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Coronavirus : En télétravail et en ateliers, l'usine Sodistra garde le cap
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Coronavirus : En télétravail et en ateliers, l'usine Sodistra garde le cap

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La PME mayennaise Sodistra, basée à Château-Gontier et spécialisée dans les solutions de traitement d’air pour l’industrie, n'a jamais cessé son activité depuis le début du confinement. Son dirigeant Erwan Coatanea, l'un des porte-drapeau du mouvement de la French Fab, espère même un rebond de l'industrie française après la crise.

L'entreprise Sodistra, à Château-Gontier, n'a pas cessé l'activité depuis le 17 mars — Photo : Sodistra

Dès le 17 mars, l’entreprise Sodistra, en Mayenne, a viré de bord, comme dans une course au large où tout le monde s’unit pour passer la tempête. Dans l’atelier, les marins s’activent à faire avancer l’embarcation. Pendant ce temps, à domicile, l’autre partie de l’équipe étudie pour eux les routes à prendre, évalue la météo à venir, réfléchit, prévoit et anticipe. À la barre, le capitaine Erwan Coatanea, l’un des porte-étendards du mouvement de la French Fab. Il échange avec ses équipiers dans le bateau comme avec ceux qui sont à quai. II a défini un cap et le maintient pour que le bateau Sodistra poursuive sa route.

« On vérifie la liste de courses et tout y est »

« La météo, on ne la craint pas, on l’affronte ! » La devise inscrite à l’entrée de l’entreprise Sodistra, à Château-Gontier, prend tout son sens en cette période de crise.

Dirigeant de Sodistra à Château-Gontier, Erwan Coatanea est l'un des plus actifs militants de la French Fab — Photo : Sodistra

S’il reconnaît que l’air de son Finistère natal lui manque un peu en cette période de confinement, Erwan Coatanea a trouvé, même en Mayenne, de quoi assouvir sa passion de la voile. Son entreprise Sodistra, 50 personnes pour 9 M€ de chiffre d’affaires, qui développe des solutions de traitement d’air pour l’industrie, entre autres agroalimentaire et pharmaceutique, poursuit sa route contre vents et marées. « Dans l’esprit de la French Fab tel que je le perçois, la digitalisation, la mise en place d’un fonctionnement nouveau avec la responsabilisation de chacun, l’intégration des jeunes dans une industrie de compétences, l’agilité, c’est ce que nous avions annoncé il y a un an et qui nous a permis de basculer très rapidement constate Erwan Coatanea. Aujourd’hui, on vérifie la liste de courses et tout y est ! Dès le 17 mars au matin, les bureaux ont été vidés et ne sont restés dans l’usine que ceux qui travaillent en atelier. »

Des précautions sanitaires évolutives

L’entreprise a ainsi modifié ses horaires, impose un lavage des mains plus fréquent, installé un marquage au sol et fabriqué des visières avec son imprimante 3D. Le vestiaire est actuellement condamné et les portes, dans l’usine, restent ouvertes. « Nous avions déjà mis en place les gestes barrière depuis début mars, ajoute Erwan Coatanea, et toutes les semaines, on fait le point et on ajoute des choses. » French Fab oblige, le dirigeant de Sodistra a aussi commandé à son voisin de Château-Gontier Laurent Lairy, dirigeant de ProtectHoms, des masques confectionnés dans son atelier du nord de la France… En ordre de marche face au Coronavirus, Sodistra fonctionne donc avec 15 personnes en télétravail et 30 dans les ateliers, Erwan Coatanea alternant entre son domicile et l’usine, entre collaborateurs à distance et ceux qui sont physiquement présents sur le site. « Cette organisation, nous avons pu la mettre en place très vite grâce au dialogue, assure-t-il. Il y a eu des craintes, ce que je comprends. Il faut savoir les entendre, y répondre et surtout agir. Certains de ces modes de fonctionnement resteront sans doute après le confinement. »

Une nécessaire solidarité pour s’en sortir

Pour continuer de fonctionner, Sodistra disposait aussi d’un stock suffisant, s’approvisionnant majoritairement en France et dans une moindre mesure en Europe, avec des demandes à honorer. « On continue d’expédier, ajoute Erwan Coatanea. Si on a la matière première et le carnet de commandes, on se doit de continuer. En travaillant aujourd’hui, nos clients, même s’ils sont à l’arrêt, n’auront pas à nous attendre et pourront redémarrer tout de suite. Je ne veux pas être celui qui les freinera." Le dirigeant sait que le chiffre d'affaires de l'entreprise sera évidemment affecté par la crise. Il enregistre un ralentissement des consultations ou des demandes de chiffrage, mais pour l'instant il a choisi de continuer, tant que les commandes sont là. "J’aurai peut-être recours au chômage partiel au mois de mai, confie-t-il. Pour l'instant, je n'en ai pas besoin. Cela permet de laisser ces aides disponibles pour les entreprises qui ne peuvent pas encore reprendre l’activité. La solidarité commence là ! »

Cette solidarité, Erwan Coatanea la ressent aussi auprès de ses collègues entrepreneurs mayennais, et même partout en France avec le réseau de la French Fab : « Nous avions déjà une base solide en Mayenne et je suis impressionné de cette énergie commune. Chaque semaine, on se retrouve en visioconférence, avec les organismes d’État, le Medef ; la CCI, des médecins. Les échanges sont nombreux et il y a un besoin commun de trouver des solutions, comme au sein de la communauté French Fab. Je pense que ce sentiment de fierté de fabriquer en France va s’accélérer et il y a partout une vraie volonté d’entraide. Après la crise, il faudra aussi une solidarité plus forte pour accompagner les plus petits, ceux qui auront plus de difficultés et pouvoir ainsi emmener tout le monde. » L’après-crise, Eric Coatanea y pense lui aussi bien évidemment. Il s’attend à une baisse de chiffre d’affaires pour Sodistra, mais préfère se concentrer sur aujourd’hui : « Si on regarde loin, on se fait peur ! Alors, faisons tout pour en sortir grandi. Personnellement, essayer de le faire, c’est ce qui me fait fonctionner tous les jours et je me dope à l’énergie d’y croire encore. »

Même si elle est actuellement touchée, le défenseur de la French Fab dit garder foi en l’industrie française. Il pense qu’elle se relancera, avec des relocalisations et en collaborant. Le collectif, c’est bien ce qui semble être le maître-mot du dirigeant mayennais, qui tient haut la barre du bateau Sodistra pendant la tourmente : « La tempête, on la traverse avec un équipage volontaire et motivé. Et sans son équipage, un capitaine n’est rien. C’est ça aussi, entreprendre ensemble. Dans ma boîte, il faudrait rajouter un s à entrepreneur ! »

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