Lorsqu’il reprend en février la Manufacture de Clisson (ex Lethu Régence), Ghislain Cornué n’en est pas à son coup d’essai. Il est déjà patron de deux PME dans la région nantaise, l’une dans l’emboutissage de métal (Metalfa), l’autre dans le traitement de l’air (Tuvaco). En dix ans, il peut s’enorgueillir de les avoir redressées et développées.
Vouée à la liquidation judiciaire, la Manufacture de Clisson avait retenu son attention fin 2019. Cette PME créée il y a presqu’un siècle a successivement produit des vêtements orthopédiques, de la lingerie et des vêtements de nuit. Sans cap clair, elle tanguait depuis un moment. Ghislain Cornué décortique les raisons des difficultés économiques et fixe un nouveau cap : la fabrication de vêtement haut de gamme. « Il faut délaisser le marché de masse, où on ne peut rivaliser avec les Chinois, et développer une production ciblée, haut de gamme, en B to B, pour de grandes marques, à qui nous garantissons qualité et réactivité ». Le savoir-faire était là (14 salariés), ainsi que les équipements (80 machines à coudre, tables de coupe…).
Un grand moment de solitude
Le plan de relance est mis à rude épreuve mi-mars, avec l’arrivée du coronavirus. « L’annonce du confinement a été un grand moment de solitude. Avec un maximum de stress et l’inconnu qui s’impose… Le plus dur : les informations contradictoires et le climat d’inquiétude répétitif à la télévision. Humainement, c’était dur, inédit. Il fallait rappeler les clients, expliquer, mettre en place un protocole sanitaire, rassurer les salariés… », explique le dirigeant.
Mais pas question de baisser la garde. Pour Ghislain Cornué, « les crises sont aussi des périodes d’opportunité ». L’urgence est alors au maintien des emplois et de l’activité. Avec les mesures de confinement, la confection s’amenuise, bloquée par l’arrêt des réseaux de distribution. La chance va pourtant sourire à la PME de Clisson.
Sollicitée par des entreprises de la région pour fabriquer des masques – alors introuvables -, la manufacture va réagir très vite. Création d’un prototype selon les normes Afnor, travail en étroite concertation avec la Carsat pour faire revenir travailler les salariés dans des conditions de sécurité sanitaires satisfaisantes… : l’équipe de Ghislain Cornué fonce. Et cela paie.
L’objectif de chiffre d’affaires devrait être dépassé
Une semaine après l’arrêt des machines, celles-ci repartent, produisant 400 masques par jour. Avec le reste de l’activité dédié à la fabrication de vêtements pour ne pas accumuler trop de retard. Le bouche-à-oreille fonctionnant, 25 000 masques sont vendus. De quoi maintenir tous les emplois et la PME à flot.
Malgré les efforts déployés, le chiffre d’affaires n’a pas suivi la croissance initialement prévue pendant le confinement. Mais Ghislain Cornué envisage l’avenir avec sérénité : « Notre objectif, fixé à 600 000€ de chiffre d’affaires après un an d’activité, sera certainement dépassé. Nous étions déjà à 250 000 € après 16 semaines d’exercice. Nous avons réussi à instaurer un vrai climat de confiance avec nos clients, basé sur le respect d’un triptyque : un prix, un délai, une qualité. Aujourd’hui, ils nous suivent. Pour résumer cette sortie de crise, je me dirai enthousiaste, optimiste malgré tout et… un peu fatigué ! ».