la façon dont nous travaillons avec le groupe européen d’agriculteurs en biodynamie, auquel nous achetons des fruits pour compléter nos récoltes.

Et les critères humains ?

B. V. O. : J’ai déjà évoqué notre politique vis-à-vis des saisonniers. Nous plaçons l’humain au centre de notre paradigme économique. Nous nous préoccupons bien évidemment au premier chef des conditions de travail de nos salariés. Nous leur accordons des rémunérations que je qualifierais d’honnêtes. Et puis, le facteur humain impacte nos choix industriels.

Sur notre nouveau site de Remouillé, nous avons triplé nos capacités de production. Nous aurions pu la multiplier par cinq ou six, mais cela ne cadrait pas avec notre engagement RSE. Nous avons investi dans un outil industriel performant, en faisant délibérément le choix de ne pas opter pour des équipements tout aussi performants mais qui exigeaient de travailler en 3x8. Nous avons estimé que ce n’était pas compatible avec la qualité de la vie personnelle de nos collaborateurs.

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